ENCYCLOPEDIE -DE--LA--LANGUE -FRANCAISE
ABEILLE

APIDAE

---Les tribus hautement sociales, APINI---
abeille domestique sur fleur d'amandier (prunus dulcis)

Le GENRE APIS

---APIS MELLIFERA---

( VI )

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--L'OUVRIÈRE--

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Abeille butineuse en approche de sa cible, de belles fleurs de tournesol, toute langue dehors.

Saviez-vous que ce que nous voyons ici n'est pas une seule fleur ? En effet, les Composées, plantes de type "Astéracées", possèdent un capitule (réceptacle) portant deux types de fleurs :
- Les fleurs tubulées, tubuleuses, ou fleurons tubulaires, sessiles et hermaphrodites, au centre, produisant les akènes, contenant les fameuses graines de tournesol.
- Les fleurs (ou fleurons) ligulées, stériles, en périphérie, dont la corolle est formée de pétales soudés et déjetés (décalés par rapport à l'axe du pied), les ligules (ou demi-fleurons), terminées par des "dents" (en moyenne : 3 ou 5). Nous admirons en général ces corolles de manière erronée, comme de simples pétales d'une grande fleur ! Notez que l'ensemble des fleurs tubulées forment des ensembles mathématiques parfaits, disposés en spirales (bien visibles sur l'image ci-dessous) dites de Fibonacci (on y retrouve les principes de la "Suite" qui porte son nom et... le nombre d'or !) :

Schémas du capitule des plantes de type tournesol, avec : anthère, bractée, bractée capitulaire, fleurs ligulées et tubulées, ligules, ovaire, pappus, réceptacle, stigmate.

Butineuse
Récolteuse d'eau, de propolis
18e jour mini - 41e jour maxi environ (moyenne 23e - 30e jour)



Ce sont les dernières embauches de l'abeille ouvrière, qui consistent à récolter et rapporter à la ruche différents produits nourriciers ou utiles à la colonie :

- Nectar
- Pollen
- Propolis, Miellat et Manne
- Eau
 

 
BUTINAGE
 

Le butinage conditionne la bonne marche de la colonie. On sait que l'abeille possède génétiquement des préférences florales (Gould, 1984), mais l'expérience individuelle et collective sont indispensables à la recherche efficace de leur nourriture (Greggers et Menzel, 1993). Chez l'abeille, la locomotion a pour but principal la recherche de nourriture (Spangler, 1972). C'est une opération complexe, demandant de la part des abeilles une stratégie particulière, car divers facteurs influencent sa production et sa qualité (Janssens, 2006). Il faut tenir compte des saisons, à cause des disponibilités de pollen et de nectar, inversement proportionnelles au nombre d'insectes : richesse florale au printemps avec peu d'individus (environ 10.000 butineuses en pleine saison) et pauvreté à la fin de l'automne avec accroissement de la population (Gould et Gould, 1988, 1993; Schmickl & Crailsheim 2002; Seeley 1995; Schmickl & Crailsheim, K. 2002). Mais d'autres aléas interviennent, comme le taux de sécrétion du nectar , sa qualité, sa pureté, son taux de sucre, de même que le pollen, il peut être plus ou moins riche et altéré par l'environnement : insecticide, OGM, pollution, etc. Les sources d'approvisionnement peuvent être altérées aussi par les conditions climatiques (température, vent, pluie,etc.) ou édaphiques (relatifs à la nature du sol ou du sous-sol). Enfin, pour un butinage efficace, il faut que la communication entre individus ne soient pas trop altérée, ni le patrimoine génétique de la reine, ni l'état sanitaire de la colonie (maladies, parasistisme, prédation, etc.).
 
L'environnement proche de la ruche facilite plus ou moins le butinage, selon qu'il est riche en sources de nourriture ou non, qu'il comprend des points d'eau ou non. Ainsi, les ouvrières dépenseront beaucoup plus d'énergie à butiner au loin qu'à proximité de la ruche, un butinage "économique" se situant dans un rayon de deux kilomètres de la ruche,
90 % se situant dans les cinq kilomètres (Visscher et Seeley, 1982). Les conditions climatiques, le tarissement des sources d'approvisionnement obligent parfois la moitié des abeilles à visiter des fleurs situées à plus de 6km, à 10 % d'entre elles de parcourir plus de 9 km (Beekman et Ratnieks, 2000), une abeille faisant rarement plus de vingt allers-retours à la ruche, où elle indique à ses congénères par des danses (voir article : LES DANSES) les sources d'approvisionnement (nectar, eau). La régulation de l'activité de butinage est facilitée par une phéromone, l'EO (Ethyl-Oléate) :

"Le travail d’Yves Le Conte et de ses collègues, initié en 1998, a permis de décrypter une partie du fonctionnement de la régulation sociale du travail des abeilles, qui jusque-là ne faisait l’objet que d’observations et de théories.
L’équipe et ses collaborateurs ont identifié une nouvelle phéromone modificatrice, l’EO (Ethyl Oléate), produite par les butineuses (les abeilles les plus âgées). Les chercheurs ont démontré que cette phéromone joue un rôle essentiel dans la maturation du comportement des plus jeunes abeilles : elle agit comme un inhibiteur chimique qui retarde l’âge du butinage. Le début du butinage des plus jeunes abeilles est une des clés du mécanisme d’auto-organisation en réponse aux besoins de la colonie. Cette découverte démontre que l’organisation sociale permet aux abeilles de répondre à des changements par des actions appropriées à l’état de l’ensemble de la colonie.
Ainsi, si la structure de l’âge de la colonie change, le comportement des plus jeunes sera modifié pour répondre à ce changement. Par exemple, si les butineuses sont confinées dans la ruche, le développement des plus jeunes sera retardé par l’action de cette phéromone d’inhibition. Par contre, dans les colonies manquant de butineuses, les plus jeunes commenceront à butiner jusqu’à 2 semaines plus tôt que dans les conditions habituelles. L’EO est transmise par la trophallaxie...une forme de nourrissage spécifique par échange entre individus qui représente aussi un moyen de communication important chez les abeilles."

extrait de : http://www.inra.fr/les_recherches/exemples_de_recherche/la_regulation_du_developpement_comportemental_des_abeilles_lie_a_une_pheromone__1

 
Les plantes qui fournissent des ressources aux abeilles sont dites apicoles : Ce sont les plantes nectarifères et pollinifères, bien sûr, mais aussi celles qui sont productrices de substances récoltées par les abeilles : le miellat et la propolis. On sait depuis plusieurs années qu’une alimentation variée composée de pollens de sources végétales différentes, mais aussi de différents nectars est bénéfique pour les abeilles, car cela permet à l'animal de trouver l'ensemble des éléments nutritifs dont il a besoin (Schmidt et coll. 1987, 1995), essentiellement des sucres, des acides aminés et des protéines, nous le verrons aux chapitres du pollen et du nectar en particulier. En cas de pénurie naturelle, d'infestation ou de pollution des ressources, l'apiculteur peut être amené à donner à ses abeilles des compléments alimentaires : sirops de sucre, pâtes protéinées, par exemple.

La récolte de nectar ou de pollen est d'ordre séquentiel, nous pouvons la diviser schématiquement en divers comportements principaux, que nous emprunterons à une étude d'Apis mellifera sur le colza d'Omar Eduardo Bailez et de Min-Ha Pham-Delegue (1996) :
 
- Vol
- Arrivée sur la fleur
- Positionnement pour la prise de nourriture
- Recherche de nourriture
- Prise de nourriture
- Grattage : contact actif avec des étamines
- Brossage : ramassage du pollen sur le corps
- Remplissage : confection de pelotes
- Remplissage en vol des corbeilles
- Toilettage : élimination du pollen
- Nettoyage des antennes et/ou proboscis
- Marche ou vol vers une autre fleur.

 
SPECIALISATION
 

 
On ne sait pas encore très bien de quelle manière les spécialisations des tâches s'opèrent chez les ouvrières, mais le fait est établi, et ce jusque dans les collectes de pollen et de nectar, dont on pensait naguère qu'elles étaient communes à toutes les butineuses. Des apidologues ont démontré, en effet, qu'il existe des fratries entières spécialisées dans l'une ou l'autre activité de manière innée, génétiquement, donc (Calderone et al., 1989). D'autres avaient avant eux pointé le même déterminisme au sujet du soin et du nourrissage de la colonie en observant deux lignées paternelles de couleur différente (Frumhoff et Baker, 1988). L'âge de l'abeille influe aussi sur sa spécialisation, on le sait, car la maturation de l'odorat, progressive, ne permet pas à la jeune abeille de se lancer trop tôt dans l'exploration de la nature. De même, l'extension naturelle du proboscis, corrélé à une source odeur sucrée, est très variable selon les âges, les abeilles les plus jeunes montrant un taux élevé de réponse spontanée.

Nous avons évoqué les tâches qui pouvaient incomber aux ouvrières en âge de butiner : récolte de la propolis, de miellat, de manne ou d'eau, qui sont donc accomplies, nous l'avons dit, par des individus dévolus chacun à une tâche précise pendant une période variable (mais qui, rappelons le, peut changer d'activité en cas de nécessité, même très temporairement).
     
 Abeilles Apis mellifera en train de récolter de l'eau.
 
Ainsi, l'eau semble être souvent récoltée par une abeille qui s'en remplit le jabot à chaque voyage à un point d'eau et la distribue au retour de la ruche, aux nourrices pour la préparation de la bouillie larvaire, aux receveuses, pour rendre liquides des nectars trop visqueux ou encore pour maintenir le taux d'humidité de la ruche, qui doit être élevé en période d'élevage du couvain (60 à 85 %) ou, par évaporation, refroidir le nid pendant les grosses chaleurs (Elton et Herbert, 1992). Précisons par ailleurs que l'organisme de l'abeille n'est pas conçu pour éliminer l'eau par les voies naturelles. Son métabolisme hydrique s'établit par perméabilité du jabot et ne peut donc consommer un nectar trop aqueux. Par ailleurs, «d’après Smith (1959), "les petites larves grandissent mieux, se nymphosent mieux et deviennent aisément adultes quand la teneur en eau de la nourriture est légèrement augmentée, au cours des premiers jours. Pendant cette période de développement de la larve, on observe une décroissance graduelle de la teneur en eau de la gelée royale" ».

extrait de : http://www.beekeeping.com/abeille-de-france/articles/observer.htm

Le problème, parfois, est que les abeilles récoltent de l'eau qui contient des matières azotées dont elle a besoin, mais dans ce cas, elle contient aussi des éléments plus ou moins dangereux pour sa santé : germes, spores pathogènes, pesticides, antibiotiques, etc. Les hommes de l'Antiquité avaient eu la bonne intuition de préconiser aux apiculteurs de fournir de l'eau pure à leurs abeilles à proximité de la ruche !

http://irbi.univ-tours.fr/UIEIS/Site%20web%20UIEIS/Colloques/Actes%20colloques%201995/Bailez.pdf

Beaucoup de discussions demeurent sur la manière le comportement de l'abeille butineuse, complexe, où la phototaxie (voir Abeille : Vision et orientation) est corrélée avec la réponse gustative, où la réponse collective aux danses (voir article : LES DANSES) n'est pas automatique (Gould), etc.

 
APPRENTISSAGE
 

Si la capacité à apprendre a des bases génétiques (Papaj, 1993), le comportement qui en découle n'est pas transmis à la génération suivante et les espèces se servent de leurs capacités à apprendre en fonction de multiples paramètres relatifs à leurs propres capacités et à leur milieu environnant. Von Frisch est un des premiers savants à avoir cherché à connaître ces facultés d'apprentissage chez l'abeille. Celui des odeurs est, chez l'abeille, fondamental (voir aussi : Anatomie de l'abeille : Tête - Antennes). Il n'est pas difficile de comprendre pourquoi l'odeur prime dans la hiérarchie de ses apprentissages. En effet, si une forme peut être déteriorée, une couleur peut varier selon la polarisation de la lumière, alors qu'une odeur est une donnée très stable, malgré la variabilité des conditions naturelles.
 
Une abeille habituée à tel ou tel type de fleurs cherchera toujours, parmi des centaines d'espèces florales, à se diriger en premier vers l'espèce bien mémorisée. Il lui suffit d'une seule séance pour mémoriser une odeur de fleur qu'elle repèrera avec 90 % de réussite dans ses explorations ultérieures, ce taux grimpant à 98 % avec trois séances (Menzel et Erber, 1978). Il en est de même avec les couleurs des fleurs, qui demandent à l'animal à peine plus de temps d'apprentissage et, dans une moindre mesure, les formes, dont on a longtemps pensé qu'elles devaient être très découpées pour être mémorisables par l'abeille, alors que cette dernière peut reconnaître des formes différentes des fleurs, comme une fausse fleur carrée ou triangulaire, par exemple.
 
Frisch avait déjà remarqué, par ailleurs, que les abeilles pouvaient apprendre l'heure, au cours d'une journée (Frisch, 1967). Ce que Frisch ne connaissait pas, c'est le lien entre la mémoire de l'abeille et le temps de son apprentissage (Bogdany, 1978), dont on a découvert, peu à peu, l'importance. L'abeille peut ainsi apprendre jusque 9 temps différents de la journée, corrélés à des sources de nourriture (Koltermann, 1974). Des expériences montrent que l'abeille tient une sorte d'agenda avec les fleurs qu'elle visite. Cela lui permet de visiter les sources de nectar les plus avantageuses pour elles selon l'heure de la journée, selon le pic d'activité de la fleur, l'humidité, la température ambiante, etc. (Woyke, 1992). Ainsi, à telle heure donnée (avec plus ou moins vingt minutes d'écart), elle visitera telle fleur, et non telle autre même si l'expérimentateur lui présente une fleur riche en nectar (Bogdany). Bogdany, encore, a mis en évidence la structure hiérarchique de la mémoire de l'abeille, tenant cette fois à la fleur elle-même. Odeur, forme ou couleur ne sont pas mémorisées chaque fois par l'abeille si un changement se produit dans un des signaux. L'abeille ajoute à sa mémoire une donnée qui n'existait pas (manque d'odeur, par exemple), mais, si l'odeur de la même fleur a changé, l'abeille oublie les autres données principales pour elle concernant la fleur (Gould, Marler, "Pour la Science", mars 1987). Précisons aussi que les capacités d'apprentissage olfactif de l'abeille dépendent aussi du volume de la récompense alimentaire proposée par la plante, les premières augmentant, on s'en douterait, en fonction de l'importance de la seconde (Bailez, Pham-Delegue, 1996).

 
sources textes :
 

- http://www.cari.be/medias/pdf_ab.cie/113_clefspourlalimentation_1.pdf
- http://www.cari.be/medias/pdf_ab.cie/114_clefs_2.pdf
- http://www.jc-lenoir.fr/download/Rapport_DESS_JC_Lenoir.pdf
- http://www.avignon.inra.fr/content/download/3912/62598/file/UIEIS2006-Sokolowski.pdf
- Lire, comprendre, écrire le français scientifique: avec exercices et corrigé, Anne-Elizabeth Dalcq, Annick Englebert, Éric Uyttebrouck, Dan Van Raemdonck, Bernadette Devos-Wilmet, édité par De Boeck Université, 1999.
- http://irbi.univ-tours.fr/UIEIS/Site%20web%20UIEIS/Colloques/Actes%20colloques%201995/Bailez.pdf
 

sources images :

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http://www.ojodigital.com/foro/macros/211085-abeja-en-flor-de-almendro.html (amandier)
- http://www.tuswallpapersgratis.com/images/wallpapers/Bee_on_yellow_flower_1024x768-628523.jpeg (abeille et fleur)
- http://globalswarminghoneybees.blogspot.com/2007_08_01_archive.html (recolte eau)
- http://en.wikipedia.org/wiki/Image:Drinking_Bee.jpg (récolteuse d'eau)
- http://biomserv.univ-lyon1.fr/txtdoc/THESES/POMPANON/TheseFP.html