ENCYCLOPEDIE -DE--LA--LANGUE -FRANÇAISE
 

-ABEILLE
----
-
LES ABEILLES ET LES HOMMES
( XIII )

-croyances,
savoirs
et
apiculture

-
HISTOIRE
DE
--L'APICULTURE MODERNE-
et
MENTALITÉS--

NAISSANCES,
XVIe siècle


"Jean Marot, Voyage de Gênes, Tours, 1508
Peint par Jean Bourdichon pour Anne de Bretagne
BNF, Manuscrits, français 5091, f. 15v


Louis XII est représenté ici lors de la conquête de l'Italie. Il est vêtu, sur son armure, d'une cotte blanche brodée d'un semis d'abeilles d'or avec quelques ruches, motif qui accompagne la devise latine apparaissant sur la bordure de son vêtement et du caparaçon du cheval : Non utitur aculeo [rex cui paremus] (Le roi à qui nous obéissons ne porte pas d'aiguillon), ce qui signifie : il est clément à son peuple, comme le "roi des abeilles"."

texte et image extraits de :
http://expositions.bnf.fr/bestiaire/grand/074.htm


 
"Enfin, pour épuiser l'intérêt du cadastre de 1503, peut-être n'est-il pas superflu d'ajouter qu'il contient un dénombrement des ruches (bruscs). Tel propriétaire de Rieu en possédait, à lui seul, jusqu'à 120, et, si l'on fait le compte global de tous les ruchers, on arrive au nombre considérable d'environ 800 (771 exactement).
 
Sisteron au début du XVIe siècle
Thérèse Sclafert
Annales de Géographie Année 1928 Volume 37 Numéro 206 pp. 167-173


 
 
Manuscrit du Hortus Sanitatis de Jean de Cuba,
chapitre 12 sur les abeilles (voir ABEILLE - LE MOYEN-AGE 3 - OCCIDENT 3 - MIEL et CIRE)

Strasbourg, 1500

Ruches troncs avec leur couvercle et abeilles

 

En 1513, Gabriel Alonso de Herrera écrit un livre d'agriculture (Agricultura general, Alcalá de Henares, Arnao Guillén de Brocar) dont le cinquième volume est consacré aux abeilles, mais il produit, là, un énième ouvrage de compilation sur le modèle antique. Il fait à peu près ce que fera un peu plus tard le Français De Serres, en donnant des conseils sur la manière de construire les ruches, de les installer, de les entretenir, de préserver l'hygiène, etc.

Sebastian Münster (Sebastianus Munsterus, 1488, Ingelheim - 1552, Bâle), Cosmographia (Cosmographie Universelle), un des premiers ouvrages allemands sur la description du monde (cartes, histoire, mentalités, etc.), Berne 1545.

  
Giovanni Rucellai, 1475-1525, gouverneur du Château Saint-Ange à Rome écrit Le api (Les Abeilles) en 1524, poème de plus de mille vers inspiré du quatrième livre des Géorgiques de Virgile et utilisant pour la première fois le terme "versi sciolti" (vers libres), forme de versification nouvelle qui deviendra le standard de la Renaissance Italienne, utilisée dans des oeuvres majeures, comme celles des comédies d'Arioste ou l'Aminta du Tasse (Torquato Tasso, ou encore Il Pastor fido de Battista Guarini.


 
 
 

Détail du rucher
Mathis Gothart Nithart, dit Mathias (Matthias) Grünewald (Grünewaldum, 1475 - 1528) surnommé Maître Mathis.
Stuppacher Madonna (Madonne de Stupach), 1519.
 
"Le tableau de la Madone se trouvait à l’origine dans la chapelle de Notre Dame des Neuges à la collégiale d’Aschaffenburg -incontesté jusqu’à présent-. A partir de 1519 il y formait la pièce centrale d’un retable en trois parties.
En 1532, le cardinal Albrecht en fit présent aux chevaliers de l’Ordre Teutonique de Bad Mergentheim. Le chef d’œuvre fut restauré à plusieurs reprises et repeint selon le goût du temps et attribué à Rubens. Après la laïcisation de l’Ordre en 1809, le tableau fut transporté à l’église paroissiale de Stuppach en 1812 par le curé -ancien chevalier de l’Ordre- Balthasar Blumhofer. En 1908, M. Lange, professeur d’histoire de l’art à Tübingen confirma les recherches du peintre local Johann Retzbach (1882) et des restaurateurs Dirr (1811) et Ettle (1907). Il reconnut la «Stuppacher Madonna» comme œuvre de Matthias Grünewald. La petite paroisse de Stuppach fit restaurer le tableau par M. de Tettenborn, professeur à Stuttgart en 1926-1931. Entre-temps une chapelle fut bâtie comme annexe à l’église paroissiale pour y installer la «chère Madone». "

extrait de : http://www.bad-mergentheim.de/Notre-Dame-de-Stuppach.2033.0.html
 

C'est à cette époque que les Européens commencent à appendre que, par-delà les océans, les Indes Nouvelles possèdent toutes sortes de richesses, dont le miel :
Voir APICULTURE TRADITIONNELLE et PATRIMOINE - AMERIQUE PRECOLOMBIENNE

 
    Nous devons la première encyclopédie zoologique de la Renaissance, Historia Animalium, à Conrad Gesner (ou Gessner, Konrad, Conradus, 1516-1565), médecin Suisse allemand de Zürich. Appelé le Pline allemand par Cuvier, Gesner a tenté, à l'image de son époque, de répertorier par ordre alphabétique tous les animaux connus de l'époque, en tentant même une classification (et même une taxinomie à deux termes). Il publie de 1551 à 1558 les quatre premiers tomes mais meurt de la peste alors qu'il n'avait pas terminé son tome sur les insectes, Theatrum insectorum. Vendue à un assistant, Thomas Penny (1532 - 1589), médecin et naturaliste, y ajoute des travaux d'Edward Wotton (1492-1555), de Charles de l'Écluse (1525-1609), dont il tire des informations sur les abeilles, Joachim Camerarius le Jeune (1534-1598, Symbolorum et emblematum ex volatilibus et insectis desumtorum centuria tertia, Nuremberg 1596,) pour les coléoptères ou encore Jean Bauhin (1541-1613) pour les scorpions, sur lesquels il publiera son seul livre relatif au Theatrum insectorum, avant de mourir à son tour. C'est à un ami commun, ayant étudié comme lui à Cambridge, que reviendra le manuscrit, l'Anglais Thomas Moffett (Moufet, Mouffet, Muffet, Muffett, 1553 - 1604).
    Moffett le compléta en une seule année, sans réussir à l'imprimer, ce que fit Thomas Mayenne (1573-1655) en 1634 , mais avec des gravures sur bois et un papier, le tout de mauvaise qualité (Insectorum sive minimorum animalium theatrum, Londres, Thomas Cote). Travail rapide (on a dit bâclé), et en tout cas faisant oeuvre de compilation, moins pour les six premiers chapitres, peut-être, sur les abeilles, sujet de prédilection, semble t-il, pour Moffet. D'ailleurs, ce n'est sans dout pas un hasard si cette partie sur les abeilles n'est pas illustrée, alors que le reste l'est, emprunté au leg de Penny. En dehors des traditionnels commentaires sur les auteurs antiques (Aristote, Théophraste, Pline, Hesychius, Virgile), Moffet avance qu'en cas d'intempéries, l'abeille vole avec une petite pierre entre les pattes pour se lester et se maintenir en équilibre (ce qui est observable, en effet). Dans le chapitre deux, l'auteur prétend que le Roi des Abeilles fait mettre à mort quiconque, dans son royaume, se montre fou, laid ou malade de naissance, mais là, il semblerait que Moffet confonde une ruche d'abeilles et la famille régnante, les Tudor. A son honneur, cependant, il serait le premier à avoir émis l'hypothèse que la reine devait être fécondée hors de la ruche.

Év
En 1554, Charles Estienne, médecin puis imprimeur, écrit le premier ouvrage imprimé en France sur l'art rural, L’agriculture et maison rustique (Praedium rusticum), dont la traduction française sera ensuite assurée, en l'augmentant, par son beau-fils (le mari de sa fille, Nicole), Jean Liébault (1535-1596), médecin et agronome.

 
Charles Estienne, L’Agriculture et maison rustique, 1564. Paris : Par Iaques du Puis
Début du troisième livre de L’Agriculture et Maison rustique, p. 61. Plus un bref recueil de la Chasse & de la Fauconnerie.
Bibliothèque municipale de Lyon.

Dans l'ouvrage d'Estienne et Liébault de 1598, on trouve dix chapitres (LXIII à LXXIII) sur l’élevage des abeilles, au livre II des jardins. L'auteur désapprouve l'usage des ruches en terre cuite et en brique et recommande celui du bois, en premier lieu, sous forme de planches assemblées, puis de troncs évidés (ruches-troncs), et enfin d'écorces de chêne-liège, la férule n'étant citée qu'en dernier, l'auteur précisant que le choix dépend aussi de la disponibilité de la matière première (page 306). Par ailleurs, l'auteur, comme tous les autres agronomes de son temps, réprouve la méthode de la récolte totale, par élimination de la colonie, que les spécialistes de l'époque jugent rétrograde. Rappelons ici les trois techniques de récolte du miel depuis l'antiquité :

- L'étouffage, avec une mèche de soufre (
image ci-dessous), ou la noyade, qui tuait toutes les abeilles (récolte totale)
- Le transvasement, d'une ruche vers une autre (récolte totale)
- Le prélèvement des parts de rayons de cire, sans distinguo du contenu, récolte partielle très couramment pratiquée (voir :
ABEILLE - LE MOYEN-AGE 2 - OCCIDENT 2, APICULTURE : LES RUCHES, image 1)

Virgile, Les Bucoliques, milieu du XVe siècle, Milan, Italie. Etouffage d'une colonie d'abeilles à l'aide d'une mèche de soufre.
Ms. Rawlinson G.98, folio 49v
Bodleian Library, Oxford

Manuscrit enluminé par le Maître des Vitae Imperatorum (actif 1430 - 1450), miniatures qui illustrent le manuscrit du même nom de Suétone (Paris, B. N., ms. it. 131), 1431.

Le père de l'apiculture allemande, Nickel Jacob, signale dans un livre publié en 1568, que les abeilles (ouvrières) peuvent élever une reine à partir d'un oeuf ou d'une très jeune larve, mais la date naissance de l'apiculture moderne, que nous qualifierons de symbolique, est à rattacher à la découverte capitale d'un Espagnol, nous allons voir cela plus loin. La même année paraît le premier traité d'apiculture en Angleterre, le traité de Thomas Hill (ou Hyll) intitulé A Pleasant Instruction on the Parfit Ordering of Bees, imprimé à Londres avec un traité d'agronomie, Certaine husbandry conjectures. Il ne se différencie pas des traités antérieurs, et l'auteur ne cache pas que son travail est le résultat d'une (énième) compilation d'auteurs anciens. Tout y passe, génération spontanée, roi des abeilles, merveillleux gouvernement du roi des abeilles, etc. et nous ne pouvons nous étendre ici sur les détails banals et pratique d'apiculture donnés dans cet ouvrage comme dans d'autres.
   

 
 Thomas Hill, A Pleasant Instruction on the Parfit Ordering of Bees, page de titre, 1568
 Quebec House, Quebec Square, Westerham, Comté du Kent. Bee-boles (voir ENCYCLOPEDIE UNIVERSELLE DE LA LANGUE FRANCAISE - ABEILLE - RUCHERS 1). Niche pour ruche installée dans un mur de briques. 1550-1600
 Gravure montrant un rucher composé de ruches-troncs empilées deux à deux, et un essaim en formation prêt à être capturé par l'apiculteur, Lyon, 1560.

En 1563, Georgius (ou Georg) Pictorius (ou Jörg Maler ou Maaler, vers1500-69), allemand de Baden, médecin de la cour de l'archiduc de Ensisheim, publie à Bâle (Basle, Basel, Basilae) le Pantoplion*... quadrupedium, avium, piscium, dont fait partie son poème De Apibus, cira, melle, discuté par Armbruster en 1943.

* Pantopolium : cité par exemple par Plaute dans son Pseudolus. Supermarché, grand bazar dans une maison (domus) : "Ampla rerum venalium domus" (Carlo Egger. S.L. 103), amplissimae aedes mercatoriae (Eg. L.D.I. 105).

En 1570, Heresbach Conrad (Heresbachus Conradus, 1496-1576) écrit Rei rusticae libri quatuor (Cologne), traduit en anglais la même année, par Foure bookes of husbandrie (= agriculture, Londres, John Wight). Il reprend des écrits antiques, en l'occurrence Palladius, Varron et Caton, et les adapte aux besoins des apiculteurs d'Europe du Nord.


En
1586, Luis Méndez de Torres écrit le premier livre sur l'apiculture en castillan, Tractado breue de la cultiuaciò y cura de las colmenas, Juan Íñiguez de Lequerica (tractado breve de la cultivacion y cura des las colmenas : Bref traité de la culture et du soin des ruches). Dans cet ouvrage, il affirme qu'il a observé les abeilles de ses propres yeux, et qu'il a vu que le roi des abeilles est en réalité une reine, qu'il existe une grande diversité de comportements, de tailles et de couleurs parmi elles. L'Espagnol ne découvre pas seulement le sexe de la Reine. Il avance que la Reine (maessa ou maestra) pond des oeufs et produit les trois genres (generos) d'abeilles, les reines, les faux-bourdons (zanganos) et les ouvrières (avejas). Il fait cependant un pas de trop en affirmant qu'elle accomplit tout cela sans l'aide du mâle. En cela et en d'autres choses, il se contentera de suivre, faute de mieux, les Anciens.

 
Luis Méndez de Torres, traité d'Apiculture.
Apiculteur visitant son rucher, fait de ruches-tronc à chapeaux (ou à couvercles) en chêne-liège. L'homme tient un bâton avec lequel il fait du bruit, peut-être, pour attirer l'attention des abeilles, attirer un essaim.
 
Gravure sur bois, 1586


 On ne peut pas dire que la découverte de Torres se soit répandue comme une traînée de poudre. Jusqu'au XVIIe siècle, on trouve dans différents ouvrages d'apiculture les bonnes vieilles recettes de génération spontanée d'abeilles, comme celle d'un livre anglais : "tuez un boeuf, enfermez le cadavre 45 jours dans une pièce hermétiquement close, et soyez assurés de la naissance d'une infinité d'abeilles."
(voir bougonie : abeilles : croyances et savoirs dans l'antiquité grecque et romaine et aussi le chapitre suivant : CIVILISATIONS)

En 1597, Theodore-Auger (Theodoric, Theodorus Theodorum) Cluyts (Cluyt, Clutium, Clutius, vers 1546 - 1598)* confirme les dires de L. M. de Torres, en vérifiant la présence des ovaires et de l'oviducte dans le corps des reines, sans apporter grand chose de plus aux croyances antiques. Son livre, Van de Byen, haer wonderliche oorsprong, natur, eygenschap, etc. (édité par J.C. van Dorp), est présenté sous forme de dialogue avec Carolus Clusius (Charles de l'Escluse), le premier Préfet du jardin botanique (hortus) de l'Université de Leiden (Leyden, Pays-Bas), avec qui il planta les premières tulipes connues de Hollande.

* CLUYTS : On parle de lui parfois, étrangement, sous des prénoms différents : Dirk Outgaertszoon Cluyts, Outgers, Outgaertsz Cluyts (?).

 
 
MENTALITÉS
 

   

Pieter Bruegel (Brueghel, Breughel), dit Brueghel l'Ancien.
Die Bienenzüchter : Les Apiculteurs, 1568/1569.
Dessin à la plume, 30,9 cm x 20,3 cm. Berlin, Kupferstichkabinett.
Une des rares iconographies de l'époque illustrant les vêtements de protection d'un apiculteur.
(voir aussi ABEILLE - LE MOYEN-AGE 2 - OCCIDENT 2, APICULTURE : LES RUCHES).

Pour Jetske Sybesma, le contenu de cette oeuvre est énigmatique et doit être examiné dans le contexte politico-religieux des Pays-Bas espagnols de la fin des années 1560. Il semble adressé aux groupes antagonistes de l'Inquisition et des Protestants. Bien que l'artiste semble avoir été un catholique sincère, accomplissant les obligations exigées par l'Église romaine, il pourrait exprimer là une condamnation voilée aux oeuvres de l'Inquisition, et, peut-être même, plus négativement encore, une adhésion au Protestantisme, thème exploré par
Rodolfo Millau Illena de l' Université de Paris, dans son article DEUX MORALITES DE PIETER BREUGEL L'ANCIEN A L'ÉPOQUE DE LA MONTÉE DU CALVINISME AUX PAYS-BAS (revue Persée, Année 1980, Volume 11, Numéro 11-2 pp. 188-201 :

     
    "Ni le tableau de Pieter Breugel l'Ancien dit «Le Dénicheur» ni son dessin dit «Les Apiculteurs» ne doivent leur nom à leur auteur mais à la fantaisie des spécialistes qui avaient pris l'habitude de les traiter en marge des méthodes philologiques. Faute de temps nous retiendrons seulement ceux de nos prédécesseurs et celles de leurs thèses susceptibles d'aider à la manifestation de la vérité. (...)
     
    En 1902 M. Rooses (1) et en 1905. A.L.Romdhal ne voient dans le dessin qu'une scène d'apiculture.
    En 1907 Hulin de Loo dit que le proverbe qui se trouve écrit dans le dessin explique le sens du tableau : «qui Voit le nid le Voit qui le Vole l'a». [proverbe flamand qui dit : "dije den nest weet dije weeten, dijen rooft dije heeten" : Celui qui voit le nid a la connaissance, mais celui qui le prend en a la possession. NDE]
    En 1926 L. Armbruster (2) décrit avec réserves le dessin comme étant, peut- être, la représentation d'une scène de capture d'essaim.
    (...)
    En 1938 L. Armbruster (4) se ravise et dit que le dessin aurait pu représenter une scène de transhumance apicole si l'endroit avait été aménagé pour, mais que des détails techniques tels que la forme de la toile à bâillonner les ruches, entre autres, ne correspondant pas à ceux de la réalité, il fallait admettre soit que Breugel avait oublié ces détails, soit qu'il avait voulu représenter quelque chose d'autre qu'une simple scène d'apiculture.
    (...)
    En 1939 L. Armbruster (6) analysant le texte de N. Jacob montre que le mot «Nest» est attesté en 1568 dans le langage des apiculteurs pour nommer le «Brutnest», le nid à couvain qui désigne l'espace situé au milieu de la ruche occupé par les oeufs, les larves et les nymphes.
    (...)
    En 1949 K. Bostrôm (9) après avoir effleuré bon nombre d'hypothèses, conclut que dans le dessin aussi bien que dans le tableau il s'agit de la représentation de principes éternels : «L'activité et la passivité, le courage et la lâcheté, l'habileté et la sottise... La pensée qui se trouve exprimée dans le tableau, -ajoute t'il- est sans lieu ni temps, un problème sans solution, une question sans réponse : pourquoi le bon est-il sot et pourquoi le mauvais est-il malin ? ».
    (...)
    En 1957 C. Kreuzberg (10) s'appuyant essentiellement sur l'ouvrage de Clutius, «Van de Byen» et celui de P. Lindemans sur l'histoire de l'agriculture belge, revient à l'hypothèse de la transhumance abandonnée par L. Armbruster en 1938 sans s'attaquer aux objections de celui-ci. Il rapporte néanmoins que P. Lindemans est persuadé que le texte figurant sur le dessin est un dicton d'apiculteurs, compte tenu de la manière dont ceux-ci se volaient les essaims tout en se donnant l'air de respecter la loi. Pour Kreuzberg comme pour Bostrôm le point central de l'histoire que raconte le dessin, se trouve entre les personnages qui se tournent mutuellement le dos : «l'un actif, a fini avec sa corbeille et monte sur l'arbre pour le nettoyer, l'autre passif, ne s'occupe plus de ses abeilles et les laisse enfermées par terre plutôt que de remettre la corbeille à sa place». Mais ils diffèrent dans le sens à donner à cette opposition. Pour Kreuzberg, Breugel aurait ajouté le Motto à cette histoire pour élever le niveau de conscience de ses concitoyens dans le cadre du soulèvement bourgeois-national «contre la tyrannie espagnole» en les avertissant ainsi qu'il ne suffisait pas d'avoir des idéaux mais qu'il fallait aussi agir d'après eux.
     


    "Pour ce qui est du dessin dit «Les Apiculteurs» nous commencerons pour établir sa date à 1569 tenant compte de l'état de la marge du dessin et de la manière dont Breugel a écrit la date dans son dessin dit «La chute du magicien» (III). Le masque des personnages semble fait en «Salix» et en forme de toile d'araignée. Le rapport quantitatif entre le nombre de mailles et la surface du masque aurait permis d'entrevoir leur visage si l'objet représenté était en fil métallique comme l'a prétendu Hulin de Loo. Les plus archaïques des vanneries connues appartiennent au type spiral qui se trame exactement comme Pline (Livre XI ch.28) dit que l'araignée ourde sa toile. Dans le même chapitre Pline nous dit que les araignées sont «les ennemies les plus acharnées des abeilles». Or l'araignée dans le monde gréco-latin était le symbole du légiste et sa toile celui de la loi. C'est du moins ce que nous trouvons dans Diogène Laerte, Plutarque, Solon et Valerius Maximus, et que nous retrouvons dans les emblèmes de la Renaissance (15) avec le triomphe du droit romain sur le droit coutumier qui marque le retour des rapports de production esclavagistes mais portés à un niveau supérieur."

15A 15B15C

"Le dicton le plus courant était «Juriste ennemi du Christ» (16) et il fut utilisé aussi bien par les réformateurs que par les contre-réformateurs tout comme les juristes de droit romain qui étaient tombés d'accord pour faire respecter en Allemagne le «Cujus regio, ejus religio», principe dont les calvinistes voulaient l'application dans les Pays-Bas. Quant aux abeilles qui depuis l'empire égyptien et à travers Aristote, Pline et Virgile avaient servi de modèle aux sociétés esclavagistes, nous constatons leur retour en tant que tel, déjà au IVème siècle, aussi bien du côté des empereurs que des papes. Mais c'est à l'occasion des schismes et des conflits pour le pouvoir temporel que la surenchère apicole se fit le plus âpre, comme nous pouvons le voir dans le chapitre V de «Bonum universale de apibus» du Cantipratensis (17) écrit pour défendre la «théorie- des deux glaives», qui passe sous silence l'essaimage et qui, ayant rendu service à Innocent IV contre Friedrich II Hohenstaufen au premier concile de Lyon, fut réédité à l'occasion du 5°concile de Latran par Léon X.

C'est pourquoi nous trouvons des abeilles autour de la tête de Tetzel dans les tracts anonymes des premières années de luthéranisme. Mais Luther devenant «le pape de Wittenberg», ruches et abeilles recommencèrent à faire leur parution dans l'iconographie luthérienne (18 ) mais surtout dans la langue de Luther qui passe pour être le premier en 1527 à s'être servi du mot «Schwermer» pour nommer. un schismatique."

18A 18B18C

18D18E

"Avant lui, seuls les essaims d'abeilles («Schwarm») essaimaient («schwaermen»), après lui l'essaimage qui avait été décrit par Pétrarque comme «une véritable guerre civile» devenait un schisme dont l'acteur était appelé «Schwermer». C'est ce que Cocleus lui reproche d'être lui-même dans son pamphlet illustré par Brosamer où les abeilles soulignent le sens premier de scission et sécession. Le concile de Trente qui commença alors que Breugel avait environ 20 ans, se clôtura en 1563 après avoir décidé d'une tactique tendant à priver les protestants de leurs points d'appui polémiques (IV).

IV

C'est à partir de cette époque que l'on commence à voir paraître des ruches à côté de Saint Ambroise et de Saint Bernard de Clairvauxt tous deux promus patrons des apiculteurs. C'est sur ce fond que paraît le célèbre libelle de Philippe de Marnix* : La ruche de la Saint Église Catholique au début de l'année 1569. Anonyme, sans lieu ni date et sans nom d'imprimeur. Les humanistes du pays savaient cependant que le grand Plantin y était pour quelque chose, lui qui sortait en même temps le premier volume de la «Biblia Regia Poliglota» pour le compte de Felipe II et dont le nom était à lui tout seul une devise. Groot Weegbree évoquant irrésistiblement la parabole de la voie royale et du sentier difficile (Mt.VII,14) comme le confirme la gravure d'auteur inconnu publiée vraisemblablement cette même année par Cock (19) et l'ayant pour sujet.

(...)

    Marnix traite les contre-réformateurs de singes des réformateurs, fait des jeux de mots cuistres sur les sortes de clergé qui poussent à l'intérieur de la ruche (o.c.ch.III) et tout comme Calvin (24) se réclame du Clarivallensis, il finit son pamphlet par une citation de Saint Ambroise : «Vera theolôgia piscatoria est, non inquisitôria». Ainsi Breugel le représente anonyme, grimpant sur un «populus» et regardant (weeten > witan) de haut la ruche comme s'il attendait l'essaimage. Sa culotte glisse évoquant (v) ainsi l'emblème d'Aneau (o.c.p.81) «PLUS LE FOL EN HAULT ESTAT MONTE TANT PLUS MANIFESTE SA HONTE».
    26A 26B

    Or la majorité des abbés catholiques des Pays Bas s'étaient révoltés avec l'appui des protestants parce qu'à la suite des canons du concile de Trente, l'église voulait abolir leurs privilèges. Ces mêmes privilèges que de Marnix persifflait dans son libelle.
     
    Les personnages masqués sont habillés à la manière des prédicateurs itinérants, «pourchasseurs d'idoles», «coureurs de putes», tels qu'ils avaient déjà été représentés par Mürner (25) et Hopfer, mais masqués derrière la loi du droit romain et adonnés à la besogne «piscatoria» de voler les ruches.
    25A25B
     
    Il y en a même un, qui a laissé par terre sa ruche bâillonnée et qui s'en va d'un air taciturne. Breugel n'ignorait pas pour qui les abeilles travaillent, comme le montre son dessin «Avril, Mai, Juin», de 1565 pas plus qu'il n'ignorait rien de l'appropriation privée du travail collectif, dite très explicitement dans le premier quatrain de l'emblème d'Aneau (26) sur les abeilles.
    26C26D

    Il n'a rien voulu dire d'autre que ce qu'il a dit, mais ce n'est pas en commençant par priver une sentence de son contexte que l'on peut saisir le sens de son texte. De Marnix s'était tenu à l'écart de Wilhelm après la mort de son frère, c'est pourquoi les deux personnages se tournent le dos dans le dessin. Le dessin a dû être fait au printemps; en été, Breugel a dû apprendre que ces personnages ne se tournaient plus le dos; au début de l'automne et peu avant de mourir, il donnera l'ordre à sa femme de détruire celles de ses œuvres où des personnages proverbiaux compromettants auraient pu être trop facilement reconnus."


    extraits de :
    http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rhren_0181-6799_1980_num_11_2_1184?_Prescripts_Search_tabs1=standard&#
     


    "NOTES :
     

    1 — Max ROOES : «De Teckeningen der Vlaamsche Mesters» — in Onze Kunsi I, 1. p. 102.
    Antwerpen 1902 Alex Ludwig ROMDAHL : «Pieter Bruegel der Altère und sein Kunstschaf- " ' fen» — in Jahrbuch der KunstBistorische Sammlungen desA.K. XXV, p. 131 — Wien 1905.
    René van BASTELAER et D. HULIN DE LOO i Pierre Bruegel l'Ancien, son œuvre et son temps, p. 277 - Bruxelles 1907.
    2 — Ludwig ARMBRUSTER : Per Bienenstand als vôlkerkundliches Denkmal. Neumustern 1926.
    4 - L. ARMBRUSTER : «Alte Graphik und Imkerei» - in Arcbiv fur Bienenkunde vol. 19 -
    n 6.7 -Berlin 1938.
    6 — L. ARMBRUSTER : «Die deutsche Imkersprache des ausgehendes Mittelalters» —Archivfur
    Bienenkunde Heft 7-8, p. 288 - Berlin 1939. Nikel JACOB : Grûndlicher und nûtzlicher Unterricht von Bienen und ihrer Wartung — Gôrlitz 1568.
    9- Kjell BOSTROM : «Das Sprichwort vom Vogelnest» - in Konsthistorisk Tidskrift XVIII,
    Stockholm 1949.
    10 — Claus KREUZBERG : Die «Imker» Pieter Bruegels des Alteren — Deutshes Jahrbuch fur
    Voikskunde 8, pp 98 à 121 Berlin - DDR 1962."
     


    NOTES, suite, révisées et complétées :
     

     
    III) La chute du magicien Hermogène, 1544, gravure de Pieter (Pierre) Van des Heyden, d'après le dessin de Brueghel. Amsterdam, Reijksmuseum, Prentenkabinett, (222 x 292 mm).
     
    "Jacques, fils de Zébédée et de Marie-Salomé, frère de Jean l’Evangéliste est un des 12 apôtres du Christ.
    Il aurait prêché dans l’ouest de l’Espagne. Mais déçu par le peu de succès de son entreprise, il regagne la Judée.
    Là, un prêtre juif, Abiathar, fait appel au magicien Hermogène pour détourner Jacques de sa foi. Hermogène fait alors intervenir un grand nombre de démons. Mais ceux-ci, subjugués par l’apôtre, se retournent contre le magicien.`
    Saint Jacques délivre Hermogène et le convertit. Pour le préserver des puissances des démons, Jacques lui donne son bâton. Pour lui prouver ses bonnes intentions, le magicien apporte à Saint Jacques ses livres de magie qui sont jetées à l’eau ce qui, apparemment ne plaît pas au grand prêtre Abiathar qui avait fait appel à ses services. Il livre Jacques à Hérode. Jacques est décapité en 43."

    extrait de : http://www.onelittleangel.com/sagesse/citations/st_jacques.asp


    15)
    - image 15 A. Bienen und spinne, abeille et araignée, planche du Buch der natürlichen Weisheit, Augsburg 1490, Ulrich von Pottenstein (vers 1360-1417), chanoine de la cathédrale de Vienne. Son texte est une traduction allemande du Speculum sapientiae, recueil de fables, en part. Esope, attribuée au pseudo-Cyrillus (évêque saint Cyrille) mais qui serait plutôt l'oeuvre de Bongiovanni (Bonjohannes) da Messina.
    Bayerische Staatsbibliothek (Bibliothèque de l'Etat de Bavière), folio 19.
     
    - image 15 B. Claude PARADIN, Devises Héroïques, Lyon 1557.
    Planche lex exlex
     
    - image 15 C. Justinus Gobler, (Justin, Johannes, vers 1504-1567) Der Rechten Spiegel, illustré par Hans Sebald Beham ( Nürnberg, 1500 - Francfort-sur-le-Main), 1550], Frankfurt 1534 et 1542.
     
    16) R. STINTZING : Das Sprùchwort : Juristen bose Christen, in seinen gescbichtlicben Bedeu-
    tungen. Bonn 1875.
     
    17) Thomas van Cantiprat : Thomas de Cantimpré, voir : ABEILLE - LE MOYEN-AGE - OCCIDENT 4 - LES ENCYCLOPEDIES
    18)
     
    image 18 A. Caricature protestante anonyme contre Hans Dietz, dit Johann Tetzel, John Tetzel (Pirna, 1465 - Leipzig, 11.08.1519), inquisiteur dominicain, chargé par Albert de Brandebourg de publier les indulgences.
     
    image 18 B. Pamphlet de Johann Cochleus (Cochlaeus, Cochläus, Cocleus, 1479-10.1.1552), Septiceps Lutherus… (en latin) Sieben köpffe Martini Luthers... (en allemand) : Les sept têtes de Luther..., paru en 1529 en édition bilingue chez Valentin Schumann, à Leipzig. L'ouvrage contient en page-titre une gravure de Hans Brosamer (1500-1552), copiée dans d'autres éditions ultérieures, dont celle qui est présentée ici, de 1564 (Pitts Theology Library, Atlanta, Etats-Unis). Comme Thomas More ou Lucas Cranach, Cochleus reprend la symbolique de l'animal monstrueux à sept têtes de l'Apocalypse, de gauche à droite, têtes de : docteur , moine ([Martin]us (ironie avec St Martin ?), turc ([luther]us, sous-entendu : infidèle), Ecclesiastes (sous entendu : prédicateur qui dit ce que le peuple veut entendre), fanatique (avec des abeilles autour de la tête, symbolisant la rage furieuse des Réformateurs), inspecteur (des études : visitator, pour changer les lois, se prétendre nouveau pape), homme sauvage muni d'une massue, image liée au personnage de Barabbas, voleur grâcié par Pilate.
     
    "Cochleus J. : Glos und Comment auff den rechtem Messenhalten wider Lutherische Zwispaltung 1523, sans lieu. Doctor Jo. Cocleus : sieben Kôpfe Martini Luthers von hochwirdigen Sacrament des Altars. Leipzig 1529"
     
    image 18 C. Daniel Hopfer, graveur allemand (vers 1470, Kaufbeuren – 1536, Augsburg), Der groß paülüs ; Saint Paul assis dans une chaise et prêchant, 19.2 x 15.7 cm, Achenbach Foundation for Graphic Arts, Fine Arts Museums of San Francisco, USA.
    image 18 D. Détail de la précédente, avec des ruches en vannerie, posées à gauche.
     
    image 18 E. Erhard Schön (Schoen, graveur allemand, Nuremberg 1491-1592), planche appelée Douze oiseaux purs et impurs, vers 1534, sur un poème de Hans Sachs (Nuremberg 1494 - 1576), "Der zwoelff reinen Voegel Eigenschaft zu den ein Christ ver- gleicht wird." La liste des oiseaux est tirée de la Bible, naturellement, et l'abeille est cataloguée avec les oiseaux, comme elle l'était depuis longtemps déjà.
     
    IV) Johann (Johannes) Leisentrit (1527, Olmütz - 24. nov. 1586, Bautzen)
    Geistliche Lieder und Psalmen der Alten Apostolischer recht und warglaubiger Christlicher Kirchen, édité chez Hans Wolrab, Bautzen, 1567, folio 241 v. On aperçoit deux ruches-troncs faisant partie d'un rucher protégé par un enclos de plessis.
     
    * Philippe de Marnix de Saint-Aldegonde (1450-1598).
    "Chose assurément remarquable dans l'histoire littéraire, c'est dans les années les plus sanglantes de la terreur catholique, ail moment où le duc d'Albe déchirait avec le plus de fureur les entrailles des Pays-Bas, c'est en 1569 et en 1571 qu'Aldegonde compose et publie
    en flamand sa gigantesque satire de l'église catholique, la Ruche romaine*, créant ainsi la langue hollandaise au milieu d'un rire tragique et héroïque. Cet ouvrage fut un des plus grands triomphes de la parole au seizième siècle sur la force déchaînée. «Il fut reçu du peuple, dit Bayle, avec un applaudissement incroyable.» Rien de pareil ne s'était vu depuis les colloques d'Érasme. On reconnut un frère de Rabelais et d'Ulrich
    de Hutten. Le livre de Marnix fut pour les réformés dans le nord plus puissant même que les ouvrages de Calvin. C'était Gargantua ou Grandgousier s'épanouissant du haut des échafauds dans une kermesse flamande. On crut entendre le ricanement de toutes les têtes de morts qu'avait tranchées le duc d'Albe. En même temps, l'Eglise du moyen âge semblait s'abîmer sous cette huée immense, colossale, monstrueuse, dont aucun écrivain n'égalera jamais la témérité. Par un raffinement d'audace et d'ironie. Marnix avait dédié son livre effroyable à l'un des chefs de l'inquisition, l'évêque Sonnius* ; en voici le début, traduit par Marnix lui-même en français plus de vingt ans avant la Ménippée:

    «La ruche en laquelle nos mouches se logent, s'assemblent et font leur ouvrage, se fait de souples et fortes claies et osiers de Louvain, de Paris ou de Cologne, bien subtilement entrelacées; on les nomme communément à Louvain sophismes; on les trouve à vendre chez les corbeillers de l'Eglise romaine, comme chez Jean Scot, Thomas d'Aquin, Albert le Grand et autres semblables maîtres qui ont été fort subtils en cet art. Or, pour la plus grande sûreté, il faut encore lier ces claies et les joindre ensemble avec de gros câblesou cabale judaïques ou thalmudiques, et y tirer dessus de bon ciment bien composé de vieilles ruines, dont les vieux et caducs conciles ont été maçonnés, brisé et estampé. bien menu, et mêlé avec de la paille coupée que les apothicaires nomment palea decretorum, l'arrosant à chaque fois de l'écume ou bave des anciens docteurs, et y mêlant aussi quelque peu de chaux fraîche de Trente. Tout cela, bien broyé ensemble, se mêle avec du sablon tiré des puits creusés de l'humaine superstition, ou bien de ce sable dont les anciens hérétiques enfilaient leurs cordons; tu peux aussi ajouter un peu de ce limon glueux, ou bitume des Indes, qui est une matière fort lente et tillasse, dont jadis la ville et la tour de Babel fut cimentée, et se tire hors du lac de Sodome et Gomorrhe... car cela est plaisant à l'oeil, et est cause que les mouches y logent et conversent plus volontiers.»"
     
    * LA RUCHE : "De Byenkorf". Les principales éditions sont de 1572, 1597, 1599, 1600, 1638, 1647, 1664, 1733,
    1761. Cet ouvrage a été traduit en latin, en français, en anglais et en allemand. Apiarium sive Alvearium
    Romanum
    .
    * SONNIUS : Vigli. Epistolæ, politicæ et historicæ ad Hopperum, 1661.

    Extraits d'un texte d'Edgard Quinet (1803-1875) de 1854, extrait de :
    http://classiques.uqac.ca/classiques/quinet_edgar/marnix/Quinet_marnix.pdf

    19 n° 87 dans le catalogue, «Hieronymus Cock prentenuitgever en graveur» Bruxelles 1970
    (Anvers 1507-1570)
     
    24 Calvin. Institution (1541) notamment les chapitres intitulés : «La volonté esclave» et «nécessité et contrainte».
     
    image 25A . Thomas Mürner (24 décembre 1475 - 1537, Oberehnheim (Obernai)), Von dem großen Lutherischen Narren (Du grand fou luthérien), 1522 .
    Der xij. buntgnoß (XII Bundgenosse) : "les compères", S. 152.
    Remarquez que le voleur de ruche porte le corps d'une ruche sur l'épaule et, dans sa main gauche, une hausse qui paraît pleine de miel.
     
    image 25B. Daniel Hopfer - illustration de l'évangile de Matthieu, chapitre XV, la parabole des aveugles. Remarquez le voleur de ruche, dans le coin en bas à droite.
    Cette image fait partie d'un ensemble (29.6 x 40.3 cm) de six illustrations d'épisodes du Nouveau Testament : Matthieu X, Luc X; Matthieu XV, I Corinthiens X, II Colossiens, I Timothée IV. Conservation : voir image 18c.
     
    26. Aneau (o.c. p. 131).
     
    images 26. Barthélemy Aneau (Anneau, Annulus, 1510 - 1561) : "Toutes les emblèmes de nouveau translates en françoys…", Lyon, G. Roville, 1549, dans l'édition de 1552, à Lyon, chez Guillaume Rouillé et Macé Bonhomme, gravures de Pierre Eskrich (Eskreich, graveur helvetico-lyonnais surnommé Cruche ou Vase (vers 1550-1580). P. 131, exemplaire conservé à la Glasgow University Library, SM97.
    Le livre est une traduction française de l'ouvrage de l'Italien André Alciat (Andrea Alciato, dit Alciati, 8 mai 1492 – 1550, Pavie), Emblemata (Emblematum libellus), édité d'abord en 1531 et en 1534 chez l'imprimeur Christian Wechel.
     
    image 26A. "Plus le fol en hault estat monte : tant plus manifeste sa honte", page 81 :
     
    "Le singe assis en geste, & contenance,
    D’homme rassis a forme, en convenance.
    Mais plus s’eleve, & se monstre en appert:
    Plus Singe il est: & plus le cul luy pert.
    Tels sont les gens brutaux, d’homme masquez,
    Plus es honneurs sont haux, plus sont mocquez.
    Car l’homme sot, montant ou il ne doibt:
    Plus hault est mis: & plus beste on le veoit."
     
    extrait de :
    http://www.emblems.arts.gla.ac.uk/french/emblem.php?id=FANb049
     
    image 26B : détail de la précédente.
     
    image 26C "Nez sommes nous : et non pour nous.", emblème des abeilles (aveilles), p 131 :
     
    "Le possesseur d’un champ: & d’un jardin le Sire
    Emporte dens un plat, & le miel, & la cire
    Des Rusches, & paniers. Et ce privé robeur
    Ravit en peu de temps le fruyct, d’un grand labeur.
    Le miel est faict pour l’homme, & la cire odorante
    Pour rendre à Dieu honneur, en clarté adorante.
    Mais l’homme tout ravit des Rusches, & corbeilles.
    Ainsi vous, non pour vous, faictes le miel Aveilles.
    Non pour soy, mais pour tous: & pour son Seigneur mesme
    Le Povre Laboureur les champs laboure, & seme.
    Maissonne les Fromens, & mange Orges & Seigles.
    Ainsi vous, non pour vous, faictes le miel Aveilles.
    Non pour soy, mais pour tous, mesmement pour son maistre
    Le Jardinier, bons fruictz sur les arbres faict croistre.
    D’ont ne luy reste rien, que les branches, & fueilles.
    Ainsi vous, non pour vous faictes le miel Aveilles.
    Non pour soy, mais pour tous, le gentil Pastoureau
    Paist Brebis, & Mouton, Chievre, Vache ou Toreau
    D’ond il n’a que le laict des Vaches, des öeilles.
    Ainsi vous, non pour vous faictes le miel Aveilles.
    Non pour soy, mais pour Roy, le souldard faict effroy.
    Et s’il meurt c’est pour soy: s’il vinct c’est pour le Roy.
    Et n’en peut rien monstrer, que cicatrices vieilles.
    Ainsi vous, non pour vous, faictes le miel Aveilles.
    Non pour soy, mais pour tous l’Advocat a la voix
    Et a estudié Ordonnances & Loix.
    Non pour soy, mais pour toy: qui vers luy te conseilles.
    Ainsi vous, non pour vous faictes le miel Aveilles.
    Non pour eux, mais pour ceux, qui se sentent malades,
    Ordonnent Medecins des Recipez bien fades.
    Eux ilz ne prennent rien, que jus de vigne, ou treilles.
    Ainsi vous, non pour vous, faictes le miel Aveilles.
    Non pour eux, mais pour tous: les Poëtes font vers.
    Composans & chantans des arguments divers.
    Desquelz n’ont autre fruyct, que le vent aux oreilles.
    Ainsi vous, non pour vous, faictes le miel Aveilles.
    Non pour eux, mais pour tous, les gens savans escrivent.
    Tant pour ceux qui viendront: que les presens, qui vivent.
    Et n’ont que le travail d’escrire grandz merveilles.
    Ainsi vous, non pour vous, faictes le miel Aveilles.
    Non pour luy, mais pour tous ceux qui en ont mestier,
    Travaille l’Artisan, chescun en son mestier,
    Et non que pour servir autruy festes, & veilles.
    Ainsi vous, non pour vous, faictes le miel Aveilles.
    Somme le fruyct ne vient, la grace, ne l’honneur
    Moins qu’à ceux qui en ont pris la peine, & labeur.
    Mais de faire plaisir à l’homme, tant l’homme aime:
    Qu’en ce monde mortel nul ne vit pour soy mesme."

    extrait de :
    http://www.emblems.arts.gla.ac.uk/french/emblem.php?id=FANb062

    image 26D : détail de la précédente.


 


En 1593, paraît le manuel d'Edmund Southerne, A Treatise Concerning the Right Use and Ordering. of Bees... (Londres : Thomas Orwin for Thomas Woodcocke). Très moraliste, l'auteur raconte deux histoires dans lequelles un curé donne des ruches à un de ses pauvres paroissiens, à qui le révérend demande en retour une partie de ses abeilles et du miel, principe de la dîme, mais le paroissien cherchera plusieurs moyens de ne pas obtempérer, l'affaire se portant ensuite en justice. Southerne parle des hausses, appelées en anglais eke (de eke out : "accroître ses ressources"), cap (hausse ronde par-dessus la ruche) ou encore nadir (quand la hausse se place dessous le panier). Ce serait à partir de cet ouvrage, nous dit Eva Crane*, que la tradition des hausses aurait commencé, ainsi que par les recommandations de Malynes en 1622 (Gerard de, 1586 – 1641, dans Lex Mercatoria).

*The Word history of Beekeeping and Honey Hunting (1999), une somme sur la question écrite par la grande spécialiste de l'histoire et l'archéologie de l'apiculture.

Il est amusant de noter que Shakespeare, en écrivant son Henri V en 1599, aurait pu écrire le passage ci-après au temps d'Aristote. Il est intéressant de noter, aussi, qu'il ne connaît pas encore les dernières nouvelles qui vont révolutionner l'apiculture :
 
"CANTORBERY. Cela est vrai : aussi le ciel a divisé l'économie de l'homme en fonctions diverses; toutes ses parties, dans un effort continuel, tendent à un but. commun, l'obéissance : ainsi travaillent les abeilles, créatures qui, servant d'exemple dans la nature, enseignent l'art de l'ordre à un royaume peuplé. Elles ont un roi et des officiers de différente espèce : les uns, magistrats, punissent à l'intérieur; d'autres, comme les commercants, se hasardent au loin; d'autres, comme les soldats, armés de leurs dards, butinent sur les boutons veloutés du printemps, et, chargés de leurs larcins, reviennent d'un pas joyeux à la tente de leur empereur. Lui, dans son active majesté, surveille les macons bourdonnants qui construisent les lambris d'or, les citoyens qui pétrissent le miel, le peuple d'artisans qui arrivent en foule, et déposent à la porte étroite de l'Etat leurs précieux fardeaux; et la justice, à l'oeil sévère, au chant maussade, livre aux pâles exécuteurs les paresseux qui bâillent mollement."

William Shakespeare (1564 - 1616), Henri V, acte I, scène II, 183-204, traduction François Guizot, Paris 1862-1864

sources : Voir XVIIe siècle.
 
 
 
le bigre
 
 
 

- http://www.mcah.columbia.edu/dbcourses/item.cgi?template=submagnifylg&id=10310&table=items (hermogène)
- http://mdz10.bib-bvb.de/~db/0002/bsb00025657/images/index.html?seite=19 (cyrillus)
- http://www.emblems.arts.gla.ac.uk/french/emblem.php?id=FPAb080 (paradin)
- http://tbn0.google.com/hosted/images/c?q=e87fa8b9ca76cd22_landing (tetzel)
- http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rhren_0181-6799_1980_num_11_2_1184?_Prescripts_Search_tabs1=standard&# (schön)
- http://images.zeno.org/Literatur/I/big/murn152a.jpg (mürner)
- http://www.emblems.arts.gla.ac.uk/french/images/facsimile/sm97_i2r.jpg (aneau)
 

 

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