ENCYCLOPEDIE -DE--LA--LANGUE -FRANCAISE
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-La Galilée
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1000 - 1050

 

 

 


 

Plans en coupe de deux galilées modèles de la première moitié du Xe siècle : Cluny et Tournus

Notez que le plan basilical de la galilée de Conant, raccourcie au profit de l'atrium n'est plus accepté de nos jours. Christian Sapin propose un plan corrigé d'après les mesures du "Liber Tramitis" (voir texte), avec une élévation intérieure sur deux niveaux, à l'image de la galilée de Tournus, datant de la même époque.

Voir aussi : La galilée de Cluny III


 

C'est dans le deuxième coutumier de Cluny, dont il a déjà été question, le Liber Tramitis, que se trouve la plus ancienne mention d'une galilée, galilaea dans le texte, que nous nommons aussi narthex, avant-nef ou porche. A l'abbaye de Farfa, réformée par Cluny, dans les Consuetudines Farfenses, il est aussi question de "Galilée", et même de ses dimensions: 65 pieds de largeur et 56 de profondeur.

Dans l'absence de toute explication, ici ou là, de ce terme, on est parti du mot lui-même pour expliquer son acception architecturale au moyen-âge, qui évoluera par ailleurs dans le temps. Galilaea se rapporte à la région de Galilée, bien sûr, celle des Evangiles, au nord de la Palestine, plus précisément celle où apparaît, sur une des ses montagnes, le Christ ressuscité (Matthieu 26 :32 ; 28 : 7-10 et 16-20, Marc 14 : 28 ; 16 :7).

Augustin, déjà, s'était hasardé à son exégèse et, de Grégoire le Grand à Rupert de Deutz (1075 - vers 1129), en passant par Bède le Vénérable, on reprend, modifie, développe celle-ci en la traduisant par transmigratio peracta, qui désigne le passage d'une vie impure à celle parfaite de la vie en Dieu, mais aussi le passage de mort à la vie éternelle, à l'image du Christ ressuscité. Continuant le parallèle avec l'apparition de Jésus aux apôtres, en Galilée, les docteurs de l'Eglise parlent de cette galilaea comme d'un moment eschatologique, le face à face avec le Seigneur, quand les temps auront fait place à l'éternité.

Cet aspect eschatologique est clairement exprimé par l'homélie de Pâques d'Heiric d'Auxerre, écolâtre de l'abbaye Saint-Germain d'Auxerre, dont les oeuvres furent copiées pour la bibliothèque de Cluny à la fin du Xe siècle, et qui auraient eu, selon Kristina Krüger, une grande influence sur Odilon de Mercoeur, dont témoigne tout particulièrement la galilée qu'il fit bâtir. Mais on peut aussi penser plus simplement que la Galilée du Christ est "un lieu de rassemblement et de préparation des disciples avant de monter à Jérusalem. Il est le carrefour des Nations venues en pèlerinage, mais aussi le lieu de recueillement des processions monastiques."

texte extrait de la page web : http://vezelay.cef.fr/moines.htm

Kristina Krüger pense, par ailleurs, que les avant-nefs romanes à deux niveaux en Bourgogne et dans les régions voisines représentent un type de structure spécifiquement clunisien, arguant pour cela que seuls, les établissements clunisiens ou ceux possédants des liens étroits avec ces premiers sont dotés de pareilles galilées. Elle ajoute que, "avant le milieu du XIIe siècle, la désignation de galilaea pour un édifice ne se trouve que dans les monastères réformés par Cluny ou ayant adopté les coutumes clunisiennes."

texte extrait de la revue : Dossiers d'Archéologie (voir Sources)

A Cluny même, Odilon fait bâtir une avant-nef, dite narthex et plus spécialement, galilée, découverte par les fouilles archéologiques de K.J Conant (Cluny II), à l'état de traces.
Sa plus proche parente est celle de Tournus, dont les abbés sont très proches de ceux de Cluny, mais on en trouvera dans les prieurés clunisiens de Romainmôtier, de Payerne, en Suisse, mais aussi à Saint-Germain d'Auxerre, réformée par Cluny, avons-nous déjà dit :

Saint-Philibert de Tournus, Narthex, première moitié du XIe siècle : trois travées centrales, voûtes d'arêtes, collatéraux voûtés en berceaux perpendiculaires au vaisseau central ou nef, piliers cylindriques très massifs.

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Notre-Dame de Paray-le-Monial, Narthex, première moitié du XIe siècle. De gauche à droite, Intérieur, détail d'un chapiteau, voûtes en berceau.
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Dans la galilée clunisienne, la dernière station du dimanche de Pâques "à l'endroit que nous appelons la galilée" nous dit Rupert, l'abbé de Deutz que nous avons cité plus haut, dans son Liber de divinis officiis. Fille de Siegbourg, située sur la rive droite du Rhin, en face de Cologne, l'abbaye de Deutz suit les coutumes clunisiennes, qui instaure des stations solennelles dans les galilées de ses monastères, lieux symboliques de la vision du Christ ressuscité.

C'est Odilon de Cluny qui est le grand ordonnateur de cette nouvelle liturgie, où les messes des morts se multiplient, célébrées sur un autel de la galilée, parce que ces morts sont censés être appelés à la vie éternelle : Odilon décide d'élargir l'église à l'ouest sur deux niveaux : en bas on célèbre la résurrection du Christ, et en haut, ce sont les morts qu'on prie dans l'espoir de leur salut au Jugement Dernier
 
 

Sources :

 
Revue "Dossiers d'Archéologie" n°269, Cluny ou la puissance des moines, article de Kristina Krüger.

http://www.art-roman.net/paray/paray.htm
http://fsc.cluny.free.fr/sites/paray1.htm
http://www.burgundforum.de/reisef/paray2.html
http://architecture.reli3.free.fr/tournus0.htm
 
 
 

 
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