ENCYCLOPEDIE -DE--LA--LANGUE -FRANCAISE - ----------------- ABBAYE--------------------------------------------
Origines : Introduction . La Palestine (2)
- Si les régions de Judée et de Gaza sont importantes pour le développement du monachisme, il ne faudrait pas oublier celle du Neguev , dont on ne parle guère. N'oublions pas que la province de Troisième Palestine (à compter de la fin du IVe siècle) comptent des villes comme la célèbre Petra, la capitale, Elusa (Halutza), Zoar, Phaino (Punon) et Aila (Eilat, puis Aqqaba ou Akkaba), qui ont leurs propres évêchés. Pour une moindre part, disions-nous, cela reste encore à voir. Le concile de Constantinople, réclamé par l'empereur Justinien en 536 contre Anthimus ne conserve t-il pas les signatures de membres du clergé, paraphant au nom de tous les moines d'Aila? En plus de multiples traces archéologiques de la présence chrétienne, quoi de plus tangible que les six lettres (sur 2000, paraît-il) de Barsanuphius, un des deux reclus du monastère de Séridos, entre Maiumas et Gaza, au VIe siècle, qui s'adressent à un certain "aba Jean de Birosaba" (Beer-Sheba), vivant dans le couvent du même nom. Dans le même temps, Jean Moschos, vers 550, écrit son fameux "Pré Spirituel" (ou Prairie Spirituelle : Pratum Spirituale), ouvrage dans lequel il cite Victor, qu'il qualifie d'hésychaste dans la laure d'Elusa.
- Il y aussi saint Theognios, évêque de Bitylie (Bitylium), dans le Nord Sinaï (Vailhé 1891), dont le biographe est le soi-disant "abbé Paul d'Elusa", et qui succéda à Theognios comme supérieur du monastère.
- Nous allons maintenant passer en revue les premiers monastères chrétiens connus dans le Neguev, pour la plupart du début l'époque byzantine.
- A Horvat Hur (Khirbet Hora ou Haura), le voyageur allemand Seetzen repère les vestiges en 1805. Govrin distingue, en 1984 et 1992, d'une part une basilique, un atrium et des pièces adjacentes, d'autre part, un complexe qui a tout l'air d'un complexe monastique.
- A Horvat Kuseife, les complexes exhumés par Musil (1901), Maner (1908), puis Ovadiah (1970), semblent desservir des monastères.
- Il en est de même pour Horvat So'a (Khirbet Sa'wa), fouillés par Conder et Kitchener dès 1883, puis par Govrin en 1992, mais aussi Mampsis (Kurnub, Mamshit), dont l'église ouest mentionne que son supérieur (son Père, abba) est le fils de Zénobio, le "paramonarios" (sorte de diacre, en grec ancien) de l'église.
- A Mitzpe Shivta (ou Sobata, auj. Mishrefe), un pèlerin anonyme, vers 570, témoigne dans les environs d'Elusa d'un xenodochium (hôtellerie), que Baumgarten et Figueras sont d'accord de situer sur le site de Mishrefe ("point d'observation"). Sur le territoire égyptien d'aujourd'hui, Mo'eileh n'est qu'une grotte avec des cellules semblables à toutes celles de la période byzantine. Nous savons par la vie de saint Hilaire de Gaza par saint Jérôme, que des moines vivaient dans la région de Qadesh au moins depuis le milieu du IVe siècle (Hieron ., Vit. Hil. 25, PL 23).
- A Nessana (Nitzana, auj. Auja el-Hafir pour les Bédouins) les documents qui attestent la vie monastique sont trop nombreux pour qu'on s'y attarde ici en détail : Différents papyrii ont été découverts, datant des VI-VIIe siècles, par les expéditions américaines de 1921et de1935 ( Colt 1962), mais aussi celles de Dan Urman (Urman 1990), de l'Université Ben Gurion, et ce depuis 1987. Nous pouvons parler à ce jour d'au moins six églises, dans la Nessana byzantine, dont la moitié au moins est afférente à un complexe monastique, plusieurs d'entre-eux devant être des couvents de moniales (matronikia), dont témoigne d'ailleurs le pèlerin anonyme déjà cité. Le premier d'entre-eux est nommé mone (monastère) de Saint-Serge (Sergius). Le terme monachos revient quatre fois dans les papyrii (Kraemer 1958), alors qu'abba n'apparaît pas moins de quinze fois. Une inscription épigraphique est aussi significative, qui contient une liste de sept "Pères" et "Mères" (Colt 1962). Il y a parmi eux des moines Egyptiens et Palestiniens bien connus, tels Chariton ou Cyrille. Dans la troisième église, on trouve sur la mosaïque du sol une dédicace en ces termes : "Pour le salut du donateur Serge, ex-assesseur et moine, Palut sa soeur, et Jean, son fils, diacre de son état et membres du conseil de la cité d'Emèse [auj. Homs]. En l'année 496, cinquième année-indiction, le 20e jour du mois de Gorpiaios" (septembre 609, selon l'ère arabique ou élusienne). Plusieurs choses tendent à montrer qu'ici, les moines auraient eu des étudiants : quelques pages de devoirs d'étudiants, de dictionnaire de latin-grec, de poèmes de Virgile, qui font penser à un monachisme de type basilien, combinant le travail intellectuel et manuel, éloignées des mouvements issus de Pachôme ou de Chariton, très accès sur la prière et la contemplation. A Oboda (Eboda, Abdeh, Avdat), la présence monastique est confirmée par la présence de nombreuses pièces adjacentes à la basilique, mais aussi par une mention de l'ABBAC Kapito, son prêtre.
Palestine, Neguev, Ruheibeh, plan en coupe de l'église Nord (à gauche, basilique à trois absides, 24.80×13.10 m) et du monastère (Tsafrir 1993)- Ruheibeh (Rehovot ha-Negev, mentionnée dans Genèse 26:22) possédait quatre églises au moins, de nombreuses reliques, une crypte (3.4 x 4.3 m), trouvée derrière la nef et le presbytère, un grand atrium (comme souvent dans la région), une salle à manger, où l'on a retrouvé une longue table, certainement un réfectoire. A noter la présence d'une citerne, au milieu de la cour, qui collectait l'eau de pluie depuis les toits de l'église et du monastère, pour l'usage des habitations.
- Palestine, Neguev, Sobata, reconstitution isométrique de l'église Nord et du monastère (Rosenthal-Hegginbottom, 1982, Plan 4).
- Les ruines impressionantes de Sobata (Sobota, Sbeita, Shivta) ont marqué de nombreux voyageurs, depuis Palmer, en 1870, en passant par Musil, en 1901, et Jaussen, Savignac et Vincent en 1905, puis Wooley et Lawrence en 1914/15 ou Rosenthal, plus récemment (1978). Il est attesté que les trois églises retrouvées (19 x 12 m, 17 x 14 m, 19 x 14.30 m), sont attachées à des communautés monastiques pourvues de pressoirs à vin, d'échoppes artisanales, de terres agricoles, avec une hôtellerie très importante, au service des visiteurs et des pèlerins, si l'on en juge la taille du baptistère, des riches décorations de l'église, de ses chapelles aux nombreuses reliques. La conception de l'église du sud fait penser à une communauté de clercs ayant mis en commun leurs biens, prenant leurs repas en commun, plus qu'à une communauté purement monastique.
- Palestine, Neguev, Sobata, reconstitution isométrique, en deux vues opposées, de la chapelle et du monastère (Fritz-Kempinski 1983).
- A Tel Masos (Khirbet el Meshash), le complexe monastique possède tous les éléments identifiables dans ce type d'établissement, ainsi qu'à Tel Yeshua (Tel es-Sawa).
- A partir du IVe siècle, de nombreux Romains s'installent dans le même temps en Palestine, et nous retrouvons parmi eux quelques noms des nobles Romaines que nous évoquerons dans le contexte monastique occidental, car elles avaient auparavant organisé leur demeure romaine en communauté : Mélanie l'Ancienne, veuve du Préfet de Rome, s'installe vers 380 sur le mont des Oliviers, à Jérusalem, et fonde un monastère double, le couvent masculin étant confié à Rufin d'Aquilée (Rufinus, 345-410), connu pour ses traductions d'Origène. Mélanie et Rufin se lient d'amitié avec Egérie, venue de Gaule ou d'Hispanie, qui débarque à Jérusalem en 381. Paula, qui fonde à Bethléem, en 386, un monastère double, dont celui des hommes est dirigé par saint Jérôme ; sa cousine, Mélanie la Jeune, petite-fille de Mélanie l'Ancienne, est une des plus grandes fortunes de Rome. Elle voyage beaucoup, rencontre Augustin à Thagaste, se défaisant progressivement de sa colossale fortune en immenses dons aux quatre coins de la chrétienté naissante. Elle installera en 417 un monastère de 80 vierges sur le mont des Oliviers puis en 432, à la mort de Pinien, son époux, aussi fortuné qu'elle, elle fondera cette fois un monastère d'hommes, où s'installera un prince géorgien, Nabarnugi (Pierre Ibère) qui fondera lui-même un monastère près de l'église de Sion. Jérusalem se couvrira bientôt de nombreux monastères.
- Sources :
- - http://198.62.75.1/www1/ofm/sbf/Books/LA43/43339YH.pdf
- - http://198.62.75.1/www1/ofm/sbf/Books/LA43/43315JP.pdf
- - http://198.62.75.1/www1/ofm/sbf/Books/LA45/45401PF.pdf
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