ENCYCLOPEDIE -DE--LA--LANGUE -FRANCAISE
 
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ABEILLE

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LES ABEILLES ET LES HOMMES
( i )

-PREHISTOIRE --ANTIQUITE-

peintures PARIéTALES
et
DEBUTS DE L'APICULTURE

 
Timbre espagnol, du 28 avril 1975, illustrant le plus ancien témoignage de récolte humaine de miel.
 
Peinture rupestre de la Cueva de la Araña

 ("grotte de l'araignée") Valence, Espagne, -5000 av. J.-C.)
   



LA PREHISTOIRE

 

 
Il n'est pas possible de dire exactement quand l'homme s'est intéressé à ce que l'abeille récolte ou produit elle-même. Il est probable que, prenant modèle sur l'ours ou d'autres animaux friands de ce mets de choix (oiseaux, rongeurs, fourmis), l'homme a dû, depuis des temps préhistoriques reculés, utilisé au moins le miel et la cire des abeilles sauvages :

 
«...En 1867, dans un article pour les Annales des Sciences Naturelles, Jules-René Bourguignat apporta des preuves matérielles de la survivance jusqu'à l'époque romaine d'un ours de petite taille en Afrique du nord. (...) Bourguignat put constater que l'ours était bien connu dans la région, au point que le nouveau caïd des Zardeza, Si-Alid-Allah, rapporta à M. Prats, de Guelma, un dicton significatif en usage dans le pays, jusqu'aux environs de Jemmapes et de la Calle (confirmant ainsi les informations de Desfontaines) :"Le travail de l'ours réjouit le chasseur d'abeilles." L'animal n'était pas seulement connu par la tradition. Un vieil Arabe qui accompagnait Si-Alid-Allah donna à M. Prats d'intéressantes précisions sur ses mœurs, à l'évidence observées sur l'animal vivant :
 
"L'ours est très friand de miel ; lorsqu'il découvre un essaim dans le tronc d'un arbre, il y monte, brise l'écorce, enlève le bois, et se gorge de miel. Lorsqu'il s'en est bien repu, il s'éloigne, et le chasseur de miel, guidé par les traces et les débris de l'arbre, recueille facilement la cire que l'ours a dédaignée et le miel qu'il a laissé".»
 
extrait de : http://perso.orange.fr/cryptozoo/dossiers/ours_atlas.htm

Les premiers témoignages iconographiques, quant à eux, remontent au mésolithique (-12000 à - 6500) et on les trouve dans des contrées aussi diverses que l'Espagne, le Sahara, l'île de Bornéo, l'Australie, l'Inde (Singanpur, Bhimbetka) ou la Chine. Il semblerait que l'abeille et le chien ont été dès cette époque les premières conquêtes de l'homme.
 
L'Espagne compte, un nombre significatif de peintures pariétales (environ - 8000 à - 6000 avant notre ère), appartenant à ce qu'on appelle l'art du Levant (ou art levantin) et présentant, en particulier, des figurations d'abeilles, souvent accompagnées d'autres animaux :

 

 

a) La Vacada de Castellote (Teruel, Santolea)
b) Mas de Ramón d’en Berso
c) Polourin
d) Cingle dels Tolls del Puntal.
e) Galería del Roure
f) Eremita”del Barranc Fondo-Abril IV
g) Dos Aguas.
h) La Araña. Abri II.
i) Covetes del Puntal. Abri IV

En Indonésie, à Bornéo, les ancêtres des Papous ont aussi figuré des essaims d'abeilles, tout comme ceux des habitants d'Oman, au moyen de l'art pariétal. En Turquie, à Çatal Huyuk ("la colline de la fourchette", site archéologique ouvert en 1961 par J. Mellaart), les habitants des premières cités néolithiques ont figuré une ruche parmi leurs nombreuses fresques :

Peintures rupestres des grottes de Liang Karim, Kalimantan (Bornéo, Indonésie), vers -12/10000 ans.

Peinture rupestre à Dhofar, Sultanat d'Oman, sud de la péninsule arabique (date non précisée)

 
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Fresque représentant des alvéoles de ruche, avec empreintes de mains, figurations d'animaux et de fleurs. Vers - 6000. Çatal Hüyük, dans la plaine de Konya, en Anatolie centrale, Turquie, sur les bords de la rivière Çarsamba.

Le témoignage préhistorique le plus ancien d'une relation entre hommes et abeilles serait celui de Cueva de la Araña, en Espagne (voir en exergue), une peinture pariétale du néolithique où l'on voit une silhouette féminine en ramasseuse de miel, accrochée en haut d'un arbre d'une main, tenant de l'autre le panier tressé de fibres végétales qui conservera sa récolte. De tels témoignages archéologiques ont été aussi trouvés en Afrique du Sud, dans la chaîne montagneuse de Drakensberg (Montagne du Dragon en afrikaans), frontière naturelle entre la province sud-africaine de Kwazulu-Natal et le Lesotho.

 
1.
 
 
 
2.

 

 3.

 

Peintures rupestres illustrant la collecte du miel sauvage.

 1. Afrique du Sud vers - 3000/2000ans, par le peuple San, ancêtre des Bushmen.

- En haut, récolte à l'aide d'échelles, Anchor Shelter, Natal Drakensberg, tiré du livre "Ndedema" de Harald Pager, 1971), découverte de Lewis-Williams,(1981a)
- En bas, pratique de l'enfumage de l'essaim, au Zimbabwé (Toghwana, collines Matopo, anc. Rhodésie : voir carte), découverte de Thackeray (1983). vers - 3800/2400ans (Crane, 2001; Contessi, 2004).

2. Inde, peintures rupestres illustrant la collecte de miel sauvage d'abeilles Apis dorsata, aux environs de Bhopal, à Ganeshghati, vers - 600.
3. Inde, Mahadeo Hills, Jambudwip Sheleter, vers - 500, peintures rupestres illustrant la collecte de miel sauvage.
 
Il n'y a pas que les peintures pariétales qui témoignent de l'intérêt des hommes pour les abeilles, mais aussi d'autres domaines archéologiques. En effet, les hommes ont utilisé très tôt la cire d'abeille à des fins très différentes, mais les produits très volatils entrant dans la composition de la cire, en particulier, rendent les recherches difficiles, malgré les outils de plus en plus perfectionnés à la disposition des spécialistes.

Pendant la préhistoire, le miel et la cire d'abeille étaient conservés dans des pots en céramique (Regert et al., 1999)."La cire d'abeille est identifiée par la présence de constituants volatiles (n-alcanes, acides gras, alcools et esters de l'acide palmitique) mais aussi grâce à la caractérisation de composés non volatils (diesters, hydroxy-esters) par électronébullisation-spectrométrie de masse." extrait de : voir tableau ci-dessous

 

"Des « chasseurs de miel » au Néolithique ?

Le miel, la cire : ces produits issus de la ruche ont, semble-t-il, eu une place importante pour les hommes du Néolithique1. C'est en tout cas ce que suggèrent les résultats d'une équipe du Centre de recherche et de restauration des Musées de France (C2RMF). Installée dans l'enceinte du Palais du Louvre, cette équipe dirigée par Martine Regert cherche à identifier des substances naturelles organiques exploitées par le passé. Mais pas n'importe lesquelles. Sur les sites archéologiques, certaines comme le bois ou les graines sont assez directement identifiables. D'autres, les gommes, les résines ou la cire ne possèdent aucun caractère morphologique déterminant, de sorte que le seul moyen de les identifier est de remonter à leur composition chimique moléculaire. C'est là le travail des chimistes et des archéologues de l'équipe qui analysent deux types de vestiges néolithiques : les récipients en céramique dans lesquels on trouve des traces de ces matériaux organiques dans les restes alimentaires, et les outils en silex ou en os qui en conservent dans la colle qui a servi à les fabriquer. « Sur les sites néolithiques comme celui de Chalain dans le Jura, de Bercy, ou encore de Dikili Tash en Grèce, des dizaines de céramiques ont été retrouvées. Chaque fois, dans au moins deux ou trois d'entre elles, nous avons identifié de la cire d'abeille* », explique la chercheuse. Une présence telle qu'elle a conduit les scientifiques à s'interroger sur l'utilisation de cette cire à l'époque. Et leurs travaux apportent, à ce sujet, de nombreuses réponses. Elle servait de plastifiant dans les colles utilisées pour fabriquer les outils. Elle devait permettre d'imperméabiliser les récipients de céramique qui contenaient la nourriture. « Nous pensons aussi que ces restes peuvent être ceux de préparations culinaires à base de miel, car nous avons retrouvé de la cire mélangée à des graisses animales. Comme le miel ne se conserve pas, la cire témoigne peut-être simplement de l'utilisation de cet aliment sucré », commente Martine Regert. Enfin, la cire devait être employée pour la pharmacopée, l'éclairage, les activités artistiques, etc. Une multitude d'applications qui laisse penser que les produits de la ruche ont occupé une place très importante dans le quotidien des populations néolithiques. À tel point que les chercheurs imaginent que la récolte du miel était peut-être une activité spécialisée et largement répandue. À coté des agriculteurs et des éleveurs, sans doute existait-il des « chasseurs de miel »…

Stéphanie Belaud"

extrait de : http://www2.cnrs.fr/presse/journal/1486.htm

* Beaucoup de poteries néolithiques ont été retrouvées dans le monde avec des restes de cire, de miel ou de glucose, par exemple : Runnymede Bridge, à Surrey dans le sud-est de l'Angleterre datant de -3000-2650.

NDE : Des poteries exhumées dans le village de Jiahu, dans la province chinoise de Henan (Henon) ont révélé qu'une boisson fermentée avait été produite il y a 9000 ans à base de riz, de miel et de fruits :

On retrouvera cette boisson dans des liquides (vins fermentés de riz et de millet) extraordinairement préservés (à Anyang) pendant les ères Shang et Zhou occidentaux (-1250 - 1000) et ces découvertes ont indiqué l'importance sociale, religieuse et médicale des boissons fermentées dans la culture de la Chine ancienne, quand elles ont été rapprochées de leurs premiers témoignages écrits sous la dynastie Shang, sous formes d'oracles gravés sur des os ou des carapaces de tortue ( environ - 1750 - 1050), où le mot "miel" apparaît pour la première fois.

os de tortue de la dynastie Shang.

Entre - 1200 à notre ère, environ, des régions de Chine vont passer par d'une récolte sauvage de miel à une semi-apiculture en rationnalisant les cueillettes : bouchage partiel des nids par du fumier de bétail pour faciliter les récoltes, marquage des arbres pour identifier les sources de miel, par exemple. Cette évolution se poursuit sous les Han orientaux (vers 25 - 220), où des pionniers de l'apiculture coupe les branches où sont installés des nids d'abeilles Apis Cerana pour les installer sous les avant-toits de leurs demeures. Entre 200 et 500, les premières ruches en bois apparaissent et l'on pratique la récolte du miel et de la cire. Ces faits sont reportés par une des premières encyclopédies chinoises, le “Bowuzhi” (博物志, "Traité simple des Investigations des choses) de Zhang Hua (張華, entre 232 - et 300, dynastie Jin), mais aussi par le “Yongjia Dizhi” de Zheng Jizhi (420 - 479). Pendant la dynastie Jin (265 - 420), Huangfu Mi ( 皇甫謐, Huang Puming, 265- 282), auteur de Gaoshi zhuan (高士傳), relate qu'à l'époque des Han, un homme prénommé Jian enseigna l'apiculture à plus de 300 personnes, ce qui conduisit à la création d'au moins mille entreprises d'apiculture. Des observations apicoles apparaissent dans l'oeuvre d'un autre encyclopédiste, Guo Pu ( 郭璞, 276 - 324), dans son ouvrage Mifeng Fu, qui présente la division du travail chez les abeilles et conclut qu'elles sont des insectes sociaux.
 

" Petit historique des adhésifs préhistoriques

Tout au long du Néolithique* et des âges des métaux, les hommes préhistoriques ont essentiellement utilisé de l'écorce de bouleau pour obtenir une matière adhésive utilisée aussi bien emmancher les pointes de projectile sur leur hampe en bois que pour réparer des céramiques fissurées [ou imperméabiliser, NDE) . L'écorce blanche de bouleau se transforme en effet en un goudron végétal (le brai de bouleau) sous l'effet d'un chauffage contrôlé. Sur les sites néolithiques de Chalain toutefois, les populations ont utilisé d'autres écorces, de la résine de conifère ainsi que du bitume qu'ils obtenaient vraisemblablement par échange. A partir de l'âge du Fer*, la fabrication des adhésifs se complexifie et des substances naturelles telle que la cire d'abeille sont ajoutées au brai de bouleau pour obtenir une colle plus performante.D'un point de vue chimique, le brai de bouleau contient un ensemble de triterpènes de la famille des lupanes, tels que la lupénone, le lupéol et la bétuline. Au cours de la transformation de l'écorce en brai, une partie de ses constituants se déshydrate pour donner naissance à des hydrocarbures triterpéniques ou d'autres constituants de plus faible poids moléculaire que leurs précurseurs. Les résines de conifère, quant à elles, sont caractérisées grâce à la présence d'un ensemble de diterpènes de la famille de l'acide abiétique tandis que les matières bitumineuses sont riches en hydrocarbures.

L'altération de la cire d'abeille en contexte archéologique

Les matériaux organiques sont très sensibles aux processus chimiques et biochimiques d'altération. Aussi, la constitution de l'ensemble des résidus organiques découverts en contexte archéologique a toujours été fortement modifiée au cours du temps. Les caractérisation chimique des échantillons archéologiques repose donc systématiquement sur l'étude de substances naturelles actuelles qui sont soumises aux laboratoires à des processus de vieillissement accéléré. En ce qui concerne la cire d'abeille, l'analyse d'échantillons chauffés au laboratoire pendant plusieurs mois à différentes températures a permis de mettre en évidence les processus à l'origine de l'altération de ce matériau : les esters subissent des processus d'hydrolyse qui conduisent à libérer de l'acide palmitique et des alcools linéaires à longue chaîne hydrogéno-carbonée tandis que les n-alcanes sont naturellement sublimés en contexte chaud et sec et tendent donc à disparaître au cours du temps. Ces résultats permettent d'identifier de la cire d'abeille, présentant des profils d'altération différents, dans des contextes environnementaux variés."

extrait de : http://www.c2rmf.fr/pages/page_id18351_u1l2.htm

* Néolithique : pour la France, vers -6000 à - 2000

* Age du fer : vers - 800


 

 
"Dans un gisement sub-lacustre du néolithique suisse des restes d’un brouet ont été conservés. L’examen au microscope binoculaire des matières le composant a permis aux préhistoriens de refaire la recette. Elle se compose de 150 gr de lard, d’une queue de veau coupée en morceaux, de 500 gr de jarret de boeuf, de 150 gr de céleri, de 250 gr d’orge perlé, d’un litre et demi de bouillon de boeuf, d’un bouquet d’oseille, d’ail et de thym, d’une cuillerée à soupe de miel. Pour réaliser le brouet, les experts conseillent de procéder de la façon suivante: on fait fondre le lard; on y fait rissoler le boeuf et la queue de veau, puis le céleri; on ajoute l’orge perlé, le bouillon et le thym. On laisse mijoter pendant une heure trois quart et ajoute ensuite l’oseille, l’ail et le miel. On laisse cuire encore un peu."

extrait de : http://www.europatable.org/cours/Cours%20europe.pdf

 
sources textes :

- http://www.europatable.org/cours/Cours%20europe.pdf
 
 

sources images :

- http://www.petroglyphs.us/ST_06%20carved%20stone.jpg (pétroglyphe mojave)
- http://www.uned.es/geo-1-historia-antigua-universal/EGIPTO%20HISTORIA/CURRICULUM%
(peinture rupestre Cueva de la Araña)
- http://entomologia.rediris.es/aracnet/e2/11/08/images/fig003.htm (peintures rupestres Cueva de la Araña)
- http://www.iberianature.com/material/photos/beestamp.jpg (timbre espagnol, Cueva de la Araña)
- http://www.pacific-credo.fr/uploads/images/chazine/NGM1fr.pdf (peinture rupestre Bornéo)
- http://www.futura-sciences.com/comprendre/d/images/684/patrick_ird (récolte miel, Sénégal)
- http://www.rockart.wits.ac.za/origins/external_pages/publications/files/Lewis-Williams%20&%20
Dowson%201992.%20%20Art%20rupestre%20San%20et%20Paleolithique%20superieur.pdf (interprétation iconographique).
- http://www.pugetsoundbees.org/10-2002.pdf (peintures rupestres d'Afrique du Sud)
- http://www.rockart.wits.ac.za/origins/external_pages/publications/files/
Mguni-2004-Cultured%20Representation.pdf (carte afrique australe)
- http://www.nbka.co.uk/TheCraft.htm (inde, peinture rupestre singanpur)
- http://www.ars.usda.gov/research/publications/publications.htm?SEQ_NO_115=141014
- http://www.cartantica.it/pages/apiinarte.asp (peintures inde)
- http://www.lib.cuhk.edu.hk/uclib/bones/ob01.htm (os tortue)
- http://www.culturaapicola.com.ar/apuntes/informesinternacionales/12_evolucion_apicultura_china.pdf
- http://databaseworldkigo.blogspot.com/2008/10/winter-honey.html (Oman)
- http://andrewgough.co.uk/bee1_1.html (Çatal Hüyük)


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