ENCYCLOPEDIE -DE--LA--LANGUE -FRANCAISE
 
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ABEILLE

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LES DANSES (3)

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---COGNITION
COMPORTEMENTS
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AUTRES DANSES
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DANSES et COGNITION
 

 
En 1983, les chercheurs James Gould et Fred Dyer, de l'université de Princeton (New-Jersey), habituent une ruche à un environnement au bord d'un lac. Puis, il prélèvent sur la colonie quelques butineuses, qu'ils entraînent loin de la ruche et attirent vers un bateau sur le bord du lac, chargé de nectar.
1. James et Carol Gould, The Animal Mind
Chaque fois, ils capturent les abeilles après leur récolte de pollen, pour les empêcher de retourner à la ruche. Progressivement, les deux scientifiques éloignèrent le bateau du bord et, quand ils parvinrent au milieu du lac, ils laissèrent les butineuses revenir à la ruche informer leurs congénères de la source de nourriture. Les abeilles effectuèrent comme à l'habitude leurs danses pour recruter d'autres abeilles, mais cette fois, elles ne furent pas suivies, malgré les indications sans défaut de position ou de direction de la nourriture. Les deux hommes en conclurent que les abeilles trouvaient les danses erronées. Elles connaissaient à leur manière la topographie des lieux*, et à leur connaissance, aucune source de nourriture ne se trouvait à l'endroit indiqué. Les chercheurs vérifièrent cette hypothèse en déplaçant leur bateau sur la rive opposée du lac, près d'un champ abondamment fleuri et refirent la même expérience. Cette fois, les abeilles respectèrent les consignes des danses et traversèrent le lac en ligne droite, et il parut évident que, cette fois, les abeilles admirent que les informations des danses étaient correctes, puisque pointant vers une source connue d'elles, par une sorte de "carte mentale", a-t-on suggéré. Margaret Wray, de l'université Cornell (Ithaca, New-York), répéta l'expérience du lac à sa manière sans obtenir de résultats probants, mais les différentes sources olfactives utilisées par Wray ont été critiquées par Jürgen Tautz, puisqu'on soupçonne depuis longtemps que de puissantes pistes olfactives puissent influer sur la communication dansée des abeilles.

* Ce que confirme aussi les expériences de Dyer (1987, 1991). Par ailleurs, une expérience anglaise a montré des différences spécifiques à l'intérieur d'une même espèce dans l'appréhension de la reconnaissance des lieux, en l'occurrence entre ouvrières de différents bourdons (Bombus sp.).
(Goulson, Darvill, Ellis, Knight, Hanley, 2004)

En 1986, Gould confirma l'hypothèse de points de repère (landmarks) topographiques. Il habitua des abeilles à du nectar artificiel, progressivement éloigné de la ruche. Il marqua les abeilles visitant régulièrement le nourricier puis les plaça dans une jarre obscure et les replaça en un lieu d'où la ruche était encore visible, mais pas le nectar. Relâchées une à une, les abeilles furent désorientées quelques secondes puis volèrent directement vers leur repas. 73 des 75 abeilles joignirent leur objectif en 28 secondes environ. Gould en conclut qu'elles estimèrent la position du nectar par rapport à une carte mentale, basée sur des repères géographiques visibles.
Une expérience plus récente a confirmé une nouvelle fois ces hypothèses de points de repère dans le paysage visuel (De Marco et Menzel, 2005).

2.
   3.
2 et 3. Ruche mixte, Huajiachi Campus, Université de Zhejiang (Hangzhou, Chine), 2007
reine Apis cerana cerana (jaune), ouvrières Apis mellifera ligustica (rouge en 16, bleue en 17) et Apis cerana cerana (verte).

Dans un autre domaine, évoquons l'intelligence des abeilles, dont certaines expériences ont montré des facultés particulières d'apprentissage. Des expériences internationales ont été menées par les Docteurs Shenglu Chen, Songkun Su, Fang Cai, Aung Si, Shaowu Zhang du Collège des Sciences Animales de l'Université de Zhejiang, en Chine, par Aung Si, du Centre d'Excellence en Science de la Vision à l'Ecole de Recherche des Sciences Biologiques de Canberra (Research School of Biological Sciences, Australian National University) et le Dr Jürgen Tautz de l'université de Würzburg en Allemagne (2008). Elles ont démontré les capacités d'adaptation d'espèces d'abeilles mellifères à vivre ensemble (voir image 16 et 17), en particulier à chercher ensemble la nourriture, et les abeilles asiatiques (apis cerana) ont appris à suivre les danses des abeilles européennes (apis mellifera) et même à interpréter leurs codes. Ces expériences confirment que les races d'abeilles utilisent des "dialectes" différents pour exprimer leurs danses, particulièrement dans la durée de la danse frétillante.

 
COMPORTEMENT et COMMUNICATION
 

Orientation du corps

 
Plusieurs expériences montrent que les abeilles qui suivent une danseuse commencent à se placer au niveau de la tête et de son thorax, pour finir par l'abdomen (Tanner et Visscher, 2008; Rohrseitz et Tautz, 1999). Des contacts antennaires ont alors lieu, nous le savons depuis longtemps, mais de plus, diverses expériences donnaient à penser que l'orientation du corps des suiveuses affectaient l'interprétation, au cours des danses, de la localisation des ressources (Bozic and Valentincic, 1991; Judd,1995). Bozic et Valentincic rapportent par exemple que les abeilles situées sur le côté de la danseuse ("follow beside") demeurait plus longtemps en contact avec elle que celles situées derrière elle ("follow behind") et suggéraient que la direction de la nourriture était donnée par le contact antennaire. Inversement, Judd suggérait que les abeilles qui suivaient à l'arrière avaient seules les bonnes informations sur le même sujet. Par ailleurs, Judd notait que les abeilles proches de la danseuses recevaient une solution de sucrose de la part de la danseuse (fait depuis longtemps observé), et reporte surtout que seules les individus placés dans les 30' d'arc du milieu postérieur de l'abdomen étaient capables de localiser la nourriture. Les tenants de la théorie du "follow behind" sont nombreux et rapportent tous un phénomène vibratoire des ailes de la danseuse émis vers l'arrière de son abdomen (Michelsen et al., 1987,1992; Rohrseitz and Tautz, 1999; Kirchner1993; Michelsen, 2003). Une étude récente n'a pu partager ces deux théories, n'ayant constaté aucune différence significative de réussite dans la recherche de la nourriture (Tanner et Visscher, 2008). Ajoutons que ces contacts antennaires permettraient aux abeilles suiveuses de se diriger dans l'obscurité de la ruche grâce aux déplacements d'air dégagés par les frétillements d'ailes de la recruteuse (Kirchner, 1991).
 

Trophallaxie

 
Revenons un peu sur l'échange de nourriture, ou trophallaxie, pendant les danses. Ce phénomène est connu depuis longtemps (Ribbands, 1955; von Frisch,1967) mais n'est toujours pas connu de manière satisfaisante. Certaines abeilles (begging bees) recherchent un contact buccal de leur proboscis vers les mandibules de la danseuse et reçoivent parfois un échantillon de nourriture.
Depuis longtemps, il paraît évident aux chercheurs que les butineuses (au moins) se transmettent ainsi les odeurs de nourriture propre à leurs récoltes (von Frisch, 1968; Wenner and Wells, 1990; Kirchner and Grasser, 1998). Des expériences faites en 1998 à la Station Apicole de l'université de Würzburg ont montré que ces demandes concernaient aussi bien des abeilles qui suivaient la recruteuse que d'autres abeilles de la ruche (Bozic and Valentincic, 1991). Une recherche plus récente, effectuée en 2004*, a poussé un peu plus loin l'analyse. En voici un résumé :
 
"La trophallaxie dans le contexte de la danse : analyse comportementale et thermographique chez l’Abeille domestique (Apis mellifera). Lorsqu’une ouvrière butineuse revient à la ruche chargée de nectar, elle effectue souvent des manoeuvres
de danse et est alors suivie par un groupe d’ouvrières de la colonie. Au cours de la danse, certaines abeilles établissent à l’aide de leur proboscis un contact avec les mandibules de la danseuse. Si les suiveuses entrent en contact avec la nourriture sur les
pièces buccales de la danseuse, elles devraient obtenir plus d’informations sur la source de nectar exploitée que les suiveuses qui n’ont pas établi de tels contacts. Plusieurs évènements trophallactiques de différentes durées ont généralement lieu entre les butineuses de nectar qui entrent et leurs consoeurs, mais on ne sait pas à l’heure actuelle quelle proportion d’abeilles demandeuses reçoit réellement des échantillons de nourriture de la danseuse, ni combien durent ces contacts dans le contexte comportemental.
Nous avons combiné des enregistrements de comportement et de thermographie pour analyser le comportement trophallactique en prenant en compte le contexte d’échanges d’informations dans lequel ont lieu ces échanges, à savoir s’ils se manifestent ou non lorsque la danseuse est suivie. Grâce à des enregistrements thermographiques non invasifs il a été possible d’observer que le nectar tiède régurgité par les butineuses qui rentrent réchauffait brutalement le proboscis de la receveuse. Nous avons donc utilisé l’augmentation de la température du proboscis de la receveuse comme indicateur d’un transfert effectif de nourriture au cours du contact. Dans la majorité des cas observés les contacts sont brefs et sans passage de nourriture (51,3 %). Les suiveuses se sont engagées dans des contacts oraux courts et ont présenté une plus faible proportion de réception effective de nourriture (26 %) que les abeilles qui n’avaient pas suivi la danse. Ces résultats montrent que des contacts oraux entre danseuses et suiveuses ont souvent lieu, mais leur courte durée suggère que les suiveuses n’obtiennent que rarement des échantillons de nectar. Pourtant des contacts brefs pourraient permettre à des butineuses de nectar « au chômage » de goûter et/ou de sentir l’échantillon de nectar présent entre les mandibules de la danseuse. Ceci est très important pour des butineuses au chômage afin qu’elles obtiennent l’information pour décider de visiter une source donnée de nourriture.

extrait de :
http://www.apidologie.org/index.php?option=article&access=standard&Itemid=129&url=/articles/apido/pdf/2005/01/M4051.pdf

* parue en 2005. Les auteurs sont Walter M. FARINA, du Theodor-Boveri-Institut, Lehrstuhl für Verhaltensphysiologie und Soziobiologie der Universität Würzburg et Alejandro J. WAINSELBOIM, du Grupo de Estudios de Insectos Sociales, IFIBYNE-CONICET, Departamento de Fisiología, Biología Molecular y Celular, Facultad de Ciencias Exactas y Naturales, Universidad de Buenos Aires, Pabellón II, Ciudad
Universitaria, Buenos Aires, Argentina (auquel appartient aussi Farina).

Les vibrations du rayon

"Ces dernières années les fondations en plastique se sont largement répandues chez les apiculteurs, mais aucune étude n'a été faite pour savoir si elles gênaient le recrutement en réduisant la transmission des vibrations du rayon produites par les abeilles qui exécutent la danse frétillante. On sait que les danseuses se fient, au moins partiellement, aux vibrations du rayon pour communiquer les sources de nourriture, probablement parce que ces vibrations aident les abeilles à localiser les danseuses dans l'obscurité de la ruche. Nous avons étudié trois types de rayon : (i) rayon construit sur une fondation en cire d'abeilles fixée à un cadre en bois (BW), (ii) rayon construit sur une fondation en plastique fixée à un cadre en bois (PW), (iii) rayon construit sur une pièce unique fondation/ cadre en plastique (PP). Nous avons utilisé la vibrométrie laser pour comparer les trois types de rayons en termes de transmission des vibrations produites par les danses. Les rayons construits sur une fondation en plastique transmettaient mal les vibrations de 250 Hz. Par contre ceux construits sur une fondation en cire d'abeille les transmettaient très bien, en particulier lorsque le rayon était partiellement détaché du cadre en bois. Nous avons réalisé une étude comportementale pour comparer l'efficacité du recrutement (ER) des danses sur les différents types de rayons. L'ER a été mesurée en termes de nombre d'abeilles recrutées sur un nourrisseur à 350 m par un trajet frétillant produit pour le nourrisseur. Nous n'avons trouvé aucun effet. Les trois types de rayon ont donné la même valeur moyenne d'efficacité : environ 0,05 recrue par trajet frétillant. Quel que soit le type de rayon, l'ER différait notablement selon que c'était le premier, le second ou le troisième rayon utilisé dans la journée. Les danses exécutées en fin de journée avaient une plus grande efficacité que celles exécutées plus tôt. Nous suggérons que l'augmentation de l'efficacité au cours de la journée reflète une activation graduelle des butineuses de la colonie, si bien que les ouvrières sont plus nombreuses à suivre les danses plus tard dans la journée. Que nous n'ayons pas trouvé un effet du type de rayon sur l'ER peut être dû au fait que notre expérimentation a été réalisée en lumière du jour. Cela a pu aider les abeilles à trouver les danseuses en voyant leurs mouvements plutôt qu'en sentant leurs vibrations. Nous avons testé cette hypothèse en cherchant si les danses exécutées sur les rayons PW et PP, qui ont une faible transmission des vibrations de 250 Hz, voyaient leur efficacité diminuer lorsque le plancher des danses était assombri. Nous n'avons trouvé aucun signe montrant une réduction de l'ER. Nous en concluons que l'absence d'effet du type de rayon sur l'efficacité des danses est un résultat négatif vrai et non un faux. Il est clair qu'un rayon construit sur une fondation en plastique constitue un substrat tout à fait adapté à la communication par la danse frétillante."
 
SEELEY Thomas D. (1) ; REICH Adrian M. (1) ; TAUTZ Jürgen (2)
(1) Department of Neurobiology and Behavior (Neurobiologie et Comportement), Cornell University, Ithaca, Etats-Unis
(2) Groupe Abeille, Biocenter, Universität Würzburg

extrait de :
http://cat.inist.fr/?aModele=afficheN&cpsidt=17283080
 

AUTRES DANSES
 

Nous avons évoqué les danses relatives à la nourriture (danse en rond, en faucille, en huit ou frétillante, à l'essaimage (danse bourdonnante), mais l'abeille danse dans bien d'autres circonstances encore, qui n'ont pas été étudiées autant que les danses en rond et frétillantes. Cependant, l'ensemble des recherches tendent à montrer que toutes permettent d'émettre des signaux de vibration qui modulent de nombreuses activités de la ruche. Pour cette raison, ils sont aussi appelés "signaux de communication modulatrice". Ils concernent pour une grande part les activités de butinage et d'essaimage, sont adressés en direction des ouvrières de tous âges et provoquent généralement une locomotion et une activité accrue dans la colonie (Stanley S. Schneider, Lee A. Lewis,
Département de Biologie à l'Université de Caroline du Nord, Charlotte, USA, 2003)

La danse de vibrations ou DVAV (dorso-ventral-abdominal vibrations)

"Les danses de vibrations jouent également un rôle dans la régulation sociale. L’ouvrière
accomplit cette danse, en saisissant de ses pattes antérieures le corps d’une autre abeille
ou de la reine et en faisant vibrer son abdomen dorso-ventralement (Milum, 1955 ; Allen,
1959a,b). Ces danses augmentent l’efficacité du recrutement des ouvrières au butinage
(Schneider et al., 1986a, b). Par contre, des nourrices qui reçoivent les vibrations d’autres
individus passent plus de temps à nettoyer les cellules, à s’occuper du couvain et à
manipuler la nourriture (Schneider, 1987 ; Schneider et McNally, 1991). Enfin, ces danses
sont associées au vols d’orientation (Painter-kurt et Schneider, 1998). Les multiples rôles
de ces danses de vibrations montrent que ce système de communication joue un rôle
important dans la coordination des différents comportements de la colonie."

extrait de :
http://www.culturaapicola.com.ar/apuntes/criareinas/feromonas_regulacion_apis_tratado.pdf

Ces danses de vibration peuvent se produire des centaines de fois en une heure (Hammann, 1957; Fletcher, 1975) et permettent de réguler les activités de butinage et d'essaimage.

 
La danse bousculante (jostling run, jostling dance)

Les butineuses, suite à une récolte réussie, rentrent à la ruche en bousculant leurs congénères (Frisch, 1967; Winston, 1987), ce qui pourrait leur annoncer l'imminence des danses qui les conduiront à la nourriture. Chez les abeilles sans dard (Meliponini), ces mouvements de recrutement sont corrélées à la qualité des sources de nourriture mais ne sont pas des danses à part entière, ni n'annoncent de danses ultérieures (Barth, Hrncir, Jarau, 2008).

 
La danse spasmodique (spasmodic dance, jerk dance ?)

Exécutée par la butineuse pendant sa distribution de nourriture dans les cellules de la ruche, interrompue régulièrement par des mouvements frétillants et saccadés de l'abdomen (Frisch, 1967). Cette danse serait comme la précédente annonciatrice d'autres danses.

 
La danse secouante (shaking dance)

Von Frisch (1967) signale un type de danse où une ouvrière secoue rapidement son corps d'un côté à l'autre et d'avant en arrière, mais la plupart des chercheurs (Frisch y compris) décrivent le plus souvent cette danse comme un mouvement de haut en bas de l'abdomen, souvent à l'adresse de la reine (Hammann, 1957; Allen, 1959; Milum 1947, 1955 et Frisch, 1965 dans Heymer, 1977).
 
De nouveaux éléments de connaissance seront apportés par Schneider et se collaborateurs en 1986 et 1987 et confirmés pour une grande part par James C. Nieh (Universität Würzburg, Biozentrum) en 1998. La plupart des danseuses sont des butineuses qui lancent leurs signaux dans tous les endroits de la ruche, bien que la plupart des signaux soient produits au-dessus de la "piste" de danses frétillantes. Les receveuses se déplacent rapidement après réception du signal en changeant de direction. Les signaux sont non seulement adressés en masse avant la période matinale de butinage, mais aussi en fin d'après-midi, après cessation de cette activité, ce qui semblerait indiquer qu'elle entraîne les abeilles vers cette activité mais aussi les redirige vers d'autres tâches.
 
 
Cette danse a été très tôt décrite par Frisch (sous le nom de zittertanz, 1923, 1967), puis par Lindauer (1948), Schneider (1949, avec Lee A. Lewis : 2003, 2004), Schick (1953), etc. Elle resta un mystère pour von Frisch, qui finit par conclure "qu'elle ne disait rien aux autres abeilles". Pourtant, il partagea les observations d'autres chercheurs qui constatèrent la corrélation des danses avec des conditions problématiques des butineuses, comme, étonnamment, l'appauvrissement des sources de nourriture.
 
Plusieurs études ont depuis éclairé davantage ce phénomène, en particulier celles de Seeley (1987, 1992, 1996 avec Kühnholz et Weidenmüller, 1999), mais aussi Wolfang Kirchner (1993), James C. Nieh (1993), ou encore Otani Takeshi (2001), Arnold et al. (2002), Corinna Thom (2002).
L'abeille butineuse exécute cette danse durant 30 minutes environ, en secouant son corps d'avant en arrière, auquel elle impose, dans le même temps, une rotation de 50° par seconde environ, tout ceci en marchant lentement le long de l'aire réservée au couvain. En plus de communiquer un message chimique qui peut enjoindre des ouvrières à butiner (Thom, 2002), cette danse produit des vibrations (piping signal) appelé parfois chant ou sifflement de l'abeille, d'une fréquence oscillant de 45 à 350 Hz, chacune durant environ 142 millisecondes, qui font vibrer les rayons de la ruche (Kirchner, 1993). Quasiment tous les chants proviennent des danseuses (99 % selon Thom, 2002) mais toutes les danseuses ne le produisent pas (48 % selon Thom, 2002).
En général, la butineuse exécute cette danse de retour d'une source abondante de nectar et peinant beaucoup à trouver une ouvrière pour se charger de la récolte et l'emmagasiner (Seeley, 1992). Le message semble informer la colonie de l'inadéquation entre richesse de nourriture et capacité de la ruche à en profiter : Les ouvrières à l'intérieur du nid reçoivent ce message comme une incitation à cesser temporairement leurs activités pour suppléer au manque de magasinières, alors que celles qui sont à l'extérieur, en train de butiner, cessent leurs danses de recrutement (Nieh 1993, Kirchner 1993,Thom 2002).

 
La danse de toilettage (grooming dance)

Elle est pour la première fois rapportée en 1945 par le biologiste Mykola H. Hadak. Cette danse est effectuée par des ouvrières de tous âges, mais en majorité des jeunes abeilles de 2 jours environ, qui incitent d'autres abeilles (dites toiletteuses), de tous âges elles aussi (N. Hrassnigg, R. Brodschneider, U. Riessberger-Gallé, T. Schmickl, M. Danzer, A. Stabentheiner, K. Crailsheim, 2001, Institut für Zoologie an der Karl-Franzens-Universität Graz, Autriche).
 
Les danseuses agitent tout leur corps d'un côté à l'autre et le font vibrer à une fréquence oscillant entre 4.2 (± 0.2 Hz) et 9.3 (± 1.0 s). Elles alternent parfois signal vibratoire et auto-toilettage. Les ouvrières exécutant ces danses ont beaucoup plus de probabilité d'être rapidement pris en charge par une toiletteuse (Seeley, 2004).
 
Le toilettage permet en particulier d'éliminer des saletés, mais plus important encore pour la pérennité de la colonie, des parasites, surtout des acariens comme le varroa.
 
On distingue deux types de toilettage :
 
"- un comportement d'auto-nettoyage (auto-grooming behavior), c'est à dire un brossage
par l'abeille de sa tête, son thorax et son abdomen, à l'aide de ses première et troisième
paires de pattes.
- un comportement d'allo-nettoyage (allo-grooming behavior), c'est à dire un nettoyage
de l'abeille par ses congénères. Celles-ci recherchent activement l'acarien, en parcourant tout le corps de l'abeille infestée à l'aide de leurs antennes. Nos observations n'ont cependant jamais montré d'allo-nettoyage aussi intensif que dans le cas d'Apis cerana. Chez cette abeille, en effet, les abeilles montent sur l'abeille infestée, n'hésitent pas à lui écarter les ailes pour éventuellement attraper l'acarien dans leur mandibule. Dans nos expériences, les abeilles ont au mieux parcouru de leurs antennes le corps de l'abeille infestée, sans jamais attraper l'acarien déposé."

extrait de :
http://biomserv.univ-lyon1.fr/txtdoc/THESES/VANDAM/TheseVANR.pdf

"(...) Dans la colonie infestée à 50 % comparée à la colonie non infestée, les danses de toilettage ont augmenté significativement chez les abeilles âgées de un à cinq jours puis ont diminué, indiquant que le déplacement de l'acarien sur les jeunes abeilles peut déclencher la danse de toilettage. Dans la colonie infestée à 70 %, des groupes d'abeilles récemment écloses de quatre lignées paternelles uniques ont été marquées et leur comportement de toilettage a été observé durant 19 jours. Les abeilles ont présenté des différences significatives, en fonction de leur lignée paternelle, dans leur propension à danser ou à s'allotoiletter. Une lignée paternelle a rendu compte de 64 % de tout l'allotoilettage, une autre de 48 % de toutes les danses, tandis que les deux autres occupaient une position intermédiaire pour ces deux caractères. L'allotoilettage est lié à l'âge, la majeure partie (90 %) ayant lieu quand les abeilles ont entre 5 et 15 jours. Dans une quatrième expérience, des groupes d'abeilles récemment écloses issues de colonies de lignée paternelle unique ont été marqués et placés durant cinq jours dans des colonies infestées, réparties en quatre colonies parentales et quatre colonies d'observation. Sur les quatre colonies de lignée paternelle simple, l'une correspondait à des abeilles ayant un comportement d'allotoilettage élevé, une seconde à des abeilles ayant un comportement de danse élevé, les deux autres colonies ayant une position intermédiaire concernant ces deux caractères. La dissection des abeilles marquées a montré des différences cohérentes entre les quatre lignées parentales dans le niveau d'infestation. La lignée la plus sujette à l'allotoilettage était la plus sensible à l'infestation par l'acarien ; la lignée qui dansait le plus étant la moins sensible. Ceci peut être dû à la capacité de ces abeilles à détecter la présence de l'acarien sur leur corps et à l'éliminer par l'autotoilettage qui a lieu au cours de la danse. Ces expériences montrent que les abeilles qui ont une prédisposition génétique à effectuer des danses de toilettage sont susceptibles de détecter les acariens présents sur leurs corps et à s'en débarrasser. C'est la première fois que l'on propose un mécanisme de résistance de l'abeille mellifère à l'acarien des trachées."

Pettis J. S. et Pankiw T., Department of Biological Sciences, Simon Fraser University, Burnaby, Canada.
1998.

extrait de : http://cat.inist.fr/?aModele=afficheN&cpsidt=2231709


sources textes :

Éthologie d'Irenäus Eibl-Eibesfeldt, A. Lehmann (http://books.google.fr)
The Biology of the Honey Bee, Mark L. Winston (idem)
Animal Behavior Desk Reference, Edward M. Barrows (idem)
 
- http://ag.arizona.edu/pubs/insects/ahb/inf8.html
- http://bees.ucr.edu/dancelanguage.html
- http://bees.ucr.edu/reprints/eoi.pdf
- http://jeb.biologists.org/cgi/reprint/199/1/155
- http://tempsreel.nouvelobs.com/actualites/sciences/20050511.OBS6426/
- http://news.bbc.co.uk/2/hi/science/nature/4536127.stm
- http://www.biology.qmul.ac.uk/research/staff/chittka/2004/chittka_plos04.pdf
- http://www.bio.usyd.edu.au/Social_InsectsLab/GJT/publications_files/Oldroyd&Thompson2006.pdf
- http://www.beesource.com/pov/wenner/abjaug1999.htm
- http://www.ibiblio.org/pub/academic/agriculture/entomology/beekeeping/bee-l/log0106a.txt
- http://tecfa.unige.ch/tecfa/teaching/UVLibre/0001/bin35/abeilles/danse/danse.html
- http://neurophilosophy.wordpress.com/2007/01/22/like-ecstasy-for-the-honey-bee/
- http://www.nytimes.com/2009/01/06/science/06bees.html
- http://www.inra.fr/internet/Hebergement/OPIE-Insectes/pdf/i123dupuy-maury.pdf
- http://jeb.biologists.org/cgi/reprint/208/20/i.pdf
- http://www.nationmaster.com/encyclopedia/Bee-learning-and-communication
- http://membres.lycos.fr/teslabel/vecteur.htm#biblio36
- http://prizedwriting.ucdavis.edu/past/1995-1996/lewis.html
- http://www.catoire-fantasque.be/Ruches/abeille-communication-visible.html
- http://www.springerlink.com/content/nbqq57wvhfej87hn/
- http://resources.metapress.com/pdf-preview.axd?code=q388lt1724xj8205&size=largest
- http://cat.inist.fr/?aModele=afficheN&cpsidt=4461080
- http://www.opus-bayern.de/uni-wuerzburg/biblio.php?source_opus=360&export=ris
- http://www.apidologie.org/index.php?option=article&access=standard&Itemid=129&url=/articles/apido/pdf/2001/05/abstracts-author.pdf
- http://www.ingentaconnect.com/content/bsc/eth/2004/00000110/00000001/art00001
 

sources images non citées :

- http://tecfa.unige.ch/tecfa/teaching/UVLibre/0001/bin35/abeilles/danse/danse.html (angle dans la danse frétillante, robot)
- http://users.rcn.com/jkimball.ma.ultranet/BiologyPages/B/BeeDances.html (test de comportement, Srinivasan 1997)
- http://www.sps.uq.edu.au/documents/BrisScience/Srinivasan_pres.pdf (tunnel)
- http://jeb.biologists.org/cgi/reprint/199/1/155 (schéma Esch)
- http://www.academie-agriculture.fr/mediatheque/seances/2005/20050216presentation1_integral.pdf
(expérience tunnel Esch 2001)
- http://www.bbsrc.ac.uk/images/mediareleases/050511_radar_bee.jpg (radar)
- http://www.biology.qmul.ac.uk/research/staff/chittka/2004/chittka_plos04.pdf (récepteur du vert)
- http://neurophilosophy.wordpress.com/2007/01/22/like-ecstasy-for-the-honey-bee/ (danses frétillantes)
- http://www.nytimes.com/2009/01/06/science/06bees.html (cocaïne)
- http://users.rcn.com/jkimball.ma.ultranet/BiologyPages/B/BeeDances.html (Australian National University, Srinivasan, tunnel)
 

 

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