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- BEATUS DE FACUNDUS
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- BEATUS DE FERNANDO Y DOÑA
SANCHA
- Ms : Vitrina (Vit.) 14-2
- A : Madrid, Biblioteca Nacional
- S : Monastère de León
D : 1047
- T : 36 x 26,8
- C / 312
- NE : 114, 9 en double-page
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- Détail du folio 186v,
la femme et le dragon, Apocalypse 12 : 1-4
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- Ce manuscrit a été exécuté
par un certain Facundus (Facundo) pour le roi de Castille et
Léon Fernando Ie (Ferdinand Ie, Castille 1035-1065, León
1037-1065) et son épouse, la reine doña* Sancha. Ces
princes conservèrent le livre dans leur propre bibliothèque
jusqu'à leur mort. Il finit par être recueilli par
la collégiale de Saint-Isidore de Leon (Colegiata de
San Isidoro de León), où on le sait en 1572,
découvert à cette date par Ambrosio de Morales
(Córdoba, 1513 - 1591), chroniqueur, historien, archéologue
de Felipe II, qui le confia à Juan Bautista Perez ( +1597),
chanoine et archiviste de la cathédrale de Tolède.
Plus tard, le codex passa dans les mains d'Alvar
Gómez de Castro (Santa Olalla, 1515 - Tolède, 1580),
historien, humaniste, traducteur, éditeur de la première
édition d'isidore de Sévillle et ami de Moralès.
De Castro l'examina avec d'autres Béatus pour éditer
un ouvrage général sur le sujet qui ne se fit jamais.
C'est l'archevêque de Tolède, García de Loaisa
Girón (1534-1599), qui en hérita, léguant
lui-même sa propre bibliothèque au monastère
de San Vicente Ferrer de Plasencia, d'où le secrétaire
de l'évêque de Plasencia, Juan Tamayo de Salazar,
historien, inquisiteur général, l'a sorti comme
nombre de manuscrits, pour le compte de l'évêque
Diego Arce Reinoso (1585-1665). A sa mort, la magnifique bibliothèque
de ce dernier fut mise en vente et fut acquise par Gaspar Ibáñez
de Segovia Peralta y Cárdenas (1628-1708), Marquis de
Mondéjar.
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- Pendant la Guerre de Succession d'Espagne,
qui opposa pour le trône d'Espagne la France et l'Espagne
à une coalition européenne, Felipe V réunit
un ensemble de collections de manuscrits pour la Bibliothèque
Royale, celle qui allait former le fonds initial de la Biblioteca
Nacional d'Espagne à Madrid. Parmi ces collections figurent
en tête les bibliothèques nobiliaires saisies pendant
cette guerre, particulièrement celles qui avaient appartenu
au Marquis de Mondéjar et au Duc d'Uceda.
- Incontestablement de style mozarabe, ce codex
porte les marques des débuts du roman espagnol, parmi
les premiers témoignages en fait de cet art en dehors
de la Catalogne.
* DOÑA
: titre honorifique espagnol,
synonyme de señora (donna, en italien)
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- Ms : Lat. 8828
- A : Paris, Bibliothèque Nationale de France (BNF)
- S : Saint-Sever
D : v. 1060
- T : 36,5 x 28
- C / 290
- NE : 81 (7 feuillets sont manquants)
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- Neuss imaginait voir dans ce manuscrit gascon,
seul Beatus français, une émanation de l'archétype
de Liébana, ce que Williams a réfuté depuis.
Le livre commence par un frontispice sous forme de page tapis
(fol 1r) en dédicace à l'abbé de l'abbaye
de Saint-Sever, dans les Landes, Grégoire de Montaner
(1028-1072), soit GREGORIUS ABBA NOBIL(IS), dont les termes
forment un calligramme qui n'est pas sans rappeler la technique
utilisée par Raban Maur au IXe siècle :
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- Un autre nom nous apparaît sur le folio
6r, dans la dernière colonne, à droite d'un tableau
généalogique. Il nous est livré sous la
forme : "Stephanus Garsia Placid(us) ads (pour :
ad scriptum, ad scriptionis : à l'écriture,
à la rédaction ou à la composition :
- --
- Rien ne nous dit si Stephanus est un copiste,
un enlumineur, ou les deux, mais le choix d'un seul peut nous
conduire à penser qu'il était le directeur du scriptorium,
surtout si différentes mains ont travaillé à
la réalisation de l'ouvrage. Et c'est ce que pensent différents
historiens, tels François Avril, conservateur général
au département des Manuscrits de la BNF, qui voit quatre
artisans différents pour sa confection, ou Yolanta Zaluska,
de l'IRHT, spécialiste d'iconographie biblique, qui a
montré que les différentes écritures décelables
vont de pair avec les différents cahiers
qui forment le manuscrit et qu'ont dû se répartir
les différents acteurs. Pour Jean Vezin, spécialiste
de paléographie et de codicologie, à peu près
les deux tiers des folios ont été écrits
par un copiste aux traditions wisigothiques, une trentaine d'autres
pages ayant été transcrites par un second scribe,
et le reste par plusieurs autres copistes qui utilisèrent
la minuscule caroline.
- Cet exemplaire du Beatus a probablement été
exécuté à l'abbaye gasconne de Saint-Sever
et, s'il est presque le seul Beatus à ne pas être
espagnol, on ne peut pas dire qu'il ne le soit pas tout à
fait.
- N'oublions pas, en effet, que la Gascogne
des Sanche avait des liens étroits avec l'Espagne, en
particulier la Navarre, d'où était originaire Urraca,
sur du roi de Navarre Sanche le Grand et épouse
de Guillaume Sanche, fondateur de l'abbaye de Saint-Sever en
988. La cité même de Saint-Sever semble avoir été
une ville principale de la dynastie des Sanche, qui occupait
régulièrement un ancien palais, le Palestrion,
devenu palais ducal. Celui-ci figure de manière disproportionnée,
comme l'abbatiale de Saint-Sever, sur la mappemonde qui figure
aux folios 45bis v et 45ter : voir Mappemondes
des Beatus
- D'autre part, il semble que, comme de nombreux
monastères espagnols, celui de Saint-Sever n'ait accepté
la règle bénédictine beaucoup plus tardivement
que ses voisins. Comment expliquer autrement, en effet, que Grégoire
de Montaner réunît en 1065 une assemblée
extraordinaire d'évêques et d'abbés, pendant
laquelle eut lieu une cérémonie de lecture de la
Règle, qui fut ensuite ajoutée au Martyrologe de
l'abbaye. Le patronage même de l'abbaye, dédicacée
au saint Sauveur (dont la forme variera en saint Sever), rappelle
San Salvador de Leyre, le monastère emblématique
de Navarre, panthéon de la famille royale dont la reine
Urraca était issue. Il faut évoquer enfin le réseau
clunisien dont fait partie l'abbé Grégoire, moine
de Cluny, qui a pu tisser des liens privilégiés
avec des monastères clunisiens pyrénéens
tout proches : C'est en effet l'époque où Cluny
a considérablement étendue son influence au Nord
de l'Espagne, qui échappe à la suzeraineté
musulmane. On peut encore ajouter à tout cela les patronymes
de l'abbé Montaner (Mont Anè : du vascon Aznar,
nom espagnol bien connu) et celui du directeur du scriptorium
Garsia (Garcia), qui est une adaptation du castillan du patronyme
vascon Hortza (Hartze, Artza : ours), qui font penser que l'abbaye
de Saint-Sever comptaient même des Espagnols au sein de
la communauté. Il ne paraît pas nécessaire,
donc, comme le fait Yolante Zaluska, d'imaginer une histoire
compliquée où le manuscrit est offert par le duc
de Gascogne en l'honneur de la fondation de l'abbaye puis copié
quelques années après à la demande de l'abbé
Gregorius dans le but de réaliser un Beatus à la
mode du temps. Les liens qu'on devine si puissants entre Saint-Sever
et les abbayes pyrénéennes suffisent pour imaginer
un scénario simple, tel le prêt d'un Beatus modèle,
qui avait une importance capitale dans le cas où le monastère,
avant de se conformer à la règle bénédictine,
observait des coutumes (usages, liturgie, etc...) mozarabes.
L'idée que le livre de l'Apocalypse était un élément
important de la vie de l'abbaye peut se renforcer par l'observation
des sculptures de l'abbatiale, qui fait de nombreuses références
aux prophéties de Jean ou de Daniel, sur son tympan ou
sur différents chapiteaux. Il faut cependant relativiser
ce rapprochement : L'apocalypse est un thème très
fréquent dans l'iconographie romane, en particulier la
sculpture. On compare souvent l'image du Jugement Dernier du
tympan de l'abbaye à celui de l'abbaye de Moissac. Ce
thème, comme d'autres touchant aux prophéties eschatologiques
se rencontrent souvent dans lem midi à la cathédrale
de Maguelonne (Hérault), à Cabestany, à
Saint-Trophime d'Arles, à l'abbatiale Sainte-Foy de Conques,
à Saint Just de Valcabrère. Plus au nord, il ne
faudrait pas oublier cependant l'abbaye de Fleury (Saint-Benoît
sur Loire) dont la tour-porche représente toute entière
la Jérusalem Céleste, soutenue par de nombreux
chapiteaux historiés.
Cela n'empêchera pas
le Beatus de Saint-Sever de se démarquer stylistiquement
de son modèle, quel qu'il soit. Ce n'est pas pour autant
que nous dirons ici à la manière de Klein que ses
auteurs démontrent, par l'iconographie, la référence
aux textes sacrés, des connaissances supérieures
aux artistes espagnols. Ce serait oublier que les manuscrits
espagnols transpirent ici l'art exotique du soufisme, là
celui des chrétiens d'Egypte, les Coptes, ou que la polychromie
de Facundus n'a rien à envier à celle de Stephanus.
- On commence de suivre le cheminement géographique
du Beatus de Saint-Sever à la fin du XVIe siècle,
où il fait partie de la collection Mathurin Brin, prêtre
de Vendée ou de Mayenne, puis des biens de Guillaume Guerry
(Tiffauges, en Vendée). On le trouve ensuite chez le cardinal
François d'Escoubleau de Sourdis (1574-1628), cardinal
en 1598, archevêque de Bordeaux en 1599. A sa mort, c'est
son frère, Charles (1588-1666) qui en hérita. Marquis
de Sourdis et d'Alluye, conseiller d'Etat, maréchal des
camps et armées du Roi, gouverneur d'Orléans, il
fit confectionner la reliure que nous lui connaissons aujourd'hui,
en veau granité, frappé de ses propres armes (armoiries
héraldiques). Le marquis l'avait sauvé une première
fois, d'ailleurs, en l'empruntant juste avant que n'ait lieu
le sac de l'abbaye de Saint-Sever par les troupes protestantes
de Montgomery, en 1569. On perd la trace de notre Beatus jusqu'à
la vente Louis-Jean Gaignat de 1769 (lot n° 93). Il intègre
un peu plus tard la Bibliothèque royale en 1790, puis
Impériale, enfin, Nationale, en 1866, où il demeure.
Notez que, parmi les folios perdus de ce manuscrit (14), seuls
ceux qui représentent la mappemonde reproduite plus haut
seront retrouvés par Armand d'Avezac en 1867 (Une digression
géographique à propos dun beau manusctit
à figures de la Bibliothèque dAltamira. La
mappemonde du XVIIIe siècle de St. Béat de Liébana,
Annales des voyages (juin, Paris, 1870).
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