ENCYCLOPEDIE -DE--LA--LANGUE -FRANCAISE
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ABEILLE

APIDAE
Sous-famille APINAE-
 1--

Les abeilles hautement sociales
 
LA TRIBU DES MELIPONINI ( 3 )

LES MÉLIPONES ou abeilles dans dard

 Schwarziana quadripunctata, pupes à différents stades d'ouvrières et de reines (5 avec tête plus petite et yeux plus étroits) dans les cellules du couvain. 



 Le nid, suite  --

Les abeilles bouchent les fissures avec de la résine pour protéger le nid des intempéries et des prédateurs, et isolent la cavité où est formé le nid d'autres cavités par des plaques épaisses appelées batumen (peut-être du portugais brésilien batume, substrat formé de matières organiques en décomposition, images 3 à 5b). Ces batumen se présentent généralement de deux façons : soit deux couches, l'une scellant le haut du nid et l'autre le bas (images 3, 8), soit une enveloppe entourant le périmètre du nid (4, 5, 5b, 9b). Ils sont faits de cerumen avec une forte proportion de résines, d'où leur couleur très sombre, et parfois, comme chez Melipona, on y trouve de la géopropolis (mélange de propolis et de boue : Wille, 1963), mais aussi des excréments, par exemple chez melipona rufiventris (Nogueira-Neto, 1997). Le batumen inférieur est le plus souvent percé de plusieurs galeries de drainage, d'évacuation, qui permettent à la fois de ventiler le nid et de faire que s'écoule de l'eau qui y a pénétré (images 3, 5 et 6). Les cellules du couvain plutôt au centre du nid, forment un ou plusieurs rayons de cerumen plus ou moins riche en cire (image 14) et en résines selon les espèces (d'où leurs teintes, de miel à brun foncé, image 9), la plupart du temps horizontaux et circulaires, parfois concentriques (très rarement verticaux, comme les deux rayons de la mélipone africaine Dactylurina staudingeri). Dans ce cas, les cellules tendent à être rationalisées, et donc hexagonales, mais pas sur le pourtour du rayon (image 9). Ces rayons sont souvent séparés du reste du nid par l'involucrum (ou involucres : enveloppe, en latin), fait d'une ou plusieurs couches de cerumen et dont on suppose qu'il sert à la thermorégulation du couvain (Moure et al. 1958) et absents chez certaines espèces, comme beaucoup de Trigona ou Cephalotrigona, image 7). Certaines Mélipones construisent des cellules royales (Trigona, par ex.), mais d'autres non (Melipona, par ex.), et ce sont alors des cellules identiques qui accueillent ouvrières, mâles et reines. Chez Melipona, toujours, les castes sont différenciées génétiquement, mais chez d'autres, elles le sont par la nourriture, comme chez les Apini, et construisent comme elles des cellules royales, généralement au bord des rayons.
 
Près du couvain ou, au contraire, à l'extrémité du nid (en cas d'abondance de récolte) se trouvent non des cellules, comme chez Apis mellifera, mais des pots (images 3 à 9, 15) qui contiennent le stock de miel ou de pollen, la nourriture commune des abeilles. Il existe des mélipones nécrophages, par occasion ou par nécessité (Roubik, 1982). Trigona hypogea est connue pour avoir remplacé le pollen par la chair animale comme source protéinique, de même que T. necrophaga, originaire du Panama et du Costa Rica, et T. crassipes, de la région amazonienne (Roubik, 1982; Gilliam et al.,1985; Roubik et al., 1995). A la différence d'autres Trigona, ces abeilles possèdent une grande dent sur chaque mandibule. Très exceptionnellement, soit dit en passant, dans des conditions climatiques extrêmes (sécheresse), des abeilles africaines comme Apis mellifera scutellata ont été vues en train de collecter des substances sur des animaux morts (Crewe, 1985) .
 
A noter que couvain et pots sont soutenus par de fines colonnettes de cerumen (images 3 - 5b).

 3--  4--  5--  5b-b-
 6--  7--  8--

 9


9b
 

3.--Nid schématique des Mélipones, basé sur Robin Moritz (2003)

4 à 5b.-- Schémas de nids de différentes Mélipones, avec : batumen (voir texte), canaux d'évacuation (galeries de drainages), entrée, faux rayon de couvain vide, galerie de communication, galerie de termites, involucrum (involucres, voir texte), lamelles de cire, pots de miel et de pollen, pots vides, rayons du couvain, structures radiculaires de terre et résines, termitière, vestibule.


4.--Partamona vicina. Nid dans une termitière arboricole active d'Amitermes excellens. Muçum, rivière Tapajós, Amazonie brésilienne.
5.- Nid souterrain dans une termitière active de Syntermes sp. Bacururu, rivière Juruá, affluent de l'Amazone, Brésil.
5b.- Nid d'espèces terricoles.
6.-- Ruche de melipona seminigra, Brésil, avec pots de nourriture au dernier plan et, devant, l'involucrum entourant complètement le couvain.
7.-- Coupe transversale d'un nid de cephalotrigona capitata, avec des pots, non de paprika mais de pollen, et au-dessous, le couvain dépourvu d'involucrum.
8.-- Nid de melipona fuscopilosa dans un creux d'arbre, région de Xapuri Acre, au Brésil. Avec : pots de miel et de pollen, involucrum, batumen.
9.-- Intérieur d'une ruche de Trigona carbonaria.
9b.-- Intérieur d'un nid de melipona quadrifasciata : Le batumen, noirâtre, est visible sur le bord supérieur de l'image. Au-dessous, de gauche à droite : les pots de nourriture, les rayons du couvain et l'involucrum.

La nourriture larvaire est déposée dans la cellule du couvain par les ouvrières juste avant la ponte. Elle est constituée de sécrétions glandulaires, de miel et de pollen, déposés en strates, les deux premiers élements au dessus, pour une première phase liquide de nourrissage des larves (5 jours env.) et le pollen pour la phase solide (10 jours env. pour la prépupe, 16 jours env. pour la pupe). Le type de nourriture (gelée royale puis pollen), sa destination et la durée de nourrissage sont très semblables à celles de notre abeille mellifère. La plupart des Meliponini comptent des ouvrières capables de pondre deux types d'oeufs. Des oeufs reproducteurs, qui produisent des mâles (que la reine peut aussi produire), et des oeufs trophiques, qui constitue la source principale de nourriture des reines, incapables de se nourrir elles-mêmes à cause de leurs trop petites mandibules. Cette spécificité est appelée POP (Processus d'Approvisionnement et de Ponte). Ainsi, reproduction et nutrition sont très liées pour la reine mélipone (Sakagami, 1982), au point où elle doit parfois choisir entre pondre et se nourrir :
 
"En comparant la durée du POP dans une colonie mono-reine et une colonie à trois reines, on a remarqué qu'une reine toute seule pouvait prolonger la durée du POP jusqu'à ce qu'elle obtienne des oeufs trophiques pour s'en nourrir. Par contre dans une colonie à plusieurs reines, la compétition pour la ponte est représentée par des POPs plus courts au cours desquels les reines « prérèrent » pondre plutôt que se nourrir. Ainsi, dans une colonie à plusieurs reines, la priorité des reines est de placer leurs oeufs le plus vite possible; cela peut déboucher sur une mauvaise nutrition qui pourrait expliquer la mise en place de hiérarchies de reproduction et l'abandon des fonctions de reproduction par des reines individuelles."

extrait de :
http://cat.inist.fr/?aModele=afficheN&cpsidt=17949204 (étude sur Melipona bicolor)

La division du travail

Heterotrigona sp., mélipone d'Australie appelée sugarbag bee à cause de la blancheur d'une partie de son tomentum thoracique (Partant, son miel est appelé sugarbag et sa cire, sugarwax : elle est recherchée en particulier pour la fabrication d'embouchures d'instruments, depuis longtemps par les Aborigènes, en particulier pour un instrument à vent appelé didgeridoo, et plus récemment par les Occidentaux.
Ici, on voit une ouvrière nettoyeuse en pleine action.

De la même manière que chez les Apidae, il existe une division des tâches correspondant grosso modo à l'âge de l'abeille, dont la durée de vie est très variable, de 43 jours, par exemple, chez M. quadrifasciata à 97 jours, chez T. xantthotricha :

 STADES TÂCHES   JOURS

 1

 Emergence et repos 

 1
  2  Incubation du couvain, travail de la cire dans les cellules, puis dans tout le nid, nourrissage occasionnel de la reineC  2 - 11
 3 Construction, remplissage et operculation des cellules, nourrissage des jeunes adultes et de la reine, nettoyage du nid, incubation.  112 - 21
 4
Nourrissage de la reine et des jeunes adultes, nettoyage du nid,
élaboration du cerumen.
 22 - 26
 5  Travail du cerumen, construction du nid et de l'involucrum, réception de nectar, emmagasinage de nourriture, gardiennage.

  27- 35
 6   Transition vers le butinage
 7  Butinage
 36 - décès
43 - 54 chez Scaptotrigona postica
 8  Marquage de piste (odorante)

 
 
Attaque-défense

 
Très souvent une ou plusieurs gardiennes sont postées à l'entrée du nid (images 1, 8 à 12). Pourtant, les Mélipones ne peuvent se servir de leur aiguillon (dard) atrophié pour piquer un éventuel ennemi (Darchen, 1966; Wille and Michener, 1973). Qu'importe, les gardiennes mordent alors les intrus avec leurs mandibules (image 13). Le comportement d'agression est trés développé chez les Mélipones, car de lui dépend parfois le devenir de la colonie, quand les sources de nourriture communes à plusieurs espèces sont limitées, par exemple, ou en cas de disette (Roubik 1982; Roubik 1989 ). Johnson et Hubbell (1974) avaient ainsi enregistrés 63% de mortalité (1812 abeilles mortes) après une bataille de deux jours entre deux colonies de Trigona corvina (Lepeletier 1835), luttant pour la possession d'appâts de solution sucrées. De même, quand les ressources de nourriture sont riches, beaucoup de Trigona (fuscipennis, silvestriana, williana, et surtout la très agressive hyalinata) utilisent cette stratégie de l'attaque pour tenter de les monopoliser (Johnson et Hubbel, 1974, 1975; Roubik, 1980; Johnson, 1981) par des méchanismes de recrutement encore mal compris.

Une autre stratégie est utilisé par les abeilles voleuses Lestrimellita, qui ne peuvent récolter elles-mêmes leur nourriture car elles ne possèdent pas de scopa (corbeille à pollen). Chez elles, c'est le citral (ou lemonal)
qui est utilisé comme arme d'attaque contre d'autres espèces. C'est le composé chimique de base de l'huile de citronnelle et d'autres plantes du genre Cymbopogon, qui a une forte odeur de citron. Lestrimellita limao, par exemple en pulvérise littéralement les nids attaqués de Trigona ou de Melipona, et ces dernières sont obligées de le quitter en grand nombre (Blum et al. 1970; Weaver et al. 1974). A la suite de quoi l'abeille voleuse dérobe ce qu'elle veut à l'intérieur des nids déserts. Un cas unique est, semble-t-il, celui de Melipona fasciata scutellaris, dont les individus poursuivent un intrus pour pouvoir le couvrir d'une substance collante, probablement résineuse, avant de l'éliminer.
 
Nous ajouterons à la liste des ennemis des Mélipones certains coléoptères, qu'elles peuvent comme d'autres abeilles momifier dans de la cire ou de la propolis, comme le fait par exemple T. carbonaria.
 
 
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14 -- 
  --15
  --15b    

10. -Melipona seminigra, gardiennes à l'entrée du nid
11. -Nannotrigona testaceicornis, abeilles gardant l'entrée du nid
12. -Melipona bicolor, ouvrières postées à l'entrée pour la défense du nid.
13. -Trigona spinipes attaque en groupe d'autres abeilles plus grosses qu'elles, mais le nombre compensera la taille . A gauche, une autre mélipone, melipona subnitida et à droite, apis mellifera;
14. -Melipona bicolor travaillant de la cire.
15. -Melipona bicolor, pots de miel et de pollen.
15b. -Melipona beecheii, Mexique, en train de se nourrir de miel.

 
L'odorat et le sens vibratoire

 
De même que d'autres abeilles, les Mélipones se servent de leur odorat pour distinguer socialement leurs congénères, pour distinguer en particulier les abeilles de leur colonies des autres abeilles ou des autres hyménoptères. Les composés chimiques utilisés par les ouvrières Trigona fulviventris, par exemple, sont proches de ceux d'A. mellifera : acides gras (en particulier 16-C et 18-C), esters de cire, les premières se distinguant par l'utilisation d'alkanes et d'huiles florales (Buchwald et Breed, 2005).
 
De même, et contrairement aux Apini, les Meliponini ne communiquent pas leurs informations de butinage par des danses mais par des pistes odorantes ou des sons (Melipona en part.) pour indiquer le chemin de la source de nourriture (Lindauer et Kerr, 1958; Esch et al, 1965; Biesmeijer et al. 1998; Nieh et Roubik, 1998; Aguilar et Briceño, 2002; Slaa et al. 2003), en plus des marquages sur les sites de butinage (Scaptotrigona aff. depilis, par exemple : Schmidt, Zucchi et Barth, 2002) ou à leur place (Melipona seminigra : Hrncir et al., 2003). Ces marques permettraient aussi de visiter à nouveau des sites identifiés comme riches en nourriture ou, au contraire, d'éviter les sites pauvres ou nouvellement appauvris (Nieh, 1998; Goulson et al., 2001; Jarau et al. 2002, 2004; Nieh et al., 2003, 2004; Schmidt et al., 2003, 2005; Aguilar et al., 2004a; Hrncir et al., 2004; )
 
Pour cela différentes glandes sont mises à contribution : glandes tarsales, épithéliale, glandes labiales céphaliques ou mandibulaires (chez Frieseomelitta elles sécrètent 2-Alkanols, 2-ketones, 2-alcools). C'est ainsi que Trigona spinipes Fabricius 1793 n'utilise que ses glandes labiales salivaires pour tracer sa piste phéromonale, qui utilise un composé unique, à base de 74% d'octyl octanoate, quand d'autres utilisent l'hexyl decanoate ou le citral. Les butineuses de l'espèce étendent ensuite leur glosse et la frottent sur la marque odorante (Nieh et al. 2004).
 
Comme les Apis ou les Bourdons, les abeilles sans dard utilisent leurs ailes pour produire des vibrations thoraciques dans les cas de :
- recrutement : (Esch, 1961; Wenner, 1962; Michelsen et al., 1986; Hrncir et al., 2006a).
- récolte de pollen (Michener, 1962; Wille, 1963; Buchmann, 1983; King, 1993)
- défense (Schneider, 1972; Sen Sarma et al., 2002), associées à des productions phéromonales, en particulier 2-heptanol et 2-nonanol.
 
Des études sur Melipona costaricensis ont montré différentes variations thoraciques des émissions sonores selon la concentration en sucres et la distance des sources de nourriture. On a pu corréler ainsi la durée des vibrations courtes et leur intervalle avec la distance de la source alimentaire. On a aussi corréler la richesse ou la pauvreté de cette source avec l'accroissement ou la diminution des vibrations, qui permettent de recruter les butineuses selon la disponibilité de la nourriture. Plus généralement, chez Melipona, on peut en plus associer une production de sons dans les communications en vol (Esch, 1967) ou pendant les contacts par trophallaxie (Hrncir et al., 2006b), là encore pour communiquer les sources riches de nourriture. Ajoutons qu'en plus des vibrations elles-même, l'organe de Johnston serait très impliqué dans la communication sonore en étant un récepteur très fin des particules d'air, de leur pression dégagée par le mouvement des ailes.
 

 
Les mâles

Les mâles des Mélipones sont encore mal connus. On sait qu'ils apparaissent irrégulièrement dans les nids et en petit nombre (Bego, 1982; Roubik, 1983; Van Veen et al., 1990), à l'exception de la saison de reproduction, où ils peuvent être produits en quantité importante.
Ils sont attirés vers les nids possédant des femelles vierges. Les mâles se rassemblent alors près des nids (on en a observé près de 400), là où se passent souvent les copulations, que l'on nomme DCA (Drone Congregation Area) ou parfois, DCS (Drone Congregation Sites), termes utilisés également chez les autres beilles. Ces rassemblements ont lieu le plus souvent à quelques mètres du nid et peuvent durer plusieurs semaines en certains cas. Chez certaines espèces, telle Melipona favosa, le mâle quitte la colonie à dix-huit jours environ et ne retourne pas à sa ruche d'origine (Van Veen et al. 1997). Des ouvrières ont une part active à l'évènement. Elles suscitent l'agressivité entre elles (il y a souvent des mortes), on a constaté de leur part des attaques envers les mâles (sans les tuer) et beaucoup de trophallaxie, qui est aussi très active entre mâles. Toute cette agressivité semble accroître l'activité des mâles auprès des gynes (reines). Par ailleurs, les ouvrières peuvent déposer de la boue et des plantes odoriférantes (pétales de fleurs, résines) à l'endroit de la réunion.

 Les reines

 

 
16. -Melipona asilvai, reine en train de pondre et ouvrières.
17. -Melipona scutellaris, ouvrières s'occupant du couvain et reine au moment d'une ponte.
 

La polygynie déjà évoquée des reines n'implique pas une cohabitation parfaite entre les reines d'une même colonie. Les reines vierges, cependant, ont un statut protégé pendant certaines périodes. Il existe, par ailleurs, différents moyens de se protéger au sein du nid : Des refuges déterminés en commun, par exemple, ou encore, comme chez Schwarziana Quadripunctata, grâce à une grande plasticité comportementale, des chambres exclusivement royales, où elles peuvent être maintenues un certain temps chez certaines espèces (Plebeia, Friesomellita), jusqu'à ce qu'elles reçoivent un signal de quelques ouvrières ou de l'ensemble de la colonie.
Chez Trigona hypogea, par exemple, les reines peuvent demeurer cloîtrées onze mois durant à l'état de nymphe dans leurs cellules royales, et accomplir ensuite leur pupaison hors de leur cellule, avec les autres reines, mais c'est pire encore pour Trigona recursa, qui est obligée, à l'état adulte, de consommer les réserves de leur corps pour survivre longtemps dans sa cellule.
Chez Nannotrigona, Scaptotrigona, il peut y avoir une indifférence totale à leur présence . Chez Paratrigona subnuda, ce sont des pots de miel vides qui servent temporairement d'abri. Une autre stratégie consiste à être bien entourées par une garde d'ouvrières, comme les reines de Celetrigona longicornis et Leurotrigona mulleri. Il y a donc rarement des reines dominantes, mais quand une reine le devient (en cas de supercédure, par exemple), les reines vierges essaient de l'éliminer, mais échouent très souvent dans ce but.
 
Terminons ce chapitre par ce curieux fait qu'il existe chez les Mélipones des reines miniatures. Certaines espèces de Mélipones produisent à la fois des grosses reines, à partir de cellules royales, et des petites reines, à partir de cellules d'ouvrières. Beaucoup d'hypothèses sont émises à leur sujet, mais on pense généralement que ce sont des ouvrières qui contrôlent génétiquement ce devenir pendant leur développement. On ne comprend cependant pas encore pourquoi un certain nombre d'espèces ont des reines miniatures à leur tête, qui sont très productives, et d'autres ont des reines miniatures à la fécondité réduite ou moins de chances d'être choisie comme nouvelles reines.

 
Maladies, parasites
 

Les Mélipones ont, comme nos abeilles mellifères, la capacité de détecter un élément mort du couvain dans une cellule, de désoperculer cette dernière, d'en ôter l'élément malsain et de s'en débarrasser hors de la ruche. Elles savent aussi creuser une galerie à travers les murs, jusqu'à la périphérie du nid, pour se débarrasser des cadavres. Ceci a été particulièrement étudié pour Melipona beecheii et Scaptotrigona pectoralis (Medina, Hart et Ratniek, 2009)
 
Ces abeilles sans dard diffèrent des autres abeilles mellifères sur le comportement hygiénique et cela pour plusieurs raisons :
 
- L'emmagasinage de la nourriture en une fois, suivi de l'operculation rapide des cellules (quelques minutes après oviposition, Sakagami, 1982; 6 mn chez M. beecheii : van Veen, 2000) limitent le contact entre larves et ouvrières, et partant, la transmission des agents pathogènes du couvain.
- La destruction des cellules du couvain après l'émergence des imagos et la construction d'une nouvelle cellule à la place (Sakagami, 1982).
- On peut trouver dans les nids des lieux de décharge, des espèces de poubelles vidées par des ouvrières nettoyeuses, qui seraient aussi pour certaines des lieux d'aisance.
 
Les deux premières spécificités expliquent sans doute en partie pourquoi peu de maladies du couvain sont rapportées chez les abeilles sans aiguillon (Nogueira-Neto, 1997; Schmid-Hempel, 1998). Il faut aussi ajouter à cela le fait que les abeilles qui ont la tâche de construire et d'approvisionner les cellules seraient en très petit nombre (6-19 ouvrières : van Veen, 2000).

Un autre facteur permettrait aux Mélipones d'être moins atteintes que d'autres abeilles mellifères par les les maladies, en vivant parfois en symbiose avec ses parasites. Ainsi leur cohabitation harmonieuse avec les mites, par exemple (Flechtmann and Camargo, 1974, 1979; Alford, 1975; Delfinado-Baker et al., 1983; Rosa et Flechtmann, 1983; Rosa et al., 1985; Nogueira-Neto, 1997, Kazmierski, 1998b). Plusieurs des auteurs cités ont montré que les mites pouvaient aider les Mélipones à nettoyer les nids, contrôler les populations d'autres mites, et même d'éliminer des champignons pathogènes. A l'inverse, certains champignons peuvent aider les abeilles sans dard, dans des biotopes humides, à dessécher le pollen et ainsi retarder sa dégradation.
 
Mais cela ne doit pas faire oublier que certaines mites, telle Pyemotidae tritici, causent des infestations mortelles à ces abeilles, les exemples ne manquent pas chez Melipona subnitida, M. asilvae (Rio Grande do Norte, Brésil : Kerr et al., 1996; Nogueira-Neto, 1997), M. colimana (Autlán de Navarro, Jalisco, Mexico : Macías-Macías et Otero-Colina, 2004), Tetragonisca angustula et Frieseomelitta varia (Minas Gerais, Brésil : Menezes, Coletto-Silva, Gazeta et Kerr, 2009).

 

 18. -Tetragonisca angustula parasitée par l'acarien Pyemotes tritici.

A. parasitage inter-segmentaire d'une ouvrière adulte
B. Cellules d'un nid infesté ouvert pour montrer les mites sur les pupes.
C. Mites physiogastriques parasitant une larve.
D. Mites physiogastriques parasitant une pupe.
C. Jeune mite parasitant une pupe vue sur le côté.

Le parasite le plus redouté des méliponiculteurs est sans doute le phoridé Pseudohypocera communément appelée mouche noire, en particulier P. kerteszi Enderlein. (Diptère, Phoridae) qui infeste sérieusement les nids de M. beecheii., ou encore Apocephalus apivorus Brown, Calamiscus cryptopalpis Borgmeier.

 19 -  20 -  
  -21   -22  
  -23 24 -  
     
19. -Melipona subnitida, Brésil
20. -M. eburnea fuscopilosa, Amazonie, Brésil.
21. -Frieseomelitta varia
22.-Heterotrigona sapiens
23. -Heterotrigona carbonaria, appelée comme la précédente sugarbag bee (parfois sweat bee), et produit un miel appelé sugarbag, litt "sac de sucre" et une cire appelée sugarwax ("cire en sucre"),
24. -Scaptotrigona sp., Mexique.
 

 



sources textes :

- http://www.javeriana.edu.co/biblos/tesis/ciencias/tesis59.pdf
- http://www.apidologie.org/index.php?option=article&access=standard&Itemid=129&url=/articles/apido/pdf/2003/01/09.pdf
- http://striweb.si.edu/publications/PDFs/Stingless_bee_nesting_biology2006.pdf
- http://www.revistaciencias.com/publicaciones/EpZypuplEZqTbFOtKJ.php
- http://www.cedit.misiones.gov.ar/index.php?option=com_docman&task=doc_view&gid=60&Itemid=21
- http://www-biology.ucsd.edu/labs/nieh/TeachingBee/eds_stingless.htm
- http://cat.inist.fr/?aModele=afficheN&cpsidt=17998207
-http://www.apidologie.org/index.php?option=article&access=standard&Itemid=129&url=/articles/apido/
pdf/2003/03/M3307.pdf
- http://www.pubmedcentral.nih.gov/articlerender.fcgi?artid=2093984
- http://jeb.biologists.org/cgi/content/abstract/211/5/678
- http://www.apidologie.org/index.php?option=article&access=standard&Itemid=129&url=/articles/apido/pdf/
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- http://ir.lib.sfu.ca/bitstream/1892/5041/1/b13828794.pdf
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- http://esa.confex.com/esa/2003/techprogram/paper_11955.htm
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-

 
 
sources images :

- http://www.culturaapicola.com.ar/wiki/index.php/Abejas_mel%C3%ADferas_sin_aguij%C3%B3n (carte)
- http://www2.biology.sc.chula.ac.th/web%20of%20NHJCU%20PDF/5-1,1-7.pdf (trigona minor)
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- http://www.apidologie.org/index.php?option=article&access=standard&Itemid=129&url=/articles/apido/pdf/1961/01/Ann.Abeille_
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- http://www.pnas.org/content/74/3/1135.full.pdf (image 7)
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- http://www.scielo.br/scielo.php?script=sci_arttext&pid=S0085-56262007000100013&tlng=en&lng=en&nrm=iso (T. extranea)
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- http://www.treknature.com/gallery/photo206105.htm (tetragonisca)
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- http://www-biology.ucsd.edu/labs/nieh/TeachingBee/eds_stingless.htm (attaques mélipones)
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- http://www.meliponario.com.br/cdrom/index.htm (image 17)
- http://4.bp.blogspot.com/_312a5DGVXcg/SgMx-kiUhtI/AAAAAAAAAV8/n7BLo2IKKbU/s1600-h/MANDASSAIA+para+blog.JPG
(image 9b)
- http://www.funpecrp.com.br/gmr/year2009/vol8-2//pdf/kerr021.pdf (mite P. tritici)
- http://knol.google.com/k/-/-/1mfkxf1xap86i/rkatfo/stingless-bee-cr.jpg (nettoyeuse)
- http://www.padil.gov.au/viewPestLargeImage.aspx?id=2088&img=14102 (image 23)
- http://www.padil.gov.au/viewPestLargeImage.aspx?id=2089&img=14242 (image 22)
- http://www.thehoneygatherers.com/html/phototheque20.html (image 15b)

 
 

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