ENCYCLOPEDIE -DE--LA--LANGUE -FRANCAISE
- LETTRE A
 
Philosophie à Sport
Sciences : Physique
 
Bombe A
2e partie
L'exil des scientifiques allemands


 

Entre-temps, le soir du 10 mai 1933 à Berlin, des milliers de jeunes gens mirent le feu à une montagne de livres devant l'Université de Berlin. Ce bûcher marqua le début d'une ère nouvelle : de nombreuses personnalités scientifiques étaient juives, telles Einstein ou Max Born, et furent obligées à quitter l'Allemagne. Certains scientifiques (Jacob Franck), en signe de solidarité, démissionnèrent. D'autres (Wigner, Leo Szilard, Edward Teller) partirent également car le régime nazi était en contradiction avec leurs opinions. Le reste, les moins nombreux, demeurèrent en Allemagne (dont Hahn et Strassman, voir plus haut).

Beaucoup partirent vers l'Angleterre, la France ou les Etats-Unis. D'autres optèrent pour l'Union soviétique, bien que celle-ci ait adopté certains des dogmes d'Hitler. Toutefois, plus subtil que celui-ci, Staline savait que l'URSS ne pouvait se passer de savants, et il en accueillit tout en interdisant aux Soviétiques de partir.

Le résultat de cette fuite de l'Allemagne est que la plus grande communauté de savants qui ait jamais existé se forma aux Etats-Unis.

Cette concentration de savants fera la force de ce qui deviendra le Projet Manhattan.

La hantise de la Bombe allemande

La découverte de la fission en 1938 par Hahn et Strassman se réalisa sur le sol allemand. Il semblait donc certain qu'Hitler ne laisserait pas échapper un secret pareil, même si aucune publication allemande n'en avait fait mention : la découverte était passée à l'Ouest par l'intermédiaire de Niels Bohr et n'avait pas été révélée en Allemagne.

Aux Etats-Unis, sous la pression des savants venus d'Allemagne, on était persuadé que le III° Reich allait accéder à la puissance nucléaire, et qu'il fallait donc intensifier les recherches afin de le devancer. Les craintes se confirmèrent lorsqu'ils apprirent que le gouvernement allemand avait brusquement interdit l'exportation de l'uranium des mines tchécoslovaques.

Il fallait avertir les gouvernements. Fermi, puis Szilard, s'y essayèrent auprès de Hooper, amiral dans la Marine (qui était alors le seul secteur militaire à disposer de fonds pour la recherche), mais sans succès. Cependant, le conseiller privé de Roosevelt, Alexander Sachs, leur suggéra de préparer un dossier sur les recherches atomiques, qui serait soumis au Président. Ce dossier devrait être accompagné d'une lettre signée par un savant de grand renom. Ce ne pouvait être qu'Einstein.

Le 2 août 1939, soit 6 ans avant Hiroshima, Albert Einstein signa donc le premier document officiel pressant un gouvernement de fabriquer une bombe atomique. Il y avertissait Roosevelt des recherches concluantes sur l'énergie nucléaire, il lui demandait de resserrer les liens entre le gouvernement et les physiciens, et il l'avertissait de l'interruption de la vente d'uranium en Tchécoslovaquie. Si Einstein signa la lettre, ce fut Szilard qui la rédigea. Celui-ci fut un ardent partisan de la fabrication de la Bombe, mais fut également un farouche opposant à son utilisation. Il expliquera plus tard cette attitude par la peur
de la Bombe allemande.

Le Maud Committee, le projet atomique anglais, finit par s'allier aux Américains car il lui était impossible de progresser rapidement : la guerre en Europe déjà faisait rage.

----------