ENCYCLOPEDIE --UNIVERSELLE--- DE--LA-- LANGUE -FRANCAISE
Abjuration
- . ABJURATION . n.f.
- Du pr�fixe latin ab, qui indique l'�loignement, et jurare, faire un serment, jurer.
Introduction
- Le sens premier du verbe latin abjurare est "nier sous serment". Le mot fran�ais, � sa naissance, vers 1327, d�signera en premier lieu le rejet, par serment de l'autorit� de quelqu'un, en particulier celles des princes. Il ne reviendra aux sources que vers 1611, pour d�signer le renononcement par serment � quelque chose.
- On trouve la notion d'abjuration (abjuratio) chez de nombreux auteurs latins, par exemple Plaute (Rudens 14 ds TLL s.v., 102, 16) Virgile ou encore Cic�ron. Les Anciens donnaient donc � ce terme une port�e tr�s g�n�rale, puisque le serment pouvait �tre de tout ordre. Partant, le sens religieux moderne, qui d�signe l'acte de renonciation � une religion existait donc d�j� � Rome parmi de multiples n�gations de serment, et on en trouve une des premi�res mentions chez Ambroise (IVe si�cle, De Jacob et vita beata) et il est usit�, toujours en latin, tout au long de la p�riode m�di�vale. Bien entendu, cet acte d'apostasie (du grec ancien ἀπόστασις , apostasis : se tenir loin
- de) ne date pas, loin s'en faut, des Romains.
- ARTICLE DE L'ENCYCLOPEDIE BERTHELOT
- ABJURATION. I. L'abjuration est un acte solennel par lequel on r�pudie, pour en embrasser une autre, la religion jusqu'alors pratiqu�e. Dans la langue usuelle, ce mot signifie plus particuli�rement le passage d'une religion quelconque � la religion catholique. Parmi les abjurations c�l�bres dont l'histoire nous a gard� le souvenir, il faut citer en premi�re ligne* celle d'Henri lV (23 juillet 1593), On conna�t les raisons d'Etat qui amen�rent le B�arnais � abandonner la religion r�form�e � Je me suis trouv�, disait-il � Mornay, sur les bords d'un pr�cipice; le complot des miens me poussait, et les r�form�s ne m'appuyaient pas. Je n'ai pas trouv� d'autre �chappatoire. La c�r�monie ne se passa du reste pas sans plaisanteries et brocards de la part du n�ophyte. A l'article des pri�res des morts, il s'�cria � Parlons d'autre chose, point n'ai envie de mourir. Pour le purgatoire, j'y croirai, parce que l'Eglise y croit et que
je suis fils de l'Eglise, et aussi pour vous faire plaisir; car c'est le meilleur de vos revenus. H pr�ta sans sourciller, dit Michelet, le serment d'exterminer les h�r�tiques. Citons aussi les abjurations de Christine, reine de Su�de, � Inspr�ck (1655), de Turenne (1688), d'Auguste II, �lecteur de Saxe, puis roi de Pologne (1706) et, enfin, celle de Bernadotte, prince royal de Su�de (1810). II. On donnait aussi le nom d'abjuration au serment solennel par lequel un Anglais s'engageait � ne jamais reconna�tre aucune autorit� au pr�tendant.- L'abjuration �tait encore une sorte de compromis pass� en Angleterre entre le criminel et la justice s�culi�re. Quand le coupable, fuyant et poursuivi, pouvait, au moment d'�tre atteint, se r�lugier dans un asile, l'autorit� de la loi expirait sur le seuil. On exigeait alors de lui, sous le nom d'abjuration [abjuratio regni, NDE], un serment par lequel il promettait de sortir du royaume pour toujours. Le prononc� de ce serment le faisait inviolable, et il pouvait quitter l'asile sans crainte d'�tre inqui�t�. On devait m�me lui fournir alors les moyens de passer sur le continent (V. Asile [droit d']).
- * NDE : Etonnamment, la Berthelot ne traite pas de l'abjuration dans le cadre de l'h�r�sie, que nous verrons plus loin.
- ABJURATION DE PARENT�. L'abjuration de parent� �tait une proc�dure solennelle organis�e par la loi salique (titre lxiii, �d. Pardessus, p. 318) et qui permettait � une personne de sortir de sa famille. Cette personne �tait ainsi d�gag�e de tous ses devoirs, mais perdait en m�me
temps tous ses droits. Celui qui voulait sortir de sa famille se rendait � l'assembl�e judiciaire du centenier (tungenus) et il rompait au-dessus de sa t�te quatre rameaux d'aulne. En m�me temps il d�clarait qu'il se retirait de juramento, de hereditate et de tota illorum ratione. La renonciation au serment est entendue par les uns en ce sens que l� renon�ant relevait ses parents et �tait de son c�t� relev� vis-�-vis d'eux de l'obligation d'�tre
cojureur en justice d'autres pensent qu'il s'agit d'un reste de paganisme qui donnait un caract�re religieux aux liens de la famille. Mais cette derni�re interpr�tation a le tort d'attribuer � cette expression un sens qui ne comporte plus d'applications pratiques depuis la conversion des Francs au
christianisme. Celui qui abandonne sa famille ne saurait h�riter de ses parents, car ils sont devenus pour lui de v�ritables �trangers et de son c�t� il n'a pas d'autres h�ritiers que ses descendants; � leur d�faut, ses biens vont au fisc, comme aussi sa composition. Cette abjuration de la parent� devait �tre tr�s grave pour celui qui s'y d�cidait elle le privait de tout appui et, dans une soci�t� o� la force jouait un si grand r�le, celui qui avait abjur� sa parent� devait �tre plac� dans une situation aussi malheureuse que celle de l'homme mis hors la loi. Il semble d'ailleurs que cette proc�dure soit tomb�e de bonne heure
en d�su�tude; ce qui est certain, c'est qu'elle est omise par la loi des Ripuaires. On en d�couvre cependant encore quelques traces beaucoup plus tard, en plein moyen �ge, dans les jurisconsultes anglo-normands (V. par exemple Glanville, De legibus, livre Vil, cap. m, � 8). Il semble bien que la proc�dure de la chrenecruda ne soit qu'une application sp�ciale de cette abjuration de la parent�.
- Cette seconde proc�dure suppose un d�biteur tenu d'une composition (V. ce mot) qui, ne pouvant acquitter sa dette, abandonne tout � ses cr�anciers (V. Loi SALIQUE, titre lxi, �dition Pardessus, p. 317). Le d�biteur jure alors qu'il n'a plus rien 12 cojureurs confirment son serment apr�s quoi il ramasse de la terre aux quatre coins de sa demeure et la jette par-dessus son �paule sur ses plus proches parents, le visage tourn� vers l'int�rieur de sa maison. Par ce symbole il les charge de payer sa dette, puis il franchit la haie, en chemise, les pieds nus, et part un b�ton � la main sans regarder derri�re lui. Les
parents ainsi d�sign�s sont charg�s solidairement du paiement de la dette. Cette proc�dure fut abolie par un �dit de Childebert II en 595. Aux termes de cet �dit (chap. vi) le meurtrier doit d�sormais seul payer ta composition de son crime et ses parents ne sont plus tenus d'y pourvoir. Malgr� cette suppression, la proc�dure de la chrenecruda a �t� ins�r�e dans presque toutes les r�dactions de la loi salique, m�me dans celle de Charlemagne.
- BIBL. PARDESSUS, Loi salique, 12- dissertation, p. 662. Sohm, la Proc�dure de la Lex Salica, traduit par Marcel Th�venin 13� fascicule de la Biblioth�que des hautes �tudes. Laferbi�ke, Histoire du droit fran�ais; t. III, p. iT4. Glasson, Observations sur la famille et la propri�t� chez les Germains; Orl�ans, 1885. Zœpfl, Deutsche Rechtsgeschichte;Brtm5-wick, 1872, 4� �dit., t. I, p. 392. Grimm, Pr�face sur Merhel /Droit salique), p. 9. Fustel de Coulanges, Recherches sur quelques probl�mes d'histoire Paris, 1885, in-8, p. 243, texte et note.
" Abjuration sub pena nubendi
La doctrine du libre choix est l'une des innovations fondamentales de la l�gislation matrimoniale dans le droit canonique m�di�val. Selon cette doctrine, �tablie par le pape Alexandre III dans la deuxi�me moiti� du XII si�cle, la validit� d'un mariage ne d�pendait que de l'accord librement exprim� des deux parties. Un mariage pouvait alors �tre formul� de deux mani�res. Soit par un accord imm�diat, verba de presenti, par lequel une union indissoluble �tait cr��e, soit par un accord � l'avenir, verba de futuro, qui n'�tait en lui-m�me qu'une pr�vision d'engagement, susceptible d'�tre rompu par l'accord des deux parties ou par un mariage ult�rieur par verba de presenti. Si, cependant, les verba de futuro �taient suivis d'un rapport sexuel, ils se transformaient automatiquement en un mariage valide.
Avec le d�veloppement du droit canonique au xir si�cle, la comp�tence juridique de l'�glise s'�tait �tendue � toutes les questions se rapportant aux comportements sexuels. Toute relation charnelle en dehors du mariage pouvait alors faire l'objet de poursuites. Les sanctions ne s'appliquaient pas seulement aux relations �ph�m�res ou de rencontre, mais aussi aux relations stables et � long terme. Les plus communes d'entre elles consistaient en amendes. Dans les cas de relations stables, il �tait assez courant que le couple soit forc� de renoncer � tout commerce charnel sous peine d'une somme d'argent. Il arrivait aussi que la cour demande au couple de renoncer l'un � l'autre sub pena nubendi, ce qui signifiait, pour l'homme et pour la femme, que tout rapport sexuel futur entre eux, ou m�me sa suspicion, cr�ait un mariage valide, donc indissoluble.
L'abjuration sub pena nubendi est apparue localement au d�but du XIIIe si�cle. Elle est ensuite mentionn�e dans des statuts synodaux d'Allemagne, de France et d'Angleterre. Cependant, il semble impossible de trouver la source th�orique de cette pratique, que ce soit dans les textes canoniques fondamentaux ou dans les �crits des commentateurs. Sa constitution et son application ont, par ailleurs, peu int�ress� les historiens. On ne trouve � son propos que quelques r�f�rences.
L'abjuration sub pena nubendi
L'abjuration sub pena nubendi s'est d�velopp�e comme un moyen de limiter les rapports sexuels illicites en les transformant en mariages l�gaux. Elle correspond � une contrainte et de fait contredit le principe du libre choix. Elle am�ne en cons�quence la question : comment les tribunaux eccl�siastiques ont-ils pu utiliser le mariage comme sanction p�nale si, selon les lois �tablies par l'�glise elle-m�me, il ne devait d�pendre que du libre consentement des parties ? D�s l'apparition de cette pratique, la contradiction est per�ue par nombre de clercs qui la contestent. Une glose portant sur un statut synodal (Exeter II, 1287) d�clare : � Notez que cette disposition est contraire au droit et � l'�quit� naturelle, parce que de iure mariages et fian�ailles doivent �tre libres �. Des objections sont aussi soulev�es lors des jugements. Richard Helm- holz note plusieurs cas o� le pr�venu fait valoir qu'un mariage cons�cutif � une abjuration est invalide parce que contraint.
(...) La constitution d'abjuration sub pena nubendi s'est d�velopp�e pour lutter contre la pratique tr�s r�pandue du concubinage en la transformant en mariage. Mais son principe n'�tait pas compatible avec la doctrine du libre choix. Cela ne signifie pas n�cessairement que les juges, dans l'usage r�el de l'abjuration sub pena nubendi, aient �t� indiff�rents � la doctrine du libre choix, qu'ils respectaient en d'autres occasions. Je crois que l'emploi, apparemment al�atoire, de l'abjuration sub pena nubendi, que plusieurs chercheurs ont not� pourrait s'expliquer par le fait que la cour ne l'employait que quand les deux pr�venus �taient plus ou moins d'accord pour se marier. La pratique d'abjuration sub pena nubendi pourrait ainsi �tre d�crite comme un compromis pragmatique entre la volont� de transformer le concubinage en mariage et la doctrine du libre choix comme seul fondement du mariage.
- Cette pratique a peu � peu disparu au xve si�cle. Selon Richard Helmholtz, sa disparition est due � � une maturation de la r�flexion de l'�glise sur la nature du mariage �37. Suivant mon hypoth�se, les off�cialit�s n'ont recouru � l'abjuration sub pena nubendi que dans les cas o� le couple n'�tait pas vraiment oppos� au mariage, et la disparition de cet usage pourrait s'expliquer autrement : avec l'�volution des mœurs, en grande partie due � l'influence de l'�glise, le mariage est devenu la norme, et les couples qui, au XIVe si�cle, avaient pu �tre concern�s par l'abjuration sub pena nubendi �taient, au XVe si�cle, normalement d�j� mari�s. La disparition de la pratique d'abjuration sub pena nubendi s'expliquerait alors par un changement d'attitude des la�cs � l'�gard du mariage, plut�t que par une �volution � l'int�rieur de l'�glise." "
- Extrait de :
- Mariage consenti et mariage contraint : l'abjuration sub pena nubendi � l'Officialit� de Cerisy, 1314-1346
- Charlotte Christensen-Nugues, revue M�di�vales, 2001, Volume 20 http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/medi_0751-2708_2001_num_20_40_1514#
- RELIGIONS ET ABJURATION
- L'origine de l'abjuration religieuse se confond tr�s probablement avec celle des religions.
- Zoroastre (Zarathushtra, Zarathoustra), au VIIe si�cle avant notre �re, l'aurait d�j� consid�r� comme un des pires crimes. Par ailleurs, bien avant l'islam, la religion juda�que la consid�rait d�j� comme un crime abominable, passible des ch�timents les plus extr�mes, le livre biblique du Deut�ronome est sans appel et il est, par les formes et les m�thodes requises, un lointain �cho de ce que sera l'inquisition chr�tienne (voir plus bas) :
- 13.6 Si ton fr�re, fils de ta m�re, ou ton fils, ou ta fille, ou la femme qui repose sur ton sein, ou ton ami que tu aimes comme toi-m�me, t'incite secr�tement en disant: Allons, et servons d'autres dieux! -des dieux que ni toi ni tes p�res n'avez connus,
- 13.7 d'entre les dieux des peuples qui vous entourent, pr�s de toi ou loin de toi, d'une extr�mit� de la terre � l'autre
- 13.8 tu n'y consentiras pas, et tu ne l'�couteras pas; tu ne jetteras pas sur lui un regard de piti�, tu ne l'�pargneras pas, et tu ne le couvriras pas.
- 13.9 Mais tu le feras mourir; ta main se l�vera la premi�re sur lui pour le mettre � mort, et la main de tout le peuple ensuite;
- 13.10 tu le lapideras, et il mourra, parce qu'il a cherch� � te d�tourner de l'�ternel, ton Dieu, qui t'a fait sortir du pays d'�gypte, de la maison de servitude.
- 13.11 Il en sera ainsi, afin que tout Isra�l entende et craigne, et que l'on ne commette plus un acte aussi criminel au milieu de toi.
- 13.12 Si tu entends dire au sujet de l'une des villes que t'a donn�es pour demeure l'�ternel, ton Dieu:
- 13.13 Des gens pervers sont sortis du milieu de toi, et ont s�duit les habitants de leur ville en disant: Allons, et servons d'autres dieux! des dieux que tu ne connais point
- 13.14 tu feras des recherches, tu examineras, tu interrogeras avec soin. La chose est-elle vraie, le fait est-il �tabli, cette abomination a-t-elle �t� commise au milieu de toi,
- 13.15 alors tu frapperas du tranchant de l'�p�e les habitants de cette ville, tu la d�voueras par interdit avec tout ce qui s'y trouvera, et tu en passeras le b�tail au fil de l'�p�e.
- 13.16 Tu amasseras tout le butin au milieu de la place, et tu br�leras enti�rement au feu la ville avec tout son butin, devant l'�ternel, ton Dieu: elle sera pour toujours un monceau de ruines, elle ne sera jamais reb�tie.
- (...)
- 17.2 Il se trouvera peut-�tre au milieu de toi dans l'une des villes que l'�ternel, ton Dieu, te donne, un homme ou une femme faisant ce qui est mal aux yeux de l'�ternel, ton Dieu, et transgressant son alliance;
- 17.3 allant apr�s d'autres dieux pour les servir et se prosterner devant eux, apr�s le soleil, la lune, ou toute l'arm�e des cieux. Ce n'est point l� ce que j'ai command�.
- 17.4 D�s que tu en auras connaissance, d�s que tu l'auras appris, tu feras avec soin des recherches. La chose est-elle vraie, le fait est-il �tabli, cette abomination a-t-elle �t� commise en Isra�l,
- 17.5 alors tu feras venir � tes portes l'homme ou la femme qui sera coupable de cette mauvaise action, et tu lapideras ou puniras de mort cet homme ou cette femme.
- 17.6 Celui qui m�rite la mort sera ex�cut� sur la d�position de deux ou de trois t�moins; il ne sera pas mis � mort sur la d�position d'un seul t�moin.
- 17.7 La main des t�moins se l�vera la premi�re sur lui pour le faire mourir, et la main de tout le peuple ensuite. Tu �teras ainsi le mal du milieu de toi.
- Livre du Deut�ronome, chapitre 17, versets 2 � 6, traduction Louis Segond, 1910.
- Avant l'islam encore, bien avant l'inquisition (voir plus bas) aussi, et dans un rapport de forces invers�, la pers�cution des chr�tiens par les pa�ens passait par la torture, autoris�e par le droit romain pour obtenir des aveux et, autant que possible, l'abjuration. Les principales tortures autoris�es �taient la flagellation, le chevalet, les chaises ou les ongles de fer, l'exposition au fer rougi, mais l'imagination des bourreaux, de tous les temps, est sans limite : Le gouverneur de Sicile Quintien, par exemple, avait �t� subjugu� par la beaut� d'Agathe († 251), qu'il voulait forcer � abjurer pour pouvoir l'�pouser. Ne parvenant � rien malgr� des s�ances de chevalet, il tra�na son corps sur des pots cass�s m�l�s � des charbons ardents, o� la vierge finit par laisser la vie. Mais on pouvait aussi abjurer par conviction. Un exemple c�l�bre est celui de l'empereur Flavius Claudius Julianus (331 ou 332 - 26 juin 363), dit Julien l'Apostat, qui renon�a au christianisme en 354 apr�s avoir subi divers enseignements sur le culte de Mithra, et peut-�tre initi� aux myst�res d'Eleusis. Les princes M�rovinens abjureront parfois d'eux-m�mes, mais en poursuivant des buts pas forc�ment tr�s catholiques (Sigismond de Burgondie, Clovis, etc.). La confiscation des biens, l'exil frappaient d�j� les accus�s sous Th�odose (Ve si�cle) bien avant d'�tre r�employ�s par leurs ennemis � nouveau : ces pratiques sont en effet recommand�es par le concile de Latran en 1215. Les premiers chr�tiens ne se d�tournaient pas seulement du paganisme, mais aussi du juda�sme, dont saint Paul, par exemple �tait issu, et qui continuait (voir plus haut) � cette �poque d'abominer l'apostasie :
- 17 A notre arriv�e � J�rusalem, les fr�res nous firent tr�s bon accueil.
18 Le lendemain, Paul allait avec nous chez Jacques, o� tous les Anciens vinrent �galement.
19 Il les salua, et leur expliquait en d�tail ce que Dieu avait fait chez les pa�ens par son minist�re.
20 L'ayant �cout�, ils glorifiaient Dieu, et ils lui dirent : � Tu vois, fr�re, combien de dizaines de milliers de Juifs sont devenus croyants, et ils ont tous une ardeur jalouse pour la Loi.
21 Or voici les bruits qu'ils ont entendus � ton sujet : chez les Juifs qui vivent en pays pa�en, tu enseignerais la d�fection � l'�gard de Mo�se, en leur disant de ne pas soumettre les enfants � la circoncision et de ne pas vivre selon les coutumes.
22 Que faut-il donc faire ? De toute fa�on, ils apprendront ton arriv�e.
23 Fais donc ce que nous allons te dire. Nous avons ici quatre hommes qui sont tenus par un voeu.
24 Prends-les avec toi, accomplis la purification en m�me temps qu'eux, et paie ce qu'il faut pour qu'ils se fassent raser la t�te. Alors tout le monde saura qu'il n'y a rien de vrai dans les bruits qui courent sur toi, mais que dans toute ta conduite tu observes la Loi.
25 Quant aux pa�ens qui sont devenus croyants, nous leur avons �crit nos d�cisions : ils doivent se garder des aliments offerts aux idoles, du sang, de la viande non-saign�e, et des unions ill�gitimes. �
26 Alors Paul, le lendemain, prit ces hommes avec lui, accomplit la purification en m�me temps qu'eux, et il allait au Temple pour faire savoir � quelle date, le temps de la purification �tant achev�, l'offrande serait pr�sent�e pour chacun d'eux.
27 Les sept jours allaient s'achever, quand les Juifs venus de la province d'Asie, voyant Paul dans le Temple, sem�rent le d�sordre dans toute la foule et mirent la main sur lui,
28 en s'�criant : � Hommes d'Isra�l, au secours ! Voil� l'homme qui r�pand partout, aupr�s de tout le monde, son enseignement contre le peuple, contre la Loi, contre ce Lieu saint ! Et encore, il a fait entrer des Grecs dans le Temple, il a souill� ce Lieu saint ! �
29 En effet, ils avaient vu auparavant Trophime d'�ph�se dans la ville avec lui, et ils pensaient que Paul l'avait fait entrer dans le Temple.
30 La ville tout enti�re s'agita, le peuple accourut de toutes parts, on se saisit de Paul et on l'entra�na hors du Temple, dont on ferma aussit�t les portes.
31 Tandis qu'on cherchait � le tuer, le commandant de la cohorte romaine fut inform� que tout J�rusalem �tait en plein d�sordre.
32 Il prit imm�diatement avec lui des soldats et des centurions, et se pr�cipita vers les manifestants. Ceux-ci, voyant le commandant et les soldats, cess�rent de frapper Paul.
33 Alors le commandant, s'approchant, se saisit de lui et ordonna de l'attacher avec deux cha�nes ; et il demandait qui c'�tait et ce qu'il avait fait.
34 Dans la foule tous criaient des choses diff�rentes. N'arrivant pas � savoir quoi que ce soit de pr�cis � cause du tumulte, il le fit emmener � la forteresse.
35 En arrivant � l'escalier, on dut le faire porter par les soldats � cause de la violence de la foule,
36 car le peuple le suivait en masse en criant : � Mort � cet homme !
- Actes 21, v. 17 � 36
- extrait de : http://www.aelf.org/bible-liturgie/Ac/Livre+des+Actes+des+Ap%C3%B4tres/chapitre/21
- Le bapt�me des premiers chr�tiens s'accompagnait, entre autres, d'une abjuratio � la pompa diaboli, au cort�ge du diable, donc � sa souverainet� et � ses multiples repr�sentations (jeux du cirque, faux dieux, impudicit�, etc.). Quand le christianisme sera triomphant, il r�clamera � son tour aux croyants des autres religions ou aux chr�tiens pr�nant des id�es h�r�tiques, contraires aux dogmes de l'Eglise (tel Galil�e), d'abjurer pour la foi chr�tienne, utilisant � leur tour toutes sortes de persusasions, tortures comprises, parfois jusqu'� la mort.
- La notion d'abjuration de religion a pris une ampleur particuli�re au sein de l'�glise catholique, � cause de l'inquisition (nous le verrons plus loin), mais elle concerne, nous l'avons vu, d'autres religions, en particulier l'islam, o� elle est appel�e ridda, ردّة : : abjuration, apostasie, d'autant plus qu'elle continue d'�tre vivement combattue dans la plus grande partie de
- l'espace musulman. A la source de l'islam, Le Coran, comme la Bible, d�nonce et rejette clairement les apostats :
- Sourate 5, 5 :
- "Et quiconque abjure la foi, alors vaine devient son action, et il sera dans l’au-del�, du nombre des perdants."
- Sourate 3, 86-91 :
- 86. Comment Allah guiderait-Il des gens qui n'ont plus la foi apr�s avoir cru et t�moign� que le Messager est v�ridique, et apr�s que les preuves leur sont venues? Allah ne guide pas les gens injustes.
- 87. Ceux l�, leur r�tribution sera qu'ils auront sur eux la mal�diction d'Allah, des Anges et de tous les �tres humains.
- 88. Ils y demeureront �ternellement. Le ch�timent ne leur sera pas all�g�, et ils n'auront aucun r�pit,
- 89. except� ceux qui par la suite se repentiront et se r�formeront : car Allah est certes Pardonneur et Mis�ricordieux.
- 90. En v�rit�, ceux qui ne croient plus apr�s avoir eu la foi, et laissent augmenter encore leur m�cr�ance, leur repentir ne sera jamais accept�. Ceux l� sont vraiment les �gar�s.
- 91. Ceux qui ne croient pas et qui meurent m�cr�ants, il ne sera jamais accept� d'aucun d'eux de se racheter m�me si pour cela il (donnait) le contenu, en or, de la terre. Ils auront un ch�timent douloureux, et ils n'auront point de secoureurs."
"Sourate 4, 86-91 :
- 115. Et quiconque fait scission d'avec le Messager, apr�s que le droit chemin lui est apparu et suit un sentier autre que celui des croyants, alors Nous le laisserons comme il s'est d�tourn�, et le br�lerons dans l'Enfer. Et quelle mauvaise destination!
- (...)
- 137. Ceux qui ont cru, puis sont devenus m�cr�ants, puis ont cru de nouveau, ensuite sont redevenus m�cr�ants, et n'ont fait que cro�tre en m�cr�ance, Allah ne leur pardonnera pas, ni les guidera vers un chemin (droit).
- extraits de :
- http://www.portail-religion.com/lire/le-coran-sourate-60-traduction-de-kasimirski.html
- http://islamfrance.free.fr/doc/coran/sourate/3.html
- http://islamfrance.free.fr/doc/coran/sourate/4.html
- La tradition islamique durcira souvent la position du proph�te, comme la tradition chr�tienne l'a fait par rapport � la Bible, . Un hadith de Boukhari, parmi les plus v�n�r�s des sunnites, ne dit-il pas : "Celui qui change de religion, tuez le". Dans divers pays du monde, aujourd'hui, des musulmans sont violent�s, menac�s de morts pour cette raison. L'abjuration est m�me punie de mort dans certains pays (Afghanistan, Iran (loi vot�e en 2008), par exemple), et encore tr�s peu tol�r�e dans de nombreux autres.
- Les religions asiatiques n'�chappent pas non plus toujours � ce profond rejet de l'apostasie, jusqu'aujourd'hui, o� le bouddhisme tib�tain ou laotien, par exemple, le condamne tr�s s�v�rement, se comportant parfois de mani�re criminelle envers les r�calcitrants. Dans l'Inde de l'hindouisme, six �tats on adopt� des lois anti-conversion, interdisant aux hindouistes d'abjurer la religion de leurs parents.
"Abjurations forc�esLes autorit�s locales de plusieurs provinces du Laos ont poursuivi une politique, initi�e ces derni�res ann�es, et forc� des chr�tiens � abjurer leur foi au cours de l'ann�e 2001. Convoqu�s au poste de police, ces croyants sont oblig�s de signer un document o� ils d�clarent renoncer � la � religion �trang�re �. Certains ont m�me d� ajouter � la main : � Nous reconnaissons que cette religion h�rit�e de nos p�res ne nous a rien apport� de bon. �
Ceux qui refusent de signer sont incarc�r�s. � la mi-juillet 2001, les protestants �vang�liques du Laos comptaient vingt-quatre des leurs en prison pour ce motif. D'autres, apr�s avoir �t� intern�s et encha�n�s les uns aux autres, nuit et jour, pendant plusieurs mois, ont finalement c�d� lorsqu'on les a menac�s de faire subir le m�me sort � leurs familles.
- M�me quand ils ont sign� un acte d'abjuration, les chr�tiens ne sont pas laiss�s en paix : on les contraint � participer � des c�r�monies animistes, � des sacrifices d'animaux, � boire du sang et � entrer en relations avec les esprits."
- extrait de : http://www.esprit-et-vie.com/breve.php3?id_breve=68
- ABJURATION et H�R�SIES dans le christianisme
"Le 25 juillet 1593, en l’abbatiale Saint-Denis, n�cropole des rois de France depuis le
Moyen �ge, Henri IV abjure le calvinisme et se convertit au catholicisme.
Henri IV avait �t� d�sign� comme successeur par Henri III avant son assassinat. La
r�tractation publique et le changement religieux donnent lieu � une c�r�monie, au
coeur de la France ligueuse, dans un climat momentan�ment pacifique. Une tr�ve a
�t� d�clar�e � l’occasion de la conf�rence de Suresnes, le 29 avril 1593.
� cette date, Henri IV doit faire face � l’excommunication r�it�r�e par le pape
Gr�goire XIV en mars 1591, ainsi qu’� l’opposition des �tats g�n�raux de la Ligue,
r�unis au Louvre d�s le 26 janvier 1593. En effet, les cahiers de dol�ances r�dig�s
pour les �tats g�n�raux demandent l’�lection d’un nouveau roi catholique, apr�s le
d�c�s du cardinal de Bourbon, surnomm� � Charles X �, le 8 mai 1590. D�clar�e
ill�gale et attentatoire au bien du royaume par Henri IV, l’assembl�e, malgr�
l’opposition des d�put�s mod�r�s, se montre favorable, le 20 juin 1593, au mariage
d’un prince fran�ais avec l’infante d’Espagne : elle entend peser sur la succession
royale, en totale opposition � la loi salique.
� Je mets aujourd’hui mon �me entre vos mains. Je vous prie, prenez-y garde, car l�
o� vous me faites entrer, je n’en sortirai que par la mort ; et de cela je vous le jure
et proteste. � Henri IV s’adresse en ces termes, selon Pierre de L’Estoile, aux pr�lats
� l’origine de son instruction religieuse, l’archev�que de Bourges, les �v�ques de
Nantes, du Mans et d’�vreux, devant lesquels il se pr�sente ce dimanche, en habit
de cat�chum�ne, � v�tu d’un pourpoint de satin blanc chamarr� d’or et de chausses
de m�me, bas d’attache de soie blanche et souliers blancs, d’un manteau et chapeau
noirs, celui-ci avec un panache noir. � Repr�senter Henri IV en manteau royal le
jour de son abjuration entretient la confusion entre la profession de foi, expression
publique de sa conversion religieuse, le 25 juillet 1593 � Saint-Denis, et le serment
du sacre, parole publique de son changement d’�tat, le 24 f�vrier 1594 � Chartres.
Cette pr�cision permet toutefois d’insister sur le fait qu’il est de jure roi de France
depuis le 2 ao�t 1589.
Ayant parcouru cinq ou six pas devant le grand portail de l’abbatiale, Henri IV,
l’imp�trant, r�pondit aux questions rituelles de l’archev�que de Bourges : � Je suis le
roi [...] Je demande �tre re�u au giron de l’�glise catholique, apostolique et romaine [...] Oui, je le veux et je le d�sire [...] Je proteste et jure, devant la face du Dieu tout puissant, de vivre et mourir en la religion catholique, apostolique et romaine, de la prot�ger et d�fendre envers tout, au p�ril de mon sang et de ma vie, renon�ant � toutes h�r�sies contraires � ladite �glise. � Parvenu au choeur de l’�difice, le roi renouvelle ses propos devant les pr�lats et les Grands.
Le 17 septembre 1595, Henri IV obtient l’absolution pontificale par Cl�ment VIII gr�ce aux d�marches des cardinaux d’Ossat et Du Perron. Il peut alors ratifier son absolution, aux Tuileries, le 19 septembre 1596."
source : http://www.henri-iv.culture.fr/medias/fr/pdf/0/736_10.pdf
- " SENTENCE
- L'opinion que le Soleil est au centre du monde et immobile est absurde, fausse en philosophie, et formellement h�r�tique, parce qu'elle est express�ment contraire � la Sainte Ecriture.
- ABJURATION
- "Moi, Galileo Galilei, fils de feu Vincent Galil�e, Florentin, ag� de 70 ans, constitu� personnellement en jugement, et agenouill� devant vous, �minentissimes et r�v�rendissimes cardinaux de la r�publique universelle chr�tienne, inquisiteurs g�n�raux contre la malice h�r�tique, ayant devant les yeux les saints et sacr�s Evangiles, que je touche de mes propres mains; je jure que j'ai toujours cru, que je crois maintenant, et que, Dieu aidant, je croirai � l'avenir tout ce que tient, pr�che et enseigne la sainte Eglise catholique et apostolique romaine; mais parce que ce Saint Office m'avait juridiquement enjoint d'abandonner enti�rement la fausse opinion qui tient que le Soleil est le centre du monde, et qu'il est immobile; que la Terre n'est pas le centre et qu'elle se meut; et parce que je ne pouvais la tenir, ni la d�fendre, ni l'enseigner d'une mani�re quelconque, de voix ou par �crit, et apr�s qu'il m'avait �t� d�clar� que la susdite doctrine �tait contraire � la Sainte Ecriture, j'ai �crit et fait imprimer un livre dans lequel je traite cette doctrine condamn�e, et j'apporte les raisons d'une grande efficat� en faveur de cette doctrine, sans y joindre aucune solution; c'est pourquoi j'ai �t� jug� v�h�mentement suspect d'h�r�sie pour avoir tenu et cru que le Soleil �tait le centre du monde et immobile, et que la Terre n'�tait pas le centre et qu'elle se mouvait.
- C'est pourquoi, voulant effacer des esprits de vos Eminences et de tout chr�tien catholique cette suspicion v�h�mente con�ue contre moi avec raison, d'un coeur sinc�re et d'une foi non feinte, j'abjure, maudit et d�teste les susdites erreurs et h�r�sies, et g�n�ralement toute autre erreur quelconque et secte contraire � la susdite sainte Eglise : et je jure qu'� l'avenir je ne dirai ou affirmerai de vive voix ou par �crit, rien qui puisse autoriser contre moi de semblables soup�ons; et si je connais quelque h�r�tique ou suspect d'h�r�sie, je le d�noncerai � ce Saint Office, ou � l'inquisiteur, ou � l'ordinaire du lieu o� je serai. Je jure en outre, et je promets, que je remplirai et observerai pleinement toutes les p�nitences qui me sont impos�es ou qui me seront impos�es par ce Saint Office; que s'il m'arrive d'aller contre quelques-unes de mes paroles, de mes promesses, protestations et serments, ce que Dieu veuille bien d�tourner, je me soumets � toutes peines et supplices, par les saints canons et autres constitutions g�n�rales et particuli�res, ont �t� statu�s et promulgu�s contre de tels d�linquants. Ainsi, Dieu me soit en aide et ses saints Evangiles, que je touche de mes propres mains.
- Moi, Galileo Galilei susdit, j'ai abjur�, jur�, promis, et me suis oblig� comme ci-dessus; en foi de quoi, de ma propre main j'ai souscrit le pr�sent chirographe de mon abjuration et l'ai r�cit� mot � mot � Rome, dans le couvent de Minerve, ce 22 juin 1633.
- texte extrait de : http://www.mas.ecp.fr/callet/galilee.html
- L'abjuration entre au Moyen-Age dans le cadre de l'Inquisition (Inquisitio : enqu�te), dont les bases sont pos�es pour la premi�re fois en 1183 au concile de V�rone, avant d'�tre officiellement constitu�e en 1233 par le pape Gr�goire IX (1227- 1241) pour combattre les h�r�sies des Vaudois et des Cathares. Elle s'�tendra en Europe, particuli�rement en Espagne, en 1478, et � Rome en 1542, appel�e plus tard Saint Office. Les informations que nous poss�dons sur l'institution et son fonctionnement nous viennent surtout des manuels des Inquisiteurs (pour plus de d�tails, voir le document annexe : L'INQUISITION, th�se de doctorat th�ologique pr�sent�e par Floroaia D. Mihai en 2010, extrait de : http://doctorat.ubbcluj.ro/sustinerea_publica/rezumate/2010/teologie%20ortodoxa/Floroaia_Mihai_fr.pdf
- Si dans le d�tail, les proc�dures varient, non seulement dans l'espace et dans le temps, la libert� d'action donn�e aux pr�lats permet de rencontrer toutes sortes de situation, en m�me temps que d'un point de vue g�n�ral, la mani�re de proc�der est partout similaire :
- 1) Sermon public de l'inquisiteur, qui d�nonce l'h�r�sie, rappelle les dogmes de l'Eglise et propose � l'assembl�e
- un d�lai pour r�fl�chir et l'incite � la d�lation, � la d�nonciation des h�r�tiques : c'est le temps de gr�ce.
- 2) Liste de t�moins et interrogatoires de ces derniers.
- 3) Questionnaires orient�s, o� la ruse et l'astuce sont encourag�es pour confondre l'imp�nitent
- 4) Tortures, dans le refus d'avouer
- 5) Abjuration �ventuelle, � genoux devant l'assembl�e publique, avec diff�rentes formules selon les cas, comme celle particuli�re de la sorcellerie (Bernard Gui, Practica, �ditions Douais, II, 52-53 ; Malleus Maleficarum, �ditions Danet, III, 23, 609-610; 24, 612, 613; 25, 618)
- 6) Autodaf� (du portugais � acto da f� �, du latin actus fidei : acte de foi ). C'est la c�r�monie de p�nitence publique c�l�br�e par l'Inquisition espagnole ou portugaise, pendant laquelle celle-ci proclamait ses jugements. Ce terme s'�tendra ensuite aux c�r�monies publiques de destruction par le feu de livres h�r�tiques, et plus tard encore de livres interdits par des r�gimes autoritaires.
- Dans la probl�matique de l'abjuration, deux cas se pr�sentaient : soit l'individu abjurait, soit il refusait l'abjuration.
- En cas d'abjuration, la proc�dure variait selon la gravit� de l'accusation, qui recouvre trois formes principales :
- - La suspicion faible
- - La suspicion violente
- - L'h�r�tique p�nitent
- L'accus� qui refusait d'abjurer �tait d�clar� h�r�tique imp�nitent ou apostat.
- Avant l'expiation publique (en latin si l'accus� est lettr�, en langage vulgaire dans les autres cas, les pr�paratifs sont sensiblement les m�mes pour chaque cas d'abjuration : un sermon est prononc�, un �chafaud est dress� (la messe, le sermon y sont parfois donn�s), des lectures sont faites, r�capitulant surtout la liste des erreurs h�r�tiques retenues par l'Eglise, et enfin, des p�nitences et indulgences diverses sont prononc�es, respectivement pour les abjurants, les d�nonciateurs et les collaborateurs. Parmi les p�nitences on notera divers p�lerinages, le port d'habits de p�nitence, sortes de scapulaires semblables � ceux des moines et portant, devant et derri�re, des croix de toile (croix de Saint Andr� en Espagne) ou de drap, la couleur jaune ou rouge, parfois orn�s de figures d�moniaques. Ces habits particuliers sont appel�s des "sacs b�nis" :
"Les origines du sac b�ni remontent � l’Ancien Testament : on lit en effet, dans le Livre des Rois (1, 21), qu’Achab fut condamn� � s’habiller de sac pour avoir mal acquis la vigne de Nabot. S’habiller de sac �tait, sous l’ancienne loi, signe de p�nitence : ainsi donc le port du sac b�ni convient-il parfaitement � l’�tat de p�nitence. Et, en effet, l’Inquisition d�l�gu�e a utilis� d�s ces d�buts le sac b�ni : celui-ci est mentionn� d�j� dans le concile de Tarragone de l’an 1229, celui-l� m�me auquel assistait saint Raymond de Penyafort, et dans certaines lettres de saint Dominique dont il est question au chapitre 20 de l’ouvrage de Camilus Gampegius. Le concile de Tarragone pr�voit que le sac b�ni doit �tre orn� de deux croix d’une couleur distincte de celle du sac, l’une sur le c�t� droit, l’autre sur le c�t� gauche ; il indique en outre que le p�nitent doit avoir sur lui la sentence de r�conciliation �piscopale.- C’est le concile de B�ziers qui �tablira une fois pour toutes la couleur et l’emplacement des croix, et il pr�cisera que, si l’h�r�tique est condamn�, il en portera une troisi�me � sur le capuchon ou sur le voile �. Pour les h�r�tiques qui se seraient parjur�s, le concile de B�ziers pr�voit en plus un deuxi�me bras transversal, d’un empan, � peu pr�s en haut des deux croix. Ceux qui doivent aller outre-mer On d�signe par � passage outre-mer � le p�lerinage en Terre sainte que devaient parfois accomplir les p�nitents de l’Inquisition porteront leurs croix jusqu’� ce qu’ils touchent le port ; � leur d�barquement, ils les d�poseront, mais les reprendront d�s qu’ils rentreront ; ils ne les d�poseront pas lors d’�ventuels d�barquements dans les �les.
- Pourquoi le port des croix devant et derri�re (comme �tabli � B�ziers), et non � droite et � gauche (comme pr�vu a conciles de Tarragone et de Toulouse) ? je crois que c’est afin que chacun puisse distinguer l’h�r�tique,qu’il aille... ou qu’il vienne. Car, en r�alit�, aux origines, les deux croix �taient port�es sur la poitrine, � droite et � gauche, conform�ment � qu’avait pr�vu saint Dominique : � Ils porteront un habit semblable � celui des religieux aussi bien par la forme que par couleur, sur lequel on coudra deux petites croix identiques � hauteur de chaque t�ton (in directo utriusquepapillae). �
- Il est abondamment question du sac b�ni dans les instructions d’Avila pour l’Inquisition espagnole (1498) et dans instructions madril�nes de 1561. Le sac b�ni est appel� abitello* en Italie, et en Espagne parfois samarreta, parfois san benito** (presque saccus benedictus)."
- estrait de : http://ermitage.ouvaton.org/spip.php?article489
* sacco benedetto- ** saco benedicto
- La suspicion faible ou Abjuratio de levi
- C'est celle qui n'a pu �tre �tay�e solidement par la justice inquisitoriale, ni par les faits, ni par des indices probants. L'accusation peut reposer par exemple sur la simple familiarit� de l'accus� avec les h�r�tiques. Ici, l'abjuration doit �tre pr�c�d�e de l'expiation ou purgation canonique, tomb�e en d�su�tude � la fin du moyen-�ge. C'est une abjuration de levi (latin : l�ger, de faible poids) Apr�s l'inquisition elle pourra �tre prononc�e en secret, selon le droit canonique, dans la maison d'un �v�que par exemple, mais au plus fort de l'inquisition elle se fait publiquement. Par ailleurs, on fait toujours jurer � l'accus� de d�noncer tout h�r�tique, sous peine de se voir un jour condamn� � son tour, et de mani�re d�finitive cette fois. Car celui qui retombe dans l'h�r�sie est d�clar� relaps : il est confi� au pouvoir s�culier, qui le condamnera aux gal�res ou � la mort, par le b�cher, le plus souvent.
- "L'inquisiteur donne � l'abjurant l'avertissement qui suit : "Mon cher fils, prenez garde � vous, car quoique suspect l�g�rement, pour un rien (pro modico) vous deviendriez suspect gravement, et vous seriez oblig� d'abjurer comme tel : et si vous retombiez, vous serez livr� sans mis�ricorde au bras s�culier pour �tre puni du dernier supplice". Apr�s cela l'inquisiteur lui enjoindra la p�nitence qu'il jugera � propos".
- extrait de : Abr�g� du manuel des inquisiteurs, Andr� Morellet,Jean-Pierre Guicciardi
- La suspicion violente ou Abjuratio vehementi ou violenti
- Comme pour la pr�c�dente, il n'y a pas de preuve av�r�e, mais � l'inverse, les indices sont manifestes selon les accusateurs. L'accus� est donc condamn� pour h�r�sie. A partir de l�, soit ce dernier abjure et expie, il est condamn� selon la gravit� des suspicions � la "prison perp�tuelle" (perpetua vincula) ou � la prison temporaire (ad tempus), mais dans les faits, celui qui �tait condamn� � la prison perp�tuelle n'y passait pas plus de cinq ou six ans, sans compter que dans certains cas (comme en Espagne), certains accus�s pouvaient travailler la journ�e � l'ext�rieur. Comme dans les autres sentences, des p�nitences sont inflig�es :" "Tous les dimanches et f�tes, entre l’Ep�tre et l’�vangile, les p�nitents avanceront nu-pieds, habill�s du seul v�tement de p�nitence (port� en moyenne de 1 � 2 ans v�tement blanc avec deux croix rouges), et des verges � la main, jusqu’au c�l�brant qui les fouettera et leur demandera apr�s quel crime ils expient." C’est l� un tr�s vieux ch�timent, tir� certainement du quatri�me degr� de p�nitence de saint Jean Climaque."
- extrait de : http://ermitage.ouvaton.org/spip.php?article489
- L'h�r�tique p�nitent
- Son traitement est tr�s proche du cas pr�c�dent, � ceci pr�s que la condamnation � la prison est forc�ment
- perp�tuelle et qu'il est condamn� � porter ad vitam aeternam son habit de p�nitent, blanc avec deux croix rouges, qu'il montrera au peuple aux grandes f�tes chr�tiennes. Pour cela, il se tiendra aux portes des grandes �glises, du matin � midi, et de v�pres � la tomb�e de la nuit.
- Le refus d'abjurer : L'h�r�tique imp�nitent.
- L'accus� ne cache pas ses croyances et n'admet pas l'accusation elle-m�me d'h�r�sie. C'est le pire des cas, car le pouvoir inquisiteur va mettre en branle les m�thodes les plus extr�mes pour obtenir de l'accus� son expiation, son abjuration. Primo, il est sans autre forme de proc�s mis aux fers et gard� au secret en prison. Il re�oit de temps en temps la visite de l'�v�que, de l'inquisiteur, ou des deux, qui vont s'efforcer de le convaincre de la fausset� des ses opinions. S'il persiste encore, on r�unira un coll�ge d'experts, dix ou douze, recrut�s parmi le clerg� s�culier et les juristes la�cs, qui essaieront � leur tour de le ramener dans l'orthodoxie. S'ils �chouent, on placera l'imp�nitent
- dans une prison des plus horribles et des plus obscures (on disait qu'on l'emmurait, parce que la pi�ce pouvait �tre petite et les murs tr�s proches), ce qui devait faire peur � bien des individus normalement constitu�s. Si malgr� toutes ces privations, l'accus� persistait dans son refus, on le d�pla�ait dans une prison moins dure, on lui amenait le cas �ch�ant sa femme et ses enfants pour le supplier d'expier ses fautes, et on lui promettait la commis�ration des juges s'il abjurait. Les r�calcitrants �taient finalement remis au pouvoir s�culier, qui allait se charger de le torturer. La transmission d'autorit� du religieux au civil �tait officialis�, cri� sur les toits, et l'autodaf� �tait � peu pr�s semblable aux autres cas, exception faite de la pr�sence des autorit�s civiles de justice, comme le bailli et ses officiers, charg� de r�cup�rer l'accus� � la fin de la c�r�monie. L'h�r�tique est excommuni�, le religieux �ventuel, d�grad�. Le supplici� pouvait abjurer � deux pas du b�cher : dans ce cas on l'�tranglait pour lui �viter les souffrances du feu.
- Un cas d'abjuration tr�s particulier et c�l�bre dans l'histoire demeure celui de Jeanne d'Arc, on en trouvera un bon expos� dans un document annexe, LA PSEUDO ABJURATION DE JEANNE D'ARC, extrait du suite suivant :
- http://www.stejeannedarc.net/livres/Dunand_abjur_StOuen/Dunand_abjur_StOuen.pdf
Sources :- - http://www.ciels.fr/annal02.htm
- - http://histoirepourtous.canalblog.com/archives/antiquite/index.html
- - http://catholiques.info/LA%20SAINTE%20INQUISITION.htm
- - http://ermitage.ouvaton.org/spip.php?article489 et ss.
- - http://sites.google.com/site/islamdefiechristianisme/Home/christianisme/bible/l-apostasie-dans-la-bible
- - http://sites.google.com/site/jouneausion/la-justice
- - http://doctorat.ubbcluj.ro/sustinerea_publica/rezumate/2010/teologie%20ortodoxa/Floroaia_Mihai_fr.pdf
- - http://deogratias.unblog.fr
- Illustrations :
- - http://www.henri-iv.culture.fr/medias/communs/images/grand_format/0/176_4.jpg (tableau bollery)
- - http://belcikowski.org/ladormeuseblogue2/wp-content/uploads2010_2/bellini_fleury/fleury_galilee.jpg
- (tableau R-Fleury)
- - Le sabbat des sorciers en Europe XVe-XVIIIe si�cle : colloque international ...
Nicole Jacques-Chaquin,Maxime Pr�aud- - Les mots de l'inquisition, Jean-Pierre Dedieu
- - Abr�g� du manuel des inquisiteurs, Andr� Morellet,Jean-Pierre Guicciardi
- - L'�conomie sacramentelle du salut : r�flexion th�ologique sur la doctrine ...
Edward Schillebeeckx