ENCYCLOPEDIE -DE--LA--LANGUE -FRANCAISE
 

-ABEILLE

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LES ABEILLES ET LES HOMMES

croyances,
savoirs
et
apiculture


----APICULTURE TRADITIONNELLE----
et PATRIMOINE---

L'AMÉRIQUE PRÉCOLOMBIENNE
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( III )


 
 
 
 

Un autre aspect de l'apiculture maya nous est offert au travers de vaisselle en céramique de l'époque classique, vers 550 - 950, popularisée par la technique photographique dite de roll-out, développée tout particulièrement par l'Américain Justin Kerr, photographe et mayaniste, dans les années 70, et qui permet une représentation plane d'un objet cylindrique. C'est au travers de cette collection, principalement des vases, des bols et des verres, que nous aborderons notre sujet. Ces objets datent surtout de la période tardive classique, autour du Xe siècle et sont conservés dans des musées ou des collections privées, dont nous ne connaissons souvent que la référence photographique de l'image roll-out de Kerr : le symbole K suivi d'un chiffre, que nous préciserons à chaque fois.
 
Commençons par une scène mythologique dont les personnages principaux figurent dans le poème sacré du Pop-Wuh (Popol-Vuh), en tête desquels figurent les héros jumeaux Xbalanqué (Chbalanqué) et Hunahpu, qui défient ici Xibalba (pour venger leur père) au jeu de balles pok-ta-pok (tlachtli en aztèque, ullama [ou ulama] liztli en nahuatl), une sorte de jeu de pelote. En plus d'être chasseur, magicien et scribe, Xbalanqué est aussi apiculteur :

   A l'extrême droite, une femme porte d'une main un pot rempli sans doute de miel, car elle nourrit d'une autre un tatou (dasypodidae) qui s'attaque fréquemment aux nids d'abeilles (Aranda et March, 1987). On voit une abeille au-dessus de lui, attaquée par une libellule. Une observation fine permet de voir qu'une patte postérieure de l'abeille porte une corbeille (scopa) pour recueillir le pollen ou les résines. Selon Kerr (2008), Un des jumeaux divins écoute en fumant le personnage zoomorphe (un crapaud) qui fait office de messager et qui annonce peut-être l'invitation des Seigneurs de l'Autre Monde (dont fait partie Xibalba) à jouer avec eux à la pelote. Un autre, à sa droite semble tirer sur les cornes d'un cerf, qui donne un coup de pied à un nid de guêpes (xux).
 Lèvre et panse d'un bol, K1254
15 cm de haut, 17 cm de diamètre,
59 cm de circonférence, : nous conserverons
cet ordre pour les autres images.

 

 
On distingue ici trois niveaux de décor, avec une bande de glyphes, sur la lèvre du bol, puis une série d'êtres surnaturels au-dessus des plus grands personnages du décor. C'est parmi les personnages divins que se trouvent les abeilles, dans la main et autour d'un avatar de Xbalanqué, Mok-Chi (Mol Ko Chi), en apiculteur, qui en a la charge (Stuart et Grube, 1987), et qui est aussi un des dieux de la mort et de l'occulte. C'est le troisième personnage de la rangée et il est placé à la droite d'un jaguar dans les flammes, animal symbolique très lié, nous l'avons vu, aux autres dieux gardiens des abeilles.
  Verre, 25,3 x 17,6 x 51 cm, K3924  
 
Le glyphe de Mokchi (détail de K2286). Selon Kerr, il ne faudrait pas lire "Mok-Chi" : "Nue-Bouche" des épigraphistes Stuart et Grube, mais plutôt "Mol-Ko-Chi ": "Celui qui rejoint le sucré".

Vase, 12 x 12 x 17 cm, K2284

 L'apiculteur Mok Chi est de nouveau présent sur ce vase (toujours utilisé comme ruche), à droite de l'image, tenant une jarre de miel à large col, d'où s'échappent des abeilles. Sur cette jarre, est inscrit le glyphe ak'bal (de ak, nuit, obscurité et bal, jaguar) : Akbal est en effet le dieu de la nuit qui descend dans l'Inframonde sous la forme du jaguar, représenté à gauche entouré d'une fleur de nénuphar, représentant, entre autres, la saison des pluies, la lune (Milbrath: 1999, 120-1). Akbal est aussi le 20e jour du calendrier Tzolkin, associé au point cardinal Ouest et à la couleur noire. Il est aussi le dieu de la mort, illustré par le fémur qu'il porte au travers de sa tête et les yeux exorbités autour d'elle, mais aussi par le signe, sur sa cuisse, illustrant le jour de la mort, cimi (ou kimi) qui ressemble à notre symbole de pourcentage :

 

 
 On assiste ici à la transformation de Xbalanqué/Mok Chi en quatre étapes. De gauche à droite, le dieu exécute une danse rituelle, puis se tanche la gorge avec une hache, se transforme d'abord en apiculteur, qui tient une abeille sans sa main, ensuite en jaguar en feu. Encore une fois, le signe akbal est inscrit sur les vases de miel. Certains spécialistes voient dans les abeilles représentées sur ces céramiques non les mélipones domestiques mais des abeilles sauvages, sylvestres, ou des abeilles de montagnes (k’aaxil kab), qui avaient toutes un nom maya (Suárez,1977: 234-237; Terán et Rasmussen, 1994: 266-274; Ayala, Griswold et Bullock, 1993:179-228). Ainsi, le jaguar a pu représenter une abeille solitaire, si l'on se réfère à un des premiers dictionnaires des frères (frailes) dominicains : "Ah balamcab : abeille sauvage des forêts, élevée sous la terre” (Arzápalo, 1995:1442).
 Vase, 18,2 x 10,5 x 32 cm, K2942

 Métamorphose de Mok Chi en abeille,

K6169

 

 
Un certain nombre de livres font partie des Chilam Balam (de chilan, prêtre prophète et balam, jaguar). Ces mots désignent une catégorie de prêtres et, par extension, la plupart des ouvrages de la littérature maya écrite, qui ont transcrit en yucatèque (mais avec notre alphabet) pendant près de deux cents ans les anciens codex préhispaniques qui ont disparu. Parmi les plus connus, il y a le Chilam Balam de Chumayel, ville du Yucatan où il a été trouvé en 1782, avant d'être étudié par un érudit maya. Selon l'ethnographe Robert Redfield, une grande cérémonie propitiatoire des dieux des abeilles est évoquée dans ce texte, la U Hanli Cab (hanlil : repas festif ; cab, ici l'abeille : Le repas de l'abeille). Pour célébrer ce rituel, deux fois par an, un autel est préparé et un prêtre conduit la cérémonie, le Men (Hmen, Ah Men : "Celui qui fait, qui exécute"), qui chante, allume des chandelles, boit un breuvage rituel fermenté appelé sakah (saká, zacá) un atole à base de maïs, bien sûr et fait des offrandes en demandant la permission aux dieux de récolter le miel. Des prières sont faites, pendant lesquelles des musiciens, les mayapax (de maya et de pax, tambour) jouent de la musique.


Ensuite, il convie les participants à boire pour établir un pacte de paix et d'harmonie avec les dieux de l'apiculture. Nous avons une illustration de ce genre rituel dans la scène qu'on a appelée "Les Ivrognes" (Los Borrachos) :

 Vase, 19 x 16 x 50,5 cm, K2942

Une autre pratique conjointe était celle des lavements par voie rectale d'alcool, peut-être mélangé à d'autres substances :

Bol, Blue Creek, nord-ouest du Belize, fin de l'époque classique, vers 850 - 1000.

 
Sources :
 
- http://www.scirpus.ca/cap/articles/paper040.htm
- http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/jsa_0037-9174_1929_num_21_1_3660#
- http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/jsa_0037-9174_1936_num_28_2_1943
- http://wwk.laprensagrafica.com/revistas/septimo-sentido/27193-fotografia-de-un-pueblo.html
- http://www.abelhanativa.com.br/artigos/Troco200405.pdf
- http://mythologica.fr/maya/bacab.htm
- http://www.apitec.net/pdf/apitec71.pdf
- http://sacred-texts.com/nam/maya/cbc/cbc06.htm (chilam balam)
- http://www.famsi.org/mayawriting/codices/madrid.html
- http://www.geocities.com/sitioapicola/notas/codicesmayas.htm
- http://www.culturaapicola.com.ar/wiki/index.php/Jo%C3%A3o_Pedro_Cappas_e_Sousa
- http://www.culturaapicola.com.ar/apuntes/historia/11_produccion_apicola_mexico.PDF
- http://etzakutarakua.colmich.edu.mx/proyectos/relaciondemichoacan/default.asp
- http://journals.cambridge.org/action/displayAbstract?fromPage=online&aid=1233384
- http://etzakutarakua.colmich.edu.mx/proyectos/relaciondemichoacan/
- http://vma.uoregon.edu/inst_doprofile.lasso?&DoWhat=d&Document=7330
- http://www.apitec.net/pdf/apitec71.pdf
- http://www.mayavase.com/tran/trans.html#picture%20fig17
- http://www.uady.mx/sitios/editoria/biblioteca-virtual/miscelanea/s.html
- http://entomology.ifas.ufl.edu/sanford/apis/papers/merida3.htm
- http://striweb.si.edu/publications/PDFs/Roubik_Melipona.pdf
-
 
 
Images :
 
- http://www.famsi.org/research/graz/madrid/index.html (codex madrid)
- http://www.culturaapicola.com.ar/wiki/index.php/Meliponicultura_en_el_C%C3%B3dice_Maya_de_Madrid (codex madrid)
- http://www.latinamericanstudies.org/tulum-descending-god.htm (temple ah mucan cab)
- http://www.mesoweb.com/resources/handbook/WH2005-Fr.pdf (glyphe cab)
- http://www.hesseltvandinter.com/designbooks/ (abeille, dessin)
- http://bib18.ulb.ac.be/cdm4/item_viewer.php?CISOROOT=/shu002&CISOPTR=446&REC=1 (codex mendoza folios 36 et 40 )
- http://commons.wikimedia.org/wiki/Codex_Mendoza (folio 37)
- http://www.expocodex.fr/codex/Codex_Moctezuma.pdf
- http://www.analesiie.unam.mx/pdf/01_03-14.pdf (relacion michoacan)
- http://research.mayavase.com/kerrmaya.html (roll out de Kerr)
L'écriture maya, article de H. Beuchat, Journal de la Société des Américanistes Année 1913 Volume 10 Numéro 10-2 pp. 427-471
extrait de :
- http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/jsa_0037-9174_1913_num_10_2_2867?_Prescripts_Search_tabs1=standard&
(pax)
- http://www.mayaresearchprogram.org/web-content/Artifacts_Album/Ceramics/pot2_enema_bowl_jpg.jpg (blue creek)
- http://2.bp.blogspot.com/_lmY20BpvLco/SKZJYvWnrsI/AAAAAAAAAR4/80FQ5yN-FT0/s1600-h/ldegomara01.jpg
 
 

 

 

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