ENCYCLOPEDIE -DE--LA--LANGUE -FRANCAISE

-ABBAYE

 
Charlemagne et Adrien Ier, Grandes Chroniques de France, vers 1492.

Manuscrit sorti des ateliers d'Antoine Vérard (+1503), éditeur, libraire, calligraphe. On lui doit une part majeure des incunables et des post-incunables français, conservés en grande partie au musée Condé de Chantilly.
 
-LES ARTS
AU TEMPS
DES CAROLINGIENS

 

Evangéliaire d'Aix-la Chapelle

 
-L'ENLUMINURE (1)

 
Le temps de Charlemagne

 


INTRODUCTION


La renaissance culturelle des Carolingiens n'acquiert toute sa dimension et tout son sens, nous le savons, qu'avec Charlemagne. Elle s'amorce cependant dès l'avènement de la dynastie, qu'inaugure Pépin le Bref, au travers des fondations d'abbayes prestigieuses comme Lorsch, Gorze ou Echternach, appelées à posséder des scriptoria importants, ou de la nouvelle vitalité de l'abbaye royale de Saint-Denis (voir lien ci-dessus). Pourtant, ces monastères ne produiront pas, à notre connaissance, d'ouvrages enluminés de premier plan pendant le règne de Pépin III. Le seul manuscrit notable est celui des Evangiles de Gundohinus (du nom de son copiste), copiés en 754 dans le monastère de Vosevio (Vosevium), encore non identifié à ce jour, qui aurait pu se situer dans l'est de la France.

CHARLEMAGNE


"L'Ecole du Palais"


Nous avons déjà introduit la notion de l'école de la cour impériale ou Palatine d'Aix-la-Chapelle (Aachen) au chapitre de Charlemagne, mais il nous faut préciser ici un peu mieux ce que recouvre ces appellations et qui fait apparaître encore mieux le rôle des abbayes dans la transmission du savoir au temps des Carolingiens.
 
En effet, la réalité concrète de cette "Ecole du Palais" a été assez idéalisée pendant longtemps. En lieu et place de celle-ci, nous ne devons pas nous imaginer un aréopage de têtes pensantes réuni dans un même bureau chaque jour et travaillant constamment en équipe. Son mode de vie est à l'image de son chef : ambitieuse, dynamique, sans doute, mais aussi rustique et informelle. Elle pouvait représenter des discussions à bâtons rompus dans la piscine impériale ou une oeuvre produite dans un monastère bien éloigné de la cour impériale. Le scriptorium d'Aachen (Aix-la-Chapelle), n'est pas, et de loin, nous le verrons, le théâtre principal des opérations. Beaucoup d'historiens sont d'accord aujourd'hui pour penser que la réalisation des ouvrages d'exception du temps de Charlemagne, et plus encore après, bénéficiait d'une grande souplesse, à la fois par la grande diversité de leurs acteurs, mais aussi dans l'espace et le temps, avec nombre d'intermédiaires, d'abbayes, de commanditaires, d'artistes et de scribes, laïcs , moines ou clercs. C'est, en substance, l'opinion de divers chercheurs, le plus important d'entre-eux étant sans doute Bernhard Bischoff (1906-1991, paléographe allemand), qui avait beaucoup étudié cette période et pensait que les manuscrits luxueux associés à la cour de Charlemagne, ou de son fils, Louis le Pieux, n'ont pas été réalisés dans un "scriptorium monastique clos" : voir en particulier "Die Hofbibliothek Karls des Grossen," ("Manuscrits et bibliothèques de la Cour de Charlemagne"). Le médiéviste Lawrence Nees, qui s'est penché tout particulièrement sur cette question, va plus loin encore dans "On Carolingian Book Painters : The Ottoboni Gospels and its Transfiguration Master" ("Les Livres des peintres Carolingiens : Les évangiles Ottoboni et le Maître de la Transfiguration") paru dans The Art Bulletin 83 (2001), p. 209-239. Ce dernier se pose carrément des questions sur la réalité de l'existence non seulement du scriptorium mais de la bibliothèque du Palais sous Charlemagne. Peut-être que de récentes techniques nous permettront d'éclaircir ces points. En effet, il serait possible d'analyser l'ADN à la fois du parchemin et des empreintes digitales qui y ont été apposées. Le parchemin, qui est fait, nous l'avons dit de peaux de bêtes, pourrait alors livrer le type des espèces utilisées, ce qui pourrait rapprocher les manuscrits d'origine inconnue de ceux que nous connaissons mieux et qui auraient été faits à partir des matériaux similaires. Monastères ou ateliers royaux, moines, clercs ou laïcs, toutes ces questions n'enlèvent rien à la dynamique culturelle et religieuse insufflée par Charlemagne (et déjà Pépin le Bref, nous l'avons-vu), et que ses successeurs développeront après lui. En tout cas, dans le doute, nous allons présenter maintenant les sept manuscrits enluminés de la fameuse école qui nous sont parvenus, tous des Evangiles (ou Evangéliaires).

Les manuscrits


Ces manuscrits sont conçus selon un schéma insulaire (Irlandais et Saxons) comprenant les tables des canons d'Eusèbe (en tête), des tableaux d'évangélistes et des pages d'incipit. Ils contiennent, à l'exception de l'évangéliaire de Gundohinus dont il a été question plus haut, les plus anciennes enluminures carolingiennes qui nous sont parvenues. Si les origines de ces manuscrits ne sont pas évidents, nous l'avons vu, leurs influences le sont d'avantage, puisque traduites par le texte et surtout, les décors qui y figurent. Nous comprenons ainsi que, comme les Mérovingiens, les Carolingiens ont une culture artistique qui représente un carrefour d'influences, essentiellement italiennes (romaines, lombardes), byzantines, orientales et celtiques, cultures qui se retrouvent chez les nombreux acteurs du monde culturel occidental. Passons donc en revue les manuscrits dont il est question, tout en précisant auparavant que certains ont un rapport à notre sujet, et d'autres pas :
- l'Evangéliaire de Godescalc (Godescalcus) ou Evangiles de Charlemagne, est le plus ancien d'entre-eux (781-783), et on ne sait toujours pas si il a été créé dans une abbaye (celle de Saint-Martin de Tours, celle de Corbie?) ou dans un atelier royal rhénan (Mayence? Trèves?).
- Les Evangiles de Saint-Riquier (ancienne abbaye de Centula, Bibliothèque Municipale d'Abbeville, ms.4), luxueusement écrit en onciales d'or sur parchemin pourpre (comme celui de Godescalc), vers l'an 800. Charlemagne confia l'abbaye de Centula à Angilbert, son laïc neveu, en 790, et celui-ci donna au monastère ses propres livres (environ 200), parmi lesquels cet évangéliaire.
- Les Evangiles de Harley (vers 800)
- Les Evangiles de Saint-Médard-de-Soissons (vers 805)
- Les Evangiles d'Ada ou Evangiles de Trèves (vers 810)
- Les Evangiles de Lorsch (vers 810)

Un deuxième foyer artistique impérial, qui se prolonge après la mort de Charlemagne, a son centre névralgique en Champagne, avec l'abbaye d'Hautvillers, surtout, mais aussi sa voisine, celle d'Epernay, dans la région de Reims, sans parler bien sûr, des ateliers impériaux qui suivaient l'empereur, comme toute la Cour, du reste, selon ses déplacements :

Il s'agit toujours d'évangéliaires, mais cette fois, particulièrement luxueux, que compose ce groupe manifestement de culture grecque, probablement des byzantins, grosso modo entre 790-810.
- Les Evangiles du Couronnement.
- Les Evangiles de Xanten (Xantener Evangeliarglossen), un monastère de Rhénanie-Westphalie (Allemagne), connu pour ses annales (845-853), son célèbre abbé, Norbert de Xanten, à l'origine de l'ordre des Prémontrés vers 1121, et sa Bible hébraïque, dite de Xanten, due à Joseph ben Kalonymus en 1294 :

 

 

Evangéliaire de Xanten (appelé parfois, Xanthos, à tort)
vers 790-810
Bruxelles, Librairie Royale Albert Ier, Ms. 18723
fol° 17v, Saint Matthieu

- Les Evangiles d'Aix la Chapelle
- Un Evangéliaire à Brescia (Biblioteca Civica Queriniana, cod. E. II. 9)
 

Sources

 
 
http://fr.encarta.msn.com/media_461547235/Charlemagne_et_le_pape_Adrien%C2%A0Ier.html
http://www.chez.com/menarpalud/ (évangiles de Lindau reliure1)
http://www.morganlibrary.org/collections/collectionsEnlarge.asp?id=59 (idem, reliure2)
http://www.derand.be/derand/pdf/Gemeenschapskrantderand200209.pdf (Xanten)
 
 

 

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