ENCYCLOPEDIE -DE--LA--LANGUE -FRANCAISE
- LETTRE A
 
Philosophie à Sport
Sciences : Physique
 
Bombe A
1e partie
L'aventure scientifique


 

Commençons par étudier brièvement les découvertes scientifiques qui permirent la réalisation de la Bombe.

L'arme nucléaire n'est pas née de l'imagination d'un seul savant. Elle a été le résultat d'une aventure scientifique qui a bouleversé notre conception du monde. Les grands progrès matériels de notre vie furent tous l'aboutissement de travaux dont les auteurs ne prévoyaient souvent pas les conséquences concrètes qu'ils pourraient avoir. Mais dans le cas de l'énergie nucléaire, c'est en moins d'un demi-siècle que l'on est passé d'une intuition scientifique à la réalisation technique.

Premières découvertes : une nouvelle image de la matière

Le hasard joua un certain rôle dans cette découverte. Tout commença en 1896, lorsque Henri Becquerel effectuait des expériences sur les rayons X découverts tout récemment. Il était persuadé que les sels d'uranium pouvaient émettre des rayons X, mais uniquement lorsqu'ils avaient été exposés au soleil. Il découvrit que cette idée était fausse. Effectivement, lors d'une expérience fortuite qui resta célèbre, Becquerel avait constaté que des sels d'uranium isolés de la lumière émettaient aussi des rayonnements. Une seule explication était possible : l'uranium émettait continuellement, et sans qu'aucune exposition à la lumière ne fût nécessaire, des radiations pénétrantes qui devaient bientôt se révéler différentes de celles des rayons X. Un nom fut donné à ce phénomène : radioactivité.

En 1897, Marie Slodowska, d'origine polonaise et épouse du physicien Pierre Curie, choisit la radioactivité comme thèse de doctorat. Elle se demanda s'il existait d'autres éléments dans la nature qui pourraient engendrer de la radioactivité. Aidée par son mari, elle en découvrit d'autres : thorium, polonium et radium. Pour ces découvertes, Pierre et Marie Curie reçurent le Prix Nobel 1902 de physique conjointement à Becquerel.

Après plusieurs années de recherches sur les éléments radioactifs, on découvrit que ces derniers n'étaient pas stables : pour se stabiliser, ils se désintègrent (se "divisent") en émettant les rayonnements observés par Becquerel. Niels Bohr présenta en 1913 la première théorie qui expliquait ce phénomène : la matière est constituée d'atomes, formés d'électrons tournant autour d'un noyau.

La révolution d'Einstein

C'est en 1905 qu'Albert Einstein publia sa fameuse théorie de la relativité. Pour lui, la matière et l'énergie sont la même chose qui se présente sous forme différente. Il y a donc une équivalence entre matière et énergie, qu'il nota E = mc² (c² est une constante). Cette équation permet d'affirmer qu'une masse d'un kilogramme de matière peut se transformer en 25 milliards de kilowattheures, soit à peu près 10% de la consommation française d'énergie pendant un an ! Une petite quantité de matière peut donc devenir une énorme quantité d'énergie… ceci est le sinistre principe de la bombe atomique. Déjà en 1905, une
théorie prévoyait l'existence d'une énergie énorme située au cœur de l'atome. Elle livrait ainsi le secret du soleil : s'il brûlait réellement, comme beaucoup le pensaient, il se serait consumé depuis longtemps. Einstein montrait que de grandes quantités de lumière et de chaleur, c'est-à-dire d'énergie, peuvent être produits avec une infime quantité de matière.

La Première Guerre Mondiale ralentit considérablement tous les travaux scientifiques.

Toutefois, ceux-ci reprirent dans l'indifférence presque générale due à l'euphorie de la capitulation allemande. Ainsi, en 1919, on prouva l'exactitude de la théorie d'Einstein. Einstein devint une figure mondiale.

Radioactivité artificielle et Réaction en chaîne

1934 : Frédéric et Irène Joliot-Curie s'aperçurent que l'on pouvait transformer un élément stable en un autre instable, plus lourd, en le bombardant de particules : il s'agit de la radioactivité artificielle.

Quatre ans plus tard, en décembre 1938, Otto Hahn et Fritz Strassman (restés en Allemagne) comprennent que le noyau d'uranium, bombardé de neutrons, se casse en deux en libérant deux neutrons et une énergie considérable : l'énergie nucléaire.

En 1939, Frédéric Joliot et ses collaborateurs (Hans Halban et Lew Kovarski, en France), suivis d'une semaine par Enrico Fermi et Leo Szilard (aux Etats-Unis), comprennent que les neutrons libérés, dits secondaires, peuvent fracasser à leur tour d'autres atomes d'uranium : c'est une réaction en chaîne. Celle-ci peut donner naissance soit à une grande source d'énergie si elle est contrôlée (cent millions de fois celle d'une molécule de carburant), soit à la Bombe.

Ainsi, dès 1939, tous les éléments scientifiques préalables à la Bombe étaient découverts.

A gauche, Enrico Fermi, Italien réfugié à Chicago, fabriqua le plutonium de la bombe de Nagasaki.

A droite, Si le noyau d'un atome d'uranium (ou d'un autre élément fissile) reçoit un neutron supplémentaire (1), il se déforme (2),puis se fissionne, c'est-à-dire qu'il se casse en deux fragments (3). Il libère alors beaucoup d'énergie… et d'autres neutrons, qui vont à leur tour percuter d'autres noyaux.
D'où une réaction en chaîne (4) qui dégage une énergie énorme.



----------